La Chine malade de ses minorités ?
Après les Tibétains, ce sont les Ouïgours qui se font taper dessus. En fait, comme eux, cela fait bien longtemps qu’ils sont réprimés dans l’Empire du Milieu. Seulement, comme c’est loin, on n’en parle que lorsque l’armée chinoise en fait un peu trop. La répression au quotidien n’intéresse personne sauf ceux qui en sont victimes.
La Chine
Le monde ne manque pas de conflits latents de ce genre. Un
coup de force perpétré à un moment donné de l’Histoire a fait basculer un
territoire et ses habitants sous une coupe étrangère hostile. Parfois, c’est
même un traité reconnu par tous qui légalise l’occupation étrangère. C’est le
cas de la Cilicie la Turquie. D
L’Amérique latine a aussi ses sources de conflits. Souvent,
un Etat a possédé dans le passé un territoire qui lui a été retiré par une
population qui n’en voulait pas. Les livres d’histoire et de géographie de ces
pays parlent de « territoires contestés ». Il s’agit, notamment, du
Bélize revendiqué par le Mexique, de la cordillère du Condor revendiquée par
l’Equateur, les Malouines réclamées par l’Argentine. En revanche, que dirait le
Mexique si le Guatémala réclamait le Chiapas qui lui a appartenu dans le passé
et dont la population possède une évident parenté avec le petit pays ? Que
diraient le Chili, le Paraguay et l’Argentine si la Bolivie
Pour ajouter à la confusion ou, tout simplement, par ignorance, les commentateurs évoquent des « affrontements inter-ethniques ». C’est faire le jeu de Pékin qui considère que tout son territoire est chinois et doit être sinisé. D’abord, on donne à ces pays des noms en langue mandarine. Ainsi le pays des Ouïgours, le Turkestan oriental est devenu le Xinjiang, ce qui signifie en chinois “nouvelle possession” et le Tibet est le Xizang. Ensuite, on rend minoritaires chez eux leurs populations. L’administration et l’armée sont chargées d’imposer ces changements. Ainsi, l’heure à Kachgar ou à Lhassa est la même qu’à Pékin à l’extrémité du continent. Que dirait-on si l’on parlait d’affrontements inter-ethniques chaque fois qu’une population occupée résiste contre son occupant ? Parle-t-on d’affrontement inter-ethniques quand les Palestiniens affrontent les Israéliens, pourtant beaucoup plus proches ethniquement ? Aurait-on osé qualifier d’affrontements inter-ethniques les conflits entre les Français et les Allemands ou pire encore, de la volonté des nazis allemands d’éliminer les ethnies non germaniques de son territoire.
Ce que l’on veut bien qualifier d’ignorance sert les intérêts de Pékin à l’étranger. Tant que l’on considérera les révoltes des indigènes contre l’occupation chinoise comme de simples « affrontement inter-ethniques », on donne raison aux Hans de vouloir remettre de l’ordre dans leur pays. Leur pays est constitué en grande partie de territoires obtenus à l’issue de guerres d’annexion menées par les empereurs et autres seigneurs de guerre. Malgré l’internationalisme affiché depuis la prise du pouvoir par les communistes au siècle dernier, prompts à défendre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes aux tribunes de l’ONU et des sommets des non-alignés, l’occupation des territoires non chinois continue avec l’appui des grands puissances.
En fait, on essaie toujours d’occuper une parcelle de l’autre et si possible de le faire partir. A l’échelle individuelle, il suffit de prendre l’escalier d’une HLM pour s’en faire une idée. Un locataire va commencer par laisser sécher son parapluie sur le palier et, presque tout de suite, son déposer chariot, puis ses vélos, puis ses chaussures, puis ses pommes de terre. L’idée est d’occuper le plus possible le palier à son profit, de s’en approprier la plus grande surface. Ainsi, on suggère que l’étage appartient à celui qui occupe le plus les communs. On pèsera plus quand il faudra prendre en collectivité une décision. Cette démonstration de force est destinée à impressionner les voisins et le gardien de l’immeuble. Si un voisin proteste, alors, il y aura conflit et, celui qui occupe le plus perdra le moins dans le cas, fort rare, où justice serait faite. Tout au plus, il rentrera ses godasses et ses patates mais comme l’autre n’y mettra pas les siennes par respect de la loi commune, le premier réoccupera l’espace assez rapidement et là, personne ne dira plus rien. Le voisin lésé se retrouvera tout seul ou s’écrasera.
A l’échelle planétaire, c’est bien ce qui se passe. Les Chinois –mais pas seulement eux –jouent ce rôle du voisin irascible à qui tout le monde finit par donner raison tant qu’il met ses bottes devant la porte de ses voisins et qu’on n’est pas sur le même palier.