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la lanterne de diogène
29 décembre 2011

Faut-il brûler les journalistes ?

C'était le titre d'un livre que Claude Guillaumin, avait écrit pour occuper sa première année de retraite. Il s'insurgeait contre les accusations récurrentes portées contre sa corporation. Il était sincère car il croyait dur comme fer que lui et ses confrères s'acquittaient honnêtement de la noble tâche d'informer en toute indépendance, en toute impartialité et qu'ils détenaient la vérité du seul fait qu'ils savaient avant les autres et plus que les autres.

 

INCULTURE JOURNALISTIQUE

 

Il faut rappeler que la contestation était à son comble après l'affaire de Timisoara quand des journalistes ont sciemment fait croire qu'on avait découvert un charnier de manifestants alors qu'ils savaient qu'on avait enterré (puis déterré) des cadavres pris à la morgue afin d'achever de discréditer le pouvoir du dictateur Ceausescu. Au cours des semaines qui ont agité la Roumanie, des photos de vitres brisées voulaient faire croire à de violents affrontements. Tout ça avait été dénoncé par d'autres journalistes et la profession toute entière avait promis de ne plus recommencer, de ne plus tomber dans ces pièges. Nous étions en 1989 et, un an plus tard, lors de la première guerre contre l'Irak suite à la prise d'otages d'étrangers, on assistait à un festival de désinformation. Les journalistes sur place, les commentateurs rivalisaient d'inexactitude tant sur le plan militaire que politique ou religieux dans une région où les trois sont si importants. Pour ne prendre qu'un seul exemple, après la fin des opérations, il s'en est trouvé pour dire que le régime saoudiens allait forcément changer dans la mesure où les troupes présentes sur son territoire sacré étaient composées principalement d'infidèles. On connait la suite. En effet, le régime s'est durci, a interdit aux femmes de conduire une voiture (au grand dam de leurs maris) et a financé davantage les mouvements intégristes de par le monde. Rappelons que Ben Laden était saoudien. Belle prévision, en effet ! Pourtant, quiconque connait un tant soit peu le contexte pouvait prédire ce qui se passerait. Aucune contrition n'a suivi : une fois, ça suffit, n'est-ce pas ? Le terme même de « guerre du golfe », imposé par les journalistes, est erroné dans la mesure où de 1979 à 1989, il désignait la longue et terrible guerre déclenchée par l'Irak contre l'Iran. Comme nous n'étions pas directement concernés, on s'en fichait et seule celle à laquelle nous participions pouvait entrer dans l'Histoire avec cette formulation. Rien que cette approximation suffit à caractériser la profession de journalistes et sa propension à fausser l'information.

 

Dans un domaine plus léger, les approximations, les inexactitudes sont légion. Il s'agit du sport, sujet qui occupe une grande partie des journaux radiotélévisés. On peut y relever un véritable florilège de l'ignorance de cette corporation qui se targue d'appartenir à l'élite intellectuelle et qui façonne l'opinion publique.

 

Ainsi, à l'occasion du Tour de France, les sujet préparés sur les terroirs traversés par la course ne doivent pas faire illusion. Il ne s'agit que de mettre en avant les anecdotes plus ou moins fausses et les spécialités locales propres à attirer le touriste soucieux de varier ses loisirs. De plus en plus, on peut remarquer que ces sujets sont liés à l'économie locale et plus précisément à des entreprises locales, notamment dans le secteur de l'alimentation : vignobles, restaurants, élevages etc. Pendant près d'un mois, la profession renoue avec une pratique de la presse régionale consistant à flatter les entreprises et les élus locaux.

 

C'est probablement dans la prononciation des noms propres étrangers qu'on peut le mieux mesurer l'ignorance journalistique. Cette année, le Tour a fait une incursion dans la vallée vaudoise du Piémont italien. La ville d'arrivée était Pinerolo. Évidemment, on ne peut exiger de tous les journalistes qu'ils maitrisent la langue de Dante mais, justement, ils pourraient se renseigner. Devant la paresse proverbiale des Français quand il s'agit des langues étrangères, il existe le plus souvent des solutions qui s'appellent « traductions » ou « transpositions ». Un tout petit effort leur aurait permis de découvrir que Pinerolo se dit Pignerol en français et ce, d'autant plus que les hasards de l'Histoire ont inclus un temps la ville, devenue olympique, dans le territoire français. L'étape reliait Gap à Pignerol qui sont, comme par hasard, des villes jumelles. On aurait donc pu trouver facilement le nom français qui aurait évité cette prononciation bâtarde si éloignée de la belle langue italienne si chantante.

 

En 1996, le Tour passait à 's-Hertogenbosch. C'est illisible et c'est imprononçable pour un gosier moyen. Cette ville du Brabant du nord, au Pays-Bas, s'appelle en français Bois-le-Duc. Elle a aussi appartenu un temps à la France et, surtout, jusqu'à une époque récente, le français était utilisé par les Néerlandais pour traduire leurs noms difficiles. Que croyez-vous que firent les journalistes ? Bien entendu, ils prétendaient prononcer le nom hollandais. Encore quelques années auparavant, les mêmes journalistes nous annonçaient une nouvelle extraordinaire : un pays venait de changer de nom. Le plus extraordinaire était qu'un journal habituellement bien renseigné sur ces questions, Le Monde diplomatique, l'ignorait totalement. Il s'agissait de la Biélorussie qui serait devenue le Bélarus. En fait, ce pays c'est toujours appelé ainsi, sauf que jusqu'alors, on adaptait le nom. D'ailleurs, quand il s'agit de pays plus lointains ou dont on parle moins, les journalistes n'éprouvent pas de tels scrupules. Pour eux, le Myanmar s'appelle toujours la Birmanie, la Chine reste la Chine et non la Juonguo, l'Espagne n'est pas l'Espana, l'Allemagne n'est pas le Deutschland et ne parlons pas des pays forcés d'adopter le nom du peuple qui les occupe depuis des lustres. Imaginons qu'il faille appeler la Croatie par son nom authentique : Hrvatska !

 

C'est qu'en France, existe un snobisme de la prononciation étrangère. Pour briller ou simplement se distinguer, on cherchera la prononciation la plus improbable afin d'exclure les autres et de montrer sa supériorité. Peu importe qu'elle soit correcte. Au contraire ! C'est la singularité qui sera préférée. Qu'on se souvienne du joueur de tennis Jim Courier qu'il fallait prononcer 'kourir' pour bien montrer sa compétence. Pour une fois qu'un étranger avait un nom français. En revanche, quand il s'agit d'un hispanophone, on revient au français comme pour l'ancienne Présidente du Chili, Veronica Michelle Bachelet que personne n'appellerait 'batchélette'. Qu'un nom fasse irruption dans l'actualité et l'on observera comment, au début, on le prononce, somme toute, simplement. Au fil du temps, on entendra des tentatives de torsions jusqu'à ce qu'une prononciation s'impose. Karashi, se prononçait jusqu'à présent, aussi simplement que le suggère la transcription anglaise (à l'exception du 'r' toujours problématique dans toutes les langues). Seulement, pour se distinguer, on prononce désormais 'karatchi' contrairement à ce que la transcription anglaise impose.

 

Il faut dire aussi que ces dernières années, l'adoption de transcriptions anglaises a compliqué la tâche. Comme la plupart des langues d'Europe occidentale, l'anglais doit recourir à des combinaisons de lettres pour rendre des sons qui n'existent pas à l'origine. Or, ces combinaisons ne font pas l'objet de lectures similaires dans les autres langues. Mao Tsé Toung est devenu Mao Zedong. Là encore, il existe des esprits peu renseignés pour prétendre qu'il a changé de nom. C'est cette même transcription anglaise qui nous fait écrire Changaï avec un S et non un C comme l'exige la phonétique française. Les journalistes avalisent systématiquement les transcriptions anglaises et imposent également les termes anglais ou à vague consonance anglaise.

 

Tout ça ne serait pas trop grave et tout juste un peu agaçant. Seulement, les journalistes, bien plus que les enseignants, exercent de fait une fonction d'instituteurs. Ce sont eux qu'on écoute et qui instituent les prononciations et, d'une façon plus générale les connaissances qu'il est de bon ton de posséder. Ce sont eux qui font l'information. Ça pourrait passer s'ils possédaient le minimum de culture et d'exigence intellectuelle pour accomplir une mission dont ils ne sont pas peu fiers bien qu'ils s'en défendent. À travers cette occurrence qui s'impose de temps en temps, à l'occasion d'événements sportifs généralement (une des rares occasions de parler de l'étranger dans les médias avec les guerres), on mesure bien à la fois l'influence des journalistes et des médias en général et ce que nous appelons ici l'inculture. Ce n'est surement pas un hasard non plus si quelqu'un comme Laurent Ruquier, un an ou deux après la création d'Arte faisait rire ses auditeurs en disant : « Vous avez déjà regardé les informations sur Arte ? Hein ? On y parle de guerres dans des pays dont on n'a jamais entendu parler. »

Nous avons déjà interpelé sur ce sujet dans la mesure où l'appauvrissement intellectuel est source de conflits.

 

Le même Laurent Ruquier se trouve depuis des années en position de relais de la bien pensance. Ainsi, cette saison, il a engagé deux chroniqueuses plutôt que les barbons habituels. L'une d'elle est Audrey Pulvar à qui l'on demande son avis comme s'il devait définir la ligne de pensée à adopter. Or, cette exposition la place au centre de polémiques que sa situation de journaliste sympathique ne prédisposait pas.

 

LE CAS PULVAR

 

Seulement Audrey Pulvar se trouve dans une position très particulière. Elle partage la vie d'un des futurs maitres de la France. Il serait maladroit de lui faire des reproches comme à n'importe quel autre de ses confrères. On ne sait jamais, elle pourrait se voir promue ou amie avec un patron influent.

 

C'est lui accorder une importance que ses seules qualités professionnelles ne lui donnent pas, si l'on en croit

http://anyhow-anyhow.blogspot.com/2011/06/limposture-audrey-pulvar.html

 

Audrey Pulvar apparaît comme le pur produit des médias actuels. Sortie d'une école de journalisme, que l'auteur place après celle de Lille où les grands noms ont étudié, son physique agréable et la couleur de sa peau l'ont mise là où d'autres rament des années avant de trouver leur place. Notons que d'autres avant elles ont bénéficié d'un concours de circonstances favorables et ont occupé des postes encore plus prestigieux. Gageons que tel sera son sort également. On devine que cette école de journalistes a formé ceux qui rivalisent dans l'inculture et n'hésitent pas à se ridiculiser, certains qu'ils sont que, premièrement, bien peu relèveront leurs erreurs et, surtout, que deuxièmement, ils détiennent le pouvoir d'informer, de donner la parole à qui ils veulent et donc, certainement pas à ceux qui les critiquent. Quant à ceux qui s'y risquent, ils sont vilipendés in petto, coupables d'attenter à la liberté de la presse et à l'indépendance des journalistes ; ce qui est un comble, un de plus. Depuis une petite vingtaine d'années, on peut observer un certain formatage consistant, à l'écrit, à faire des phrases sans verbes, sans doute pour provoquer un effet ou mettre en relief un propos. À l'oral, on note cette habitude de détacher les deux ou trois derniers mots d'un reportage ou d'une chronique pour laisser l'auditeur dans l'expectative et apporter une note dramatique à un propos souvent banal. L'usage de mots anglais ou prétendument tels, comme « outing » (qu'on retrouve dans le papier de Raphaëlle Baqué) est monnaie courante. Dans tous ces cas, il s'agit de rendre sensationnel au détriment de la rigueur.

http://www.lemonde.fr/m/article/2011/12/02/audrey-pulvar-idylle-a-la-ville-soupconnee-dans-les-medias_1611712_1575563.html

 

Audrey Pulvar a bénéficié d'un succès de curiosité qui ne s'est pas démenti. À l'heure où le Président de la République revendique son inculture, où il a été élu par une génération pour qui la culture et même l'instruction ne représentent pas des valeurs actuelles, il est bien évident que ce n'est pas l'expérience, ni même ce plus que constitue la culture ou la connaissance qui va être pris en compte au moment du recrutement.

 

Une simple validation d'acquis vaut pour l'aptitude. On veillera juste à ce que le candidat ait été façonné dans le même moule pour éviter toute remise en cause du système ; médiatique en l'occurrence. Qu'importe, donc, que Mme Pulvar n'ait pas gagné de concours de reportage, doublé d'études journalistiques comme M. Poivre d'Arvor en son temps. Qu'importe qu'elle n'ait pas sauté d'hélicoptère pour réaliser un grand reportage ou qu'elle n'ait pas obtenu une entrevue exclusive avec une personnalité mondiale. Qu'importe qu'elle n'ait pas rongé son frein comme localière dans le quotidien de sa région. Qu'importe qu'elle n'ait jamais poireauté devant un ministère ou une permanence d'élu ni qu'elle n'ait jamais rencontré de gens ordinaires, « sur le terrain » comme on dit. Qu'importe qu'elle ne soit jamais allé interroger des ouvriers occupant leur usine ou des locataires sur le point d'être expulsés. Qu'importe qu'elle ne sache, finalement, que ré-écrire les dépêches à la sauce de l'organe qui l'emploie. Ce qu'elle fait, elle le fait bien et, surtout, elle le présente bien.

 

Dans un monde de marques, où les marques s'affichent partout, où l'on porte l'étiquette des marques de vêtement à l'extérieur avec arrogance, dans un monde où une citation de Desproges suffit à ébaubir son auditoire, où le vernis importe plus que l'objet qu'il recouvre, des journalistes qui se mettent en avant plutôt que leur travail, qui instrumentalisent leurs prestations, ont plus de chance d'y arriver.

 

FEMME ET JOURNALISTE

 

Mme Jacqueline Baudrier a été l'une des premières femmes à exercer le métier de journaliste et, qui plus est, dans l'audio-visuel encore hésitant. Elle a accepté de présenter les bulletins d'information pendant la nuit, sur Inter, et a gravi les échelons à la force du poignet tout en affrontant la misogynie proverbiale de ce milieu. On peut, d'ailleurs, penser qu'on l'obligeait à travailler de nuit pour la décourager en tant que femme. Elle a connu la consécration en devenant la première PDG de Radio-France en 1975 et la première femme à occuper de telles responsabilités après avoir été directrice d'une chaîne de télévision à l'ORTF. À ce poste, elle a promu, puisque c'était dans l'air du temps, d'autres femmes qui étaient loin d'avoir accompli ne serait-ce qu'une partie de son parcours à elle.

 

Des années plus tard, une Christine Ockrent, qui a payé de sa personne en réalisant des grands reportages dans des zones à risques, a surtout fait parler d'elle lorsqu'elle s'est imposée comme présentatrice du journal d'Antenne 2. Partout, on dit qu'elle a été la première femme à avoir présenté le journal télévisé. Hélène Vida qui officiait à la même heure et dans le même fauteuil en 1977 a disparu des annales, Betty Durot également.

Francine Buchi qui présentait le journal de FR 3, diffusé plus tardivement n'a bénéficié d'aucune notoriété. Tant que Marie-Laure Augry présentait les brèves du journal de 13 heures, on ne la connaissait pas. Du jour où elle a pris place à côté d'Yves Mourousi, sa reconnaissance médiatique a été assurée quand tout ce qu'elle avait fait avant demeurait ignoré.

 

On peut en conclure que le public plébiscite des personnes qui passent à la maison aux heures où l'on est le mieux disposé, mais aussi qu'une personnalité hautaine qui sait manipuler ses confères et impressionner ses supérieurs s'impose là où le travail bien fait mais discret n'est même pas regardé et aussitôt oublié.

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/07/10/21579281.html

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/07/10/18547409.html

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/09/05/18984414.html

 

On passe un bon moment, le matin, avec Audrey Pulvar. Ce n'est pas sensationnel mais c'est agréable pour commencer la journée. Reste qu'on peut toujours se demander si ça valait la peine d'embaucher une vedette de la télévision pour une petite heure de radio dans une tranche d'information. Audrey Pulvar, malgré sa notoriété, sa popularité, n'est même pas rédactrice en chef de sa session, au contraire de Patrick Cohen. Ça donne raison à Anyhow qui remarque que sa consœur ne sait que relire les dépêches d'agence. En l'occurrence, elle annonce les chroniqueurs, les journaux parlés et nous impose son point de vue sur l'actualité après sa prise d'antenne.

 

NOUVELLE GÉNÉRATION

 

Elle appartient à cette génération de journalistes peu cultivés, à l'expression approximative, qui maitrisent parfaitement les nouvelles technologies et truffent leur propos de mots à consonance anglaise. Dans ce genre, elle n'est pas la pire. Ils connaissent très bien le milieu politique avec lequel ils entretiennent des relations endogamiques. Ils méconnaissent l'Histoire et la géographie, ignorent avec morgue leurs prédécesseurs. Ils privilégient les faits divers, refusent d'approfondir les sujets traités. Ils perdent du temps dans des illustrations redondantes en partant du principe que l'auditeur ne peut pas comprendre sans un petit reportage alors qu'il vit la même réalité. Ils traitent de la vie privée de personnalités comme si le sort du monde en dépendait et investissent dans une débauche de moyens digne de l'actualité internationale la plus prenante. Allusion notamment aux affaires DSK, Bettencourt et, plus anciennement à la mort de Rainier.

 

Le résultat, nous le vivons chaque jour. Ces journalistes, tout à fait à l'aise dans un monde qui leur a permis de parvenir avec un minimum de moyens à des postes d'influence où ils sont exposés, diffusent une information insipide et présentent une actualité culturelle consternante. Le moindre acte de création, la moindre signature est monté en épingle. Ils louvoient, selon les circonstances entre un sarkozisme de bon aloi et une social-démocratie en peau de lapin. Certes, ils ne leur viendrait pas à l'idée de prendre leurs conseils en téléphonant à l'Élysée comme c'était le cas autrefois mais leur formatage, dès l'école de journalisme, constitue la garantie qu'il n'y aura pas de vague ni de dénonciation de dérives sauf lorsqu'on ne peut plus faire autrement ou que le coupable se trouve déjà dans l'ambulance. De plus, ce complexe de supériorité qu'ils éprouvent en pensant à leurs prédécesseurs leur fait croire qu'ils sont réellement indépendants alors qu'ils sont tout autant soumis mais davantage au pouvoir économique et toujours à celui de personnalités locales.

 

On pourrait s'en lamenter, répéter que c'était mieux avant. Avant quoi, au fait ? On pourrait hurler avec les soixante-huitards que « la police nous parle tous les soirs à 20 heures ». Au fait, nombre d'entre eux occupent aujourd'hui des postes de chargés de communication des grandes entreprises internationales ou ont fini une carrière de pantouflard dans un cabinet ministériel. On pourrait reprendre l'antienne selon laquelle les médias audiovisuels sont entre les mains du pouvoir en place ou de grandes entreprises dont curieusement des marchands d'armes.

 

Seulement, ce qui nous apparaît plus grave encore, c'est que ce sentiment confus que l'information est manipulée, incite nombre d'entre nous à chercher l'information ailleurs. Ailleurs, c'est toute cette blogosphère qui contient le meilleur et surtout le pire, comme tout ce que l'humain produit. Le pire, ce sont ces blogs qui dissèquent l'actualité, soulèvent les pansements, prétendent dénoncer et qui se trouvent entre les mains de journalistes frustrés, de grincheux ou de fanatiques en tous genre. Ce sentiment qu'on nous cache tout, nous encourage à croire n'importe quelle rumeur qui va à contre-courant, nous donne l'illusion d'avoir accès à des secrets d'État. Là, se mélangent l'impression qu'on nous cache encore plus et l'excitation de connaître ce que seuls quelques initiés savent. On se croit plus intelligent du seul fait de trouver des informations qui ne passent pas dans l'audio-visuel et parce qu'on conteste tout. Chacun de nous se croit savant, se croit critique théâtral, se croit analyste politique, se croit diplomate averti et, surtout, se croit détenteur de la vérité et de la morale universelle. Chacun de nous se fait fort d'avoir un avis sur tout et considère l'avis de n'importe qui comme l'égal de tous les autres. Allusion aux propos tenus par des vedettes du spectacle ou du sport dont on n'attend pourtant pas une opinion argumentée.

 

 

Maintenant, pour répondre plus précisément à la question de Claude Guillaumin, il n'est pas question de les brûler ni même de brûler leurs écrits ; quand ils écrivent encore. Au contraire, tout le monde tombera d'accord pour défendre la presse et les journalistes partout. Il faut qu'ils puissent avoir accès aux informations et les diffuser. Seulement, comme tout droit, celui d'informer s'accompagne de devoirs. Le premier d'entre eux consiste à être irréprochable quant aux connaissances de bases qui vont servir à présenter un sujet. La maitrise parfaite de l'anglais et d'au moins une autre langue étrangère est un minimum aujourd'hui. Évidemment, l'expression française doit être impeccable, ce qui va de soi avec une bonne expression en langue étrangère. Ensuite, pour la plupart des sujets (politique intérieure et extérieure, sports, économie, vie culturelle), la connaissance de l'Histoire est indispensable et pas seulement de vagues notions qui se limitent à des noms et quelques dates. De plus en plus, la connaissance des religions s'avère nécessaire tant ces questions prennent de l'ampleur dans la plupart des conflits actuels. Curieusement, la géographie s'avère moins indispensable dans la mesure où les moyens actuels renseignent rapidement sur la situation d'un pays. La géopolitique est plus importante mais s'acquiert au long d'une carrière professionnelle. Ça paraît beaucoup mais c'est tout de même le minimum à exiger de la part de personnes qui s'immiscent chez nous et nous dispensent leurs informations. Ils sont bien payés pour la plupart et ceux qu'on connait le sont plus encore. Ce salaire doit récompenser des compétences et pas seulement la souplesse de l'échine et l'arrogance. Pour reprendre la comparaison avec l'instituteur, on s'attend au moins à ce qu'un enseignant maitrise parfaitement son sujet ainsi que la langue dans laquelle il enseigne. Compte tenu de l'influence primordiale des médias sur les plus jeunes, il paraît tout à fait nécessaire qu'ils ne disent pas n'importe quoi. Ensuite, tout comme les professeurs à partir du second degré, chacun pourra se spécialiser mais le socle commun de connaissances, pour considérable qu'il paraît, doit être celui-là. Le public ne peut pas tout connaître. C'est pour ça qu'il existe des journalistes et l'on a besoin de pouvoir leur faire confiance. Sinon, si la suspicion s'instaure, on en revient à la rumeur et à son corollaire, la calomnie. À partir du moment où tout se vaut, où l'émotion de chroniqueurs vaut l'argumentation des spécialistes, où le besoin de faire un coup médiatique pour exister et se faire connaître l'emporte sur toute autre considération, nous touchons les limites du pouvoir d'informer pour atteindre la manipulation mentale.

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