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la lanterne de diogène
11 juillet 2013

Irak : le football à l'honneur

On apprend incidemment que les Bleuets (surnom donné depuis 1998 aux espoirs par analogie avec les Bleus qui venaient de remporter la Coupe du Monde) viennent de se qualifier pour la finale du Mondial U20, autrement dit des joueurs de moins de 20 ans, les futures vedettes du foot mondial.

http://www.lemonde.fr/sport/article/2013/07/10/mondial-u20-la-france-en-finale_3445766_3242.html

 

Très bien mais c'est un peu court, jeune-homme. Il faut préciser qu'ils se sont qualifiés en battant le Ghana, ce qui confirme que les nations africaines occuperont, dans les années à venir, presque sans moyens, les premiers rôles dans les plus grandes compétitions.

 

Cependant, ce n'est pas là le plus important. Les Bleuets vont rencontrer leurs homologues de l'Uruguay qui ont battu l'Irak...

Oui, l'Irak, ravagé par les attentats, l'instabilité, qui peine à se reconstruire après les traumatismes de ces vingt dernières années, trouve le moyen d'aligner une équipe de tout jeunes et d'arriver en demi-finale, peut-être même à la 3ième place.

 

Or, personne ne parle de cet exploit. On évoque à peine celui des Bleuets (et encore seulement parce que c'est une sélection nationale) à plus forte raison celui d'ados à peine velus qui tirent toute l'année dans des boites de conserves pour s'entrainer. Aucun intérêt commercial. Aucun intérêt tout court puisqu'on n'en connait aucun.

 

Il y a là un problème de journalisme. Les « sportifs » ne s'intéressent qu'à la compétition. Peu leur importe le pays, les difficultés d'une équipe. Ils se focalisent sur ce qui, d'après eux, va attirer leur public. Les p'tits Noirs et les p'tits Arabes ne sont que menu fretin. S'ils étaient dans la sélection française, on exulterait sur le thème de « la France métissée » ainsi que l'avait fait Le Monde au lendemain de la victoire des Bleus en 1998. On nous rebattrait les oreilles avec les clichés les plus éculés sur le formidable potentiel de la banlieue. Pourtant, on sait que le public français éprouve une sympathie spontanée et naturelle pour les équipes africaines : Ghana lors du dernier Mondial, Sénégal en 2002, Nigéria, Cameroun et Roger Milla et Thomas N'Knono, il y a un peu plus longtemps. Aucune importance, ce ne sont pas des équipes qui rapportent, qui font vendre. Alors, les pays en guerre...

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/07/03/18490258.html

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2006/07/15/2297994.html

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2006/05/11/1857337.html

 

Il y a de nombreux précédents. La rencontre Turquie-Arménie n'a pas suscité plus de commentaires. Pour les journalistes « sportifs », c'était une sorte de derby, avec la rivalité habituelle des derbys mais sans véritable enjeu pour la compétition. Aucune des deux équipe n'ayant une quelconque importance.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2008/09/06/10486456.html

 

Il y a eu, en 1998 (pas certain) une rencontre Iran- États-Unis. Pas de quoi fouetter un chat entre deux équipes qualifiées pour la Coupe dans des poules faibles. Pourtant, quand on connait le contentieux diplomatique qui perdure depuis près de 40 ans, on aurait dû faire passer ça au premier plan et montrer que les valeurs sportives permettent de s'affronter amicalement et même de fraterniser. D'ailleurs, avant le début de la rencontre. Les deux équipes ont posé ensemble, joueurs mélangés, se tenant par les épaules, tout sourires après avoir échangé des cadeaux. Ce n'était tout de même pas anodin. Eh bien, on n'a parlé que du score et échafaudé des conjectures sur les chances de leurs futurs adversaires de les battre et de se qualifier pour le tour suivant. Navrant !

 

Les journalistes « généralistes » ou « diplomatiques », pourraient signer des analyses intéressantes. Seulement, comme ça vient du foot, ils n'ont que mépris et un match ne vaudra jamais des affrontements armés, des émeutes, de nature à mobiliser leurs connaissances. « Connaissances » étant inapproprié quand on se souvient de leur nullité lors de la couverture de la guerre contre l'Irak (on y revient) de 1991. Vis à vis de jeunes d'une couleur de peau autre que blanche, on ne s'y intéresse que lorsqu'ils sont victimes. S'ils réussissent, surtout sur le plan sportif, il n'y a pas de quoi en parler.

 

Il y a eu d'autres occurrences montrant que les joueurs et même les supporteurs pouvaient s'affronter sportivement, même au football, où le public n'est pas réputé pour son esprit sportif et sa courtoisie.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2009/11/28/15916847.html

 

En attendant, ayons une pensée pour ces jeunes irakiens dont on devine qu'ils se sont entrainés dans des conditions difficiles. On imagine les terrains sans pelouse, les chaussures de mauvaise qualité, l'alimentation dépendante des approvisionnements. En plus, ce n'est pas l'équipe première mais seulement des « chebs ».

 

Alors, faisons un rêve, avec ces jeunes d'Irak. Rêvons d'un Moyen-Orient apaisé avec une jeunesse qui a à cœur de prendre une revanche sur la vie et pas sur leurs voisins qu'ils ne rencontreront plus que sur des terrains sportifs et fraternellement. Et n'oublions pas non plus le Ghana, pas mieux loti pour les équipements sportifs. La finale du Mondial U20 aura lieu dimanche (ou samedi). La France a sa chance face aux jeunes Uruguayens qui n'oublieront pas que le Président d'un pays voisin, la Bolivie, a été détourné par la France, récemment. Bien sûr, les jeunes n'y sont pour rien et souhaitons juste qu'ils soient encore assez purs pour ne jouer qu'au football.

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Commentaires
C
Je ne peux que te conseiller, à moins que tu ne le connaisses déjà, le site "Les Cahiers du Football", qui parfois publie des articles "culturels" sur le foot. J'ai notamment en mémoire un article sur l'équipe nationale du Sud-Soudan. En règle général, ce site a un autre regard sur ce sport que la majeur partie des médias traitant le foot. On y parle jeu bien sûr, mais aussi économie, traitement médiatique, histoire, culture, mais sans oublier de ne pas se prendre trop au sérieux car finalement le foot est avant tout un sport, un jeu.
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