Autour de la Libye
D'abord, remarquons que les commentateurs des événements de Libye sont plutôt bons. On se souvient du festival d'inepties lors des précédentes crises dans le monde arabo-musulman et particulièrement lors de la guerre contre l'Irak en 1990/1991.
Tout le monde comprend que la clé de ce qu'on appelle « le printemps arabe » se trouve en Libye. Si Kadhafi mate la révolte, il fera école. Tous les autres régimes comprennent qu'il suffira d'employer la force contre des civils courageux mais désarmés et surtout inorganisés. On peut cependant douter que la résolution de l'ONU ne soit pas déterminée par d'autres arrières-pensées.
La Libye gène tout le monde.
Pour l'Europe et l'Amérique du nord, ça tombe mal au moment où l'on comptait sur la stabilité de son régime pour ré-établir des relations commerciales. On était prêt à lui trouver des vertus qu'on avait du mal à déceler chez lui.
Pour l'Afrique, la crise actuelle met en avant la façon dont les États reconnus sont délimités. Les puissances colonisatrices ont tracé les frontières en fonction de leurs intérêts. Face au danger d'embrasement total du continent, l'Organisation de l'Unité Africaine a reconnu les frontières issues de la colonisation, frontières qui divisent les ethnies parfois les familles. La rébellion en Libye montre bien le caractère artificiel de ces contours. La Cyrénaïque s'est soulevée quand la Tripolitaine reste plutôt fidèle à Kadhafi. Les bédouins du Fezzan ont rejoint les Cyrénéens. L'Union Africaine – qui a pris la suite de l'OUA à l'initiative de Kadhafi (justement) – se trouve encore plus gênée que pour la Somalie ou le Soudan très récemment. D'un côté, on ne regretterait pas Kadhafi, d'un autre, une évolution qui favoriserait une partition de la Libye menacerait tout le continent noir et leurs gouvernants ; ceux-là mêmes qui siègent effectivement à l'UA. La victoire de la rébellion n'arrangerait pas forcément les affaires de tout le monde.
http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=10653
Faut-il aider la rébellion ? La patrie des Droits de l'Homme ne peut que voler au secours des peuples en lutte dans la ligne des Soldats de l'An II.
Il est curieux d'entendre certains se répandre sur la toile à coups de photos et de citations rappeler l'accueil inouï fait à Kadhafi à Paris, il y a quelques années seulement. On ressort la photo de notre cher Président Sarkozy assis par terre à côté de son homologue libyen dans une tente dressée en plein Paris. Ce folklore n'a pas dû impressionner notre cher Président habitué à fréquenter Disneyland. Pour ces persifleurs, il était évident que les atermoiements de la diplomatie françaises trahissaient la collusion entre les intérêts de la droite au pouvoir pour les contrats pétroliers et nucléaires. Pourtant, les mêmes dénoncent quelques jours plus tard la guerre que la France a déclaré contre la Libye. On peut s'interroger sur le sérieux de ces gens-là surtout que ce sont les mêmes qui, des années auparavant, organisaient des expositions pour montrer les bienfaits des politiques menées en Libye et en Syrie. À l'époque, il ne fallait surtout pas exprimer des doutes sur la légitimité de ces régimes et sur les résultats affichés. Aujourd'hui, sans doute blackboulés par la perte de leurs illusions, ils sont contre tout et quoi qu'il arrive. Quand on ne fait rien, on est contre. Quand on se décide à faire, on est contre. Ça ne fait pas avancer la réflexion.