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la lanterne de diogène
29 septembre 2011

Paris-Inter

Évidemment, cette année, il n'y a pas grand chose à dire. On n'attend plus M. Val au tournant en espérant qu'il va se planter dans le décor. Il s'agit d'une grille de rentrée ordinaire avec ses déceptions et ses bonnes surprises. Beaucoup de premières et peu de secondes.

 

Bien sûr, chacun regrettera la disparition de l'émission qu'il écoutait. Il en va de la vie et de la radio. Nous sommes loin des polémiques montées de toute pièce par un groupe d'auditeurs occasionnels qui retrouvaient sur leur téléphone portable des personnalités extérieures tenant chronique. S'il faut tenir compte de ces nouvelles pratiques d'écoute de la radio à l'heure où l'on « zappe » dans tous les domaines, on doit quand même rappeler que la radio n'est pas une suite de chroniques plus ou moins bien ficelées mais un enchainement qu'on voudrait harmonieux et cohérent d'émissions. La radio n'est pas plus une enfilade de disques matraqués par des DJ liées aux maisons de production.

 

Sur France-Inter, la seule cohérence, c'est encore et toujours la parlotte qui fait qu'on reconnaît la station quand on fait de la route et qu'on cherche l'antenne la plus audible là où l'on se trouve. La tendance est clairement affirmée. La chasse à la musique et à la création radiophonique semble arrivée à son apogée ; encore que, le pire est toujours possible en ce domaine. La preuve : dimanche 25 septembre, soirée consacrée à l'élection sénatoriale. En supposant que ça passionne les Français, on peut néanmoins se dire que c'est de l'information sur un sujet qui nous concerne. Ça passe à l'heure du Masque & la Plume. Eh bien, ce n'est pas Le Masque & la Plume qui saute mais le concert du dimanche soir par l'orchestre de Radio-France. Tout ça pour entendre des gens évoquer des films sortis depuis plus d'une semaine et dont on a parlé et reparlé à l'antenne, dont les acteurs ou les réalisateurs se sont répandus dans les diverses émissions, dont on a déjà entendu des opinions tout au long des semaines.

 

Ce qui marque la nouvelle grille, c'est la suppression des rendez-vous du soir. La saison dernière, sur le coup de 21 heures, une voix féminine différente chaque jour nous proposait de Partir avec elle. Voyages, rencontres insolites dans le style de la grande Kriss, redécouverte d'écrivains voyageurs. Pour faire simple : ouverture au monde. Remarquons que depuis une petite dizaine d'années, l'émission de 21 heures change presque tous les ans. Est-ce une volonté, une tradition ou une suite d'hésitations ? Que cherche-t-on ?

 

Las, après avoir supprimé la météo marine, puis Et pourtant, elle tourne, de Jean-Marc Four (promu à la direction) rendez-vous des correspondants à l'étranger de la chaine publique, après avoir supprimé les simples chroniques de ces correspondants dans la matinale, M. Val vient de supprimer, pour la deuxième fois, celle de Simon Tivolle. On se souvient que le 6/7 d'Audrey Pulvar était censé remplacer Et pourtant, elle tourne. C'est un peu comme les promesses politiques qui n'engagent que ceux qui y croient. Donc les émissions pourtant gentillettes du soir, qui ne risquaient pas de faire de vagues mais qui nous permettaient de nous plonger, l'espace d'une petite heure, ailleurs que dans son petit intérieur, passent à la trappe et leurs productrices avec. D'ailleurs, quand on regarde sur le site de la radio parisienne la rubrique « Thèmes » des émission, on constate qu'au lieu d'un ordre alphabétique classique, on a une véritable hiérarchie et le « monde » est bon dernier. Tout est dit, d'autant que pour remplir la page on n'hésite pas à citer deux fois L'Afrique enchantée. Jusqu'au Rendez-vous avec X qui se trouve amputé de plus de dix minutes. Le prétexte en est la préparation des élections de 2012. On sait que, traditionnellement, les minutes ainsi perdues ne sont jamais restituées.

http://www.franceinter.fr/emissions/liste-des-emissions-par-themes

 

Pour Philippe Val, rien d'autre ne compte que la vie parisienne, ses spectacles, ses écrivains, ses expositions. On en avale à longueur de journée et il vient d'en rajouter une couche.

 

D'abord, l'indéboulonnable Kathleen Évin reste une des dernières animatrices de radio à posséder une réelle culture. Elle s'en sert pour faire une bonne émission mais qui ne se renouvelle pas depuis une dizaine d'années. À 62 ans, elle est maintenue car, étant l'épouse d'un collaborateur du « Canard Enchainé » , M. Val ni aucun autre directeur d'Inter ne peut se payer le luxe de se mette à dos l'hebdomadaire satirique. Elle le sait et en profite largement. Ainsi, lors d'une récente sortie, elle a pu affirmer tout de go qu'on s'offusque plus de la souffrance animale que du sort de ses semblables. On sait que ceux qui méprisent les animaux ne valent pas mieux envers les humains. On comprend mieux cette saillie quand on écoute la conférence de presse de rentrée et Philippe Val signaler l'émission consacrée au rapport à l'animal. Kathleen Evin signe l'émission la plus étrangère à France-Inter dans la mesure où, moins qu'une autre encore, elle ne s'intéresse à ce qui se passe ailleurs et ne cache pas sa mauvaise humeur (et non plus son Humeur vagabonde) quand elle doit céder la place à un concert. Et puis, autrefois, elle avait été une des premières à tenir un billet d'humeur afin que l'auditeur sache bien ce qu'il est convenable de penser. Depuis, elle a fait nombre d'émules qui envahissent les ondes.

 

Après une bonne émission culturelle, avec un invité unique qui commente son livre ou la pièce qu'il vient de monter ou l'émission de télévision qui va passer bientôt à l'heure où un autre animateur de France-Inter officiera, que crois-tu qu'on va entendre ?

Gagné : il y a une autre émission culturelle mais avec plusieurs invités qui vont nous parler qui de son livre, qui de la pièce qu'il vient de monter, qui du film qui vient de sortir, qui de l'émission de télévision qui va bientôt passer. Pour tenir deux heures, on a fait appel à un duo. Alexandre Héraud et Tania de Montaigne effectuent une prestation de bonne facture mais sans originalité. Ça n'apporte rien de plus que l'émission de 18 heures de Philippe Colin et Xavier Mauduit sans parler des nombreuses occasions d'informer sur l'actualité culturelle parisienne tout au long de la semaine dans les différentes émissions. Au cours de la semaine, on pourra entendre à différentes heures, les mêmes invités tenant les mêmes propos et faire leur promotion. On a déjà pu entendre Alexandre Héraut reprocher au journaliste qui présente le flash de 21 h, d'avoir rendu l'antenne avec « une minute de retard ». Il ira loin ce petit. Pensez : une minute de bavardage en moins pour cause d'actualité chargée. Heureusement qu'on profite du rire très fréquent et très communicatif de Tania de Montaigne.

 

On pouvait se lasser de Bernard Lenoir présent à l'antenne depuis vingt ans sans avoir su ou pu se renouveler et qui restait dans le style de l'inoubliable Feed back dans les années 1970. N'empêche, c'était une des rares émissions musicales de la chaine et, qui plus est, qui proposait des spectacles en direct et de très bonne qualité. À la place, on a droit à du réchauffé, à des extraits de, comme toute la journée sur Inter. Bien entendu, ça n'a même pas effleuré M. Val qu'on pourrait trouver un substitut à l'émission de Lenoir afin de tenter de conserver les auditeurs amateurs de musiques anglaises et d'en attirer de nouveaux dans le cadre d'une émission moins spécialisée. Il a dû se dire : super, deux heures de plus pour la culture. La musique, c'est pas de la culture, n'est-ce pas...

 

Dans la même ligne éditoriale, L'Atelier de Vincent Josse, monument d'anti-radio est maintenu. À l'image de ce que fait l'administration française, on persévère dans l'erreur jusqu'à dégouter et lasser le public. Car enfin, comment qualifier une émission où l'animateur s'étonne de trouver des stylos sur une table, qu'on prenne une casserole à deux mains et qui passe son temps à parler de ce qu'il voit, chose que son talent ne parvient pas à rendre en termes radiophoniques ? Seulement, Vincent Josse appartient désormais au « monde » et, à ce titre, est devenu intouchable.

 

M. Val sait (ou peut-être n'y a t-il jamais pensé) qu'il peut compter sur tous ceux qui abhorrent la publicité pour constituer une réserve d'auditeurs non négligeable. Seulement, il y a une limite à tout. D'abord, quantité de radios locales, à commencer par les France-Bleu sont exemptes de pub. Ensuite beaucoup vont redécouvrir leur collection de disques ou se mettre à fréquenter les discothèques municipales. En tout cas, ça vaudra mieux que ce supplice de Tantale permanent consistant à entendre toute la journée qu'il y a de belles expos à Paris, des pièces de théâtre sans pouvoir y accéder. On finit par y être indifférent et par se lasser : encore un truc pour les Parisiens.

 

Jamais France-Inter n'a été à ce point élitiste, gnangnan et parisienne. Il est de toute première instance que la station publique reprenne son nom d'origine, Paris-Inter. Au moins, on saurait à quoi s'en tenir. À noter aussi que les rendez-vous avec la bourse de Paris sont maintenus alors même que ça ne correspond ni à l'identité de la chaine, ni au profil sociologique de ses auditeurs. Les financiers trouvent l'information autrement mieux et plus rapidement ailleurs.

 

Enfin, rappelons que la rédaction d'Inter continue à faire son boulot plutôt mieux que les autres. On peut toujours regretter ceci ou cela et c'est souvent légitime. On déplorera encore la tendance affirmée à s'étendre sur des faits divers, à monter en épingle des non-événements (Johnny, DSK etc.), à nous imposer des flashes spéciaux quand on pourrait attendre le bulletin horaire. On attend toujours qu'on évoque, dans l'actualité, le quotidien des auditeurs qui subissent les derniers avatares de la crise. Peut-être aussi que les auditeurs d'Inter subissent moins la crise que les autres et peuvent consacrer leur cerveau aux sujets plus abstraits ? Néanmoins, ça reste tolérable (à force de résignation) et digne d'une radio payée par le cochon de contribuable.

On remarquera que la revue de presse amputée de deux minutes l'an passé pour laisser s'exprimer Audrey Pulvar ne les retrouve pas et que l'entrevue avec l'invité se poursuit désormais après avec des journalistes maison ou un contre-invité. Exit les auditeurs qui ne sont plus que trois au grand maximum à pouvoir poser des questions et le plus souvent un seul. C'est, d'ailleurs, l'autre tendance de la rentrée. Il n'y a pas que la chasse à la musique et à l'actualité internationale qui a fait des ravages mais aussi la chasse à ce qu'on appelle pompeusement « l'interactivité ». L'émission intitulée Service public est devenue une énième émission de débat entre l'animateur et des invités. L'universtaire Guillaume Erner est davantage porté à traiter de sujets de société ou culturels que de défendre les consommateurs. Les auditeurs qui avaient la parole pour témoigner de leur expérience sont réduits au minimum : là encore, deux ou trois, pas plus. Le téléphone sonne créé en 1978 par Jean Lefèvre se maintient mais on peut craindre une modification qui le viderait de sa substance (comme Service public) alors même que la formule a été reprise par les autres radios.

 

Une mention pour On n'arrête pas l'éco du samedi matin qui semble avoir trouvé enfin sa personnalité. Cette émission avait pris la place, au pied levé, de l'inoubliable Rue des Entrepreneurs de Didier Adès et Dominique Dambert. On se souvient qu'ils avaient été licenciés, le vendredi juste avant leur émission du samedi matin. Les journalistes qui s'étaient solidarisés avec des humoristes extérieurs à la station contre, notamment, leur confrère Nicolas Demorand, n'ont pas levé le petit doigt contre cette mise à la porte inique et contre la façon dont ça s'était passé.

http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/emmanuel-berretta/rue-des-entrepreneurs-la-version-d-un-journaliste-licencie-01-05-2010-450139_52.php

 

http://www.ruedesentrepreneurs.net/

 

Désormais, on entend des explications sur la situation économique, sur les rouages et aussi des propositions sérieuses. L'intervention de Bernard Maris y est pour beaucoup. Rappelons son excellente série sur La France au milieu du gué de l'été dernier. L'émission actuelle renouvelle le genre et permet de passer un bon moment instructif sans prise de tête. Ça devrait être le cas sur une radio publique pour le grand public. Zoé Varier, de son côté, n'a pas hésité à débuter la saison en donnant la parole aux « Économistes atterrés » donnant ainsi sa raison d'être au slogan de la station sur « la différence ».

Bien sûr, cette année, on va bouffer de la politique jusqu'à la nausée. Rien ne nous sera épargné et dans le lot, on trouvera surement du bon de temps en temps comme ce débat entre des jeunes militants dans l'émission de Pascale Clark. Si au moins, elle pouvait leur laisser dire ce qu'ils veulent et pas ce qu'elle voudrait entendre.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/09/07/21966103.html

 

On apprend incidemment que l'audience de France-Inter a explosé l'été dernier au point que la station est passée en tête des généralistes. Faut-il s'en étonner puisque, pour une fois, l'auditeur entendait de la vraie radio ? Ici même, nous avions exprimé notre heureuse surprise à l'écoute d'émissions intelligentes qui nous faisaient passer un bon moment. L'article a eu du succès et a suscité des commentaires positifs. Comme quoi, le public ne se trompe pas forcément. On aurait pu espérer que M. Val en tirerait des leçons mais il n'en est rien et il n'en sera jamais rien puisqu'il est et restera persuadé d'avoir raison contre tout le monde. Décidément, oui, l'été est bien fini !

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/07/28/21692017.html

 

Ce n'est pas de la nostalgie mais c'est simplement un rappel des exigences de service public.

France-Inter, il y a encore quelques années proposait des émissions de création, des dramatiques, des reportages, des chroniques variées, des sujets de société, la défense du consommateur, des chansons qu'on n'entendait nulle part ailleurs. « La différence », c'était un ton, un style, qui tranchaient avec ses concurrents, peu nombreux à l'époque. France-Inter, est devenue une station pour une petite élite parisienne qui se repait de spectacles, d'expositions, de bouquins. On a l'impression de se trouver dans un bistrot pour passer un moment tranquille et d'avoir à la table d'à-côté des gens qui parlent fort de choses qui ne nous concernent pas et d'apprendre, malgré soi, des choses qui ne nous regardent pas. La radio de service public, ne doit pas être confisquée au profit d'une poignée de Parisiens mais affirmer son exigence de qualité pour des émissions destinées à tous les publics de toutes les régions. Aujourd'hui, France-Inter, s'adresse à des auditeurs de plus de 45 ans, ayant fait des études supérieures, probablement plutôt de gauche, qui disposent d'un certain budget pour, au minimum, aller au cinéma et s'acheter des livres et habitant Paris. Et les autres ? Sans remonter à Inter-femmes d'Anne Gaillard, à Lorsque l'enfant paraît de Jacques Pradel et Françoise Dolto, à L'oreille en coin ou à Marche ou rêve de Claude Villers, on a eu, bon an, mal an, des substituts. On peut parier sans risque qu'aucune des émissions de l'ère Philippe Val n'entrera dans l'histoire de la radio.

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Commentaires
A
Ça continue<br /> <br /> Dimanche soir, Elsa Boublil reprend son émission de retour de congé de maternité. Pas un mot pour Joe Farmer qui a assuré l’intérim. C’est moi que v’la !<br /> Après tout, il était payé et n’a fait que garder la maison ; les auditeurs en l’occurrence. Il n’aurait manqué plus que ça qu’il fasse perdre des auditeurs. Vous pouvez rentrer chez vous, mon brave. Pour vos appointements, voyez avec mon comptable.<br /> <br /> Lundi matin, la rédaction renoue avec le non-événement. On se répand pendant des dizaines de minutes entre chroniques et entrevues sur la non-candidature de M. Borloo. Il n’a jamais été candidat mais sa non-candidature suscite les commentaires. A moins que ce ne soit que pour rattraper le temps de parole en retard du fait du matraquage autour des primaires au PS et de la fête de l’Humanité. <br /> <br /> Désolant
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