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la lanterne de diogène
7 novembre 2012

Obama Obamania Obamédia

D'abord, pousser un « ouf ! » de soulagement. Non parce qu'on approuve l'essentiel de la politique du Parti Démocrate qui suit une ligne libérale (au sens où nous l'entendons ici) plus ou moins mâtinée de social. Son adversaire aurait mené une politique dangereuse pour le monde entier ainsi qu'il en était question et à la suite de la politique menée par le clan Bush dans les années 1980 avec Reagan d'abord puis avec Bush père et fils. Il n'est que de voir les conséquences de l'intervention en Irak dont nous payons tous le prix au quotidien.

 

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Tout a été dit avant, pendant et juste après sur l'élection de M. Obama. Maintenant, il nous paraît intéressant de voir comment les élections ont été traitées par les médias audiovisuels. Je ne sais pas ce qui s'est passé à la télévision mais je constate que les grandes radios ont toutes réalisé des émissions en direct des États-Unis et généralement de New York. Pour quoi faire ?

 

Depuis des mois, on dissèque la moindre information en provenance des États-Unis, le moindre mot de travers donne lieu à des commentaires, repris, contredits. On nous prédisait, malgré les promesses non-tenues, la réélection facile de M. Obama. Et puis, nous avons eu ce premier débat télévisé raté par le Président et qui a vu remonter son adversaire. Au fur et à mesure qu'on se rapprochait de l'échéance, les analyses, les commentaires se sont multipliés. On a rappelé le mode de scrutin, toujours parfaitement incompréhensible pour un esprit latin. La gauche française a revendiqué sa parenté avec le Parti Démocrate. Pas sûr que la réciproque soit évidente car, contrairement à ce qu'on dit depuis plusieurs années ici, ce n'est pas un parti de gauche mais un parti centriste et plus démocrate-social que social-démocrate, ce qu'il n'est absolument pas. À partir du moment où tant de soi-disant spécialistes se trompent sur ce point, il est permis de douter du reste de leurs analyses.

 

Ces derniers jours, les radios multipliaient la promotion interne pour « la nuit américaine » en direct depuis New-York, « au cœur de l'événement ». Les unes disposaient d'un studio qui donnait sur Central Park, les autres sur Time Square. Ils ont évité d'avoir une fenêtre sur la statue de la Liberté. Pour le coup, ça aurait trop fait cliché. Ils auraient dû s'installer Wall-Street pour être plus près encore de la réalité. Curieux tout de même qu'elles ne se soient pas installé à Washington où se trouve le siège de la Présidence. Sinon, pourquoi ne pas avoir posé les micros à San Francisco ou à Kansas City, pour faire couleur locale ? C'est à croire que tous ces journalistes avaient envie de revoir les amis qu'ils se sont faits au cours de leurs voyages lorsqu'ils ciraient les bancs de Science-Po.

 

Les derniers temps, on a ressassé les promesses non-tenues de l'un, l'appartenance à « l’Église des saints des derniers jours » de l'autre. Pensez : un mormon à la Maison Blanche ! Impensable ici. Quelle horreur ! Un membre de secte. « Ils sont polygame », « Ils baptisent les morts » etc. Tous les clichés habituels sur ce qu'on ne connait pas et qu'on a du mal à comprendre. Curieux pour un pays qui revendique sa laïcité, garante du droit pour tous à pratiquer ou non un culte, que d'entendre autant d'intolérance envers une religion. C'est la laïcité à géométrie variable. On comprend que dans la plupart des pays du monde, la notion de laïcité soit simplement incompréhensible.

 

Et puis, il y eut un jour, il y eut un soir : mardi soir. Ça chauffe ! Pas un journal parlé, pas un flash d'information sans un coup de fil au correspondant permanent à New York, qu'on est prié de surnommer « la pomme ». Alors ? Avez-vous des informations de dernière minute ? Comment ont-ils voté ? Combien de délégués ? Et l'Iowa ? N'oubliez pas le Massachusetts et la Virginie ! De l'ouest ou du sud ? Quelle est la tendance ? Un pronostic ? Et si c'est Romney ?

Déjà, dans ces derniers jours, on a commencé à se familiariser avec les experts qui vont intervenir au cours de « la nuit américaine ». On imagine les différentes chaînes de radio françaises rivalisant d'astuces, de passe-droits, de trucs, de relations plus ou moins occultes, pour trouver les rares experts étatsuniens vivant à New York et parlant français. Qu'est-ce qui est le plus important, d'ailleurs, apporter une bonne analyse de l'élection ou parler français ? Bien sûr, nous avons eu droit, au Français, qui était souvent une Française, qui partage sa vie depuis des lustres avec un citoyen étatsunien et dont le conjoint vote, qui pour les Républicains, qui pour les Démocrates. On en rajoute une couche. Les plateaux se multiplient. L'heure fatidique approche. On rappelle « la nuit américaine » avec plein de chanteurs de seconde catégorie : les vedettes ne vont pas venir chanter pour une radio française dans une émission qui va passer en pleine nuit. Les animateurs, eux, savent tout sur ces artistes que personne ne connait par ici et sans doute pas beaucoup plus là-bas. Ils nous disent qu'ils ont adoré leur précédente œuvre et que la toute nouvelle ou celle qui est en préparation devrait être encore meilleure.

Rappelons que la « nuit américaine » est une technique cinématographique consistant à filmer en plein jour mais en faisant croire au spectateur que la scène se passe la nuit. « Faire croire » semblait bien le mot d'ordre des rédactions radiophoniques en la circonstance.

 

Après « la nuit américaine » pour les Français, « la nuit américaine » pour les journalistes présents là-bas puisqu'il est 1 heure du matin à New York. Maintenant, ils connaissent le résultat. Ils ne cachent pas leur joie. Entre deux publicités ou deux bulletins météo, ils organisent encore des débats. On retrouve les voix qui nous ont tenu compagnie au cours de ces derniers jours, des dernières heures. Et ça recommence. Ils nous épargnent le « je vous l'avais bien dit ». En revanche, ils redisent tout ce qu'ils nous ont dit et redit depuis des semaines. Si on ne le sait pas. Et comment il va gouverner avec la Chambre des Représentants hostile. Est-ce qu'il va tenir ses promesse ? Et si Romney avait été élu ? Et l'Europe ? Et la crise ? Et si … ? Un débat se termine. On retourne à Paris pour les informations. Le titre principal : Obama est réélu, on retrouve notre correspondant permanent. On n'a pas le temps de traiter tous les sujets annoncés qu'on repart à New York. Nouveau débat, nouveaux experts. Ils disent l'inverse des précédents. Finalement, nous sommes comme Bouvard et Pécuchet : avides de connaissances mais incapables de faire la synthèse.

 

Une remarque tout de même. Inter est fier de proclamer son partenariat avec l'Huffington Post. La semaine dernière, l’inénarrable Pascale Clark avait reçu Mme Anne Sinclair* pour présenter, et l'élection étatsunienne et la collaboration entre les deux rédactions. Toute cette semaine, (celle de l'élection), Inter répète son partenariat avec l'Huffington Post et reçoit Mme Arianna Huffington. Et Anne Sinclair qui animait une émission sur Inter avant de suivre son mari à New York pour son travail ? Eh bien, elle apporte son expertise à la rédaction d'Europe 1, sans doute en souvenir de ses débuts de journaliste quand elle était jeune stagiaire dans l'alors prestigieuse rédaction de la rue François-1er.

 

Pendant ce temps, les Newyorkais écopent, tachent de sauver ce qui peut l'être après le passage de l'ouragan Sandy. Quant aux Haïtiens, également touchés par l'ouragan, ils ont tout perdu, une fois de plus, et ne savent pas forcément qu'un mulâtre, comme nombre d'entre eux, a été réélu à la Maison Blanche. Les radios françaises n'en parlent pas.

 

*Anne Sinclair, amie d'Arianna Huffington, est directrice de la rédaction française de l'Huffington Post.

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Commentaires
L
Il me semble qu'il y a toujours eu une intérêt, une fascination pour ce qui se passe en Amérique et singulièrement aux Etats-Unis, pays où tout semble possible. <br /> <br /> http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2006/04/30/1790882.html<br /> <br /> <br /> <br /> L'abondance, l'avance technologique et matérielle ont fortement impressionné toute une génération qui a vu les GIs se montrer forts et généreux pour libérer l'Europe du nazisme. <br /> <br /> Donc tout ce qui vient de là-bas semble mieux, surtout quand il y a innovation. Or, l'élection d'un mulâtre à la Présidence est une première. À l'heure où l'on nous rebat les oreilles avec le multiculturalisme, la France métis etc., à l'heure où la France connait une montée du communautarisme, à l'instar des États-Unis, on se prend à rêver d'un Président avec une peau moins blanche que les autochtones. On oublie, esclavage oblige, que les Noirs sont présents et en nombre, depuis bien longtemps sur ce qui deviendra les États-Unis et ont précédé la plupart des vagues d'immigration. On oublie aussi qu'il y a un peu plus de quarante ans, ici – quand les générations actuelles n'étaient pas nées ou à peine – que le deuxième personnage de l’État était un Noir. Le Président du Sénat était Gaston Monnerville et que, à quelques mois près, il aurait pu assurer l'intérim après la démission du Général De Gaulle. Un Noir à l’Élysée en 1969...<br /> <br /> <br /> <br /> Ensuite, dire que le Parti Démocrate des États-Unis est un parti de gauche, en dit long sur la perception de la gauche par ici. Finalement, ces 90% qui voteraient Obama ici, sont à peu de choses près, les 90% qui n'ont pas voté pour les candidats de gauche à la dernière présidentielle. Étant entendu le PS qui a soutenu un candidat n'est pas vraiment un parti de gauche comme le montrent les décisions récentes. Le PS est plutôt un parti de centre-gauche et c'est parfaitement son droit ; mais qu'il le dise franchement.<br /> <br /> <br /> <br /> Les Français, envoutés par le Pdt Obama, montre le vrai visage de notre société. Ils plébiscitent un type qui passe bien à la télévision et dont ils ne savent rien de sa politique. Surtout, ça ne les intéresse pas. C'est son image qu'ils adorent et, peut-être qu'une partie du dédain des Français pour la politique vient de là. Il manque, ici, une figure charismatique capable de mobiliser. Le contenu importe peu, c'est pas cool...
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C
Ce qui est très amusant dans cette histoire c'est l'intérêt, la ferveur presque, que portent les Français à propos de cette élection. 90 % des Français souhaitaient la victoire d'Obama. Pourtant, comme tu le rappelles, on présente le Président Américain pour un homme de gauche, ce qu'il n'est pas. Alors quoi, la France serait un pays où 90 % des gens sont de gauche ? Non bien sûr. Mais en fait les Français ne savent rien de la politique américaine, et ne comprennent même pas comment ça fonctionne. Oui mais voilà Obama est une rockstar politique. Il est cool, jeune (pour une personnalité de cette stature), sa femme est jolie et très élégante, il est Noir dans un pays présenté comme raciste, bref tout pour bien passer à la télé.<br /> <br /> Quelle est son action depuis 4 ans, quels sont ses projets ? Très peu de monde ici, et moi le premier, serait capable de le dire. <br /> <br /> Mais il est tellement cool Barack !
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