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la lanterne de diogène
14 juillet 2013

Jacques Kessler

Nous savons déjà depuis quelques mois que M. Jacques Kessler, le météorologiste d'Inter prend sa retraite ce 14 juillet. Il aura fallu toutes ces années pour apprendre qu'il officie depuis des bureaux de Météo-France situés dans l'aéroport de Marignane, près de Marseille. Jacques Kessler s'exprime avec un accent du sud malgré un nom qui ne l'est pas. Il apporte un peu de soleil aux habitants des contrées septentrionales de l'hexagone.

 

La météo occupe une place démesurée à la radio puis à la télévision. Sans doute, l'émotion qu'elle suscite en est la cause. On aime entendre qu'il va faire beau le jour où l'on va se retrouver en famille ou avec ceux qu'on aime. Surtout, on aime encore plus entendre qu'il va faire mauvais pour entretenir sa mauvaise humeur et y trouver une justification scientifique. La météo n'est pas une science exacte. Elle se trompe mais pas aussi souvent qu'on le croit. Qu'importe, on aime râler quand on assure avoir entendu qu'il ferait beau et « qu'ils se sont encore trompés ». La mesure est à son comble car on connait les moyens considérables mobilisés pour prévoir le temps. « Ils se sont encore trompés » ! On n'est pas loin d'en tenir le Gouvernement pour responsable. En tout cas, la météo sert souvent d'exutoire à la mauvaise humeur contre la politique. La météo représente l'État. C'est un service public. On ne se souvient pas du temps où un speaker annonçait : « Voici le bulletin de la météorologie nationale » mais on sait que le service relève de l'État. On n'est pas loin de lui en attribuer les qualités et, surtout, les défauts et d'y transférer nos fantasmes. « Ils nous mentent », « On nous cache la vérité ». En disant « Ils se sont trompés », on pense « ils nous ont trompés ».

Il faut dire que l'affaire du nuage de Tchernobyl a relancé les délires. C'est sûr qu'on nous manipule et qu'on ne nous dit pas tout. La moindre erreur (réelle ou supposée) dans un contexte particulier, sera interprétée comme une volonté délibérée de tromper l'opinion. Pour peu que le Gouvernement ne corresponde pas à nos attentes, on chargera la météo de notre rancœur quotidienne.

 

Sur Inter, les prévisionnistes sont des ingénieurs, au contraire de ceux des radios commerciales et de la télévision. On se rappelle Albert Simon, décédé ces jours-ci, qui, avec sa voix cassée, disait souvent des énormités mais demeurait très populaire. Il me souvient que, en 1978, pendant l'hiver, il prévoyait le temps qu'il ferait à Paris, arrondissement par arrondissement. À la télévision, le chroniqueur littéraire Alain Gillot-Pétré, passionné de cyclones qu'il avait observés aux Antilles où il avait passé son enfance, a révolutionné la présentation. Il a fait oublier les « Monsieur Météo » d'autrefois, comme Guy Larivière ou Michel Martin, pourtant, eux aussi, ingénieurs. La météo, surtout à la télévision, est un divertissement à part entière, encore plus s'il est accompagné d'un petit reportage original. Au divertissement, s'ajoute une grande part de passion, tout comme l'horoscope. À la différence de l'astrologie, la météorologie s'impose à tous, qu'on y croit ou pas.

 

Autre témoignage de l'importance démesurée et passionnelle que suscite la météo : il y a quelques semaines, un vendredi, M. Bruno Duvic qui présentait la matinale d'Inter en a profité pour annoncer à l'animatrice suivante, Mme Stéphanie Duncan, que Jacques Kessler serait remplacé par une femme à la rentrée. Il croyait faire plaisir à l'historienne qui produit une émission féministe hebdomadaire. Las, la nouvelle a fort courroucé la dame, au contraire. Comment, une femme pour la météo ? Mais ce n'est pas assez valorisant ! C'est assez bon pour un homme, apparemment, mais pas pour une femme. Comme tous les producteurs d'Inter (ou presque), elle ignore tout de ce qui se passe à Radio-France en dehors de ce qu'elle y fait. Par conséquent, elle ne sait pas que la météo sur la radio de service public (comme on dit aujourd'hui), est présentée par un ingénieur ; une ingénieure, en l'occurrence, quelqu'un qui a sans doute plus étudié qu'elle et dans un domaine scientifique pointu.

 

En attendant, en ce 14 juillet, jour d'étape du Tour de France dans le mont Ventoux, Jacques Kessler a présenté son dernier bulletin à l'antenne.

Mme Bernadette Chamonaz, chargée des journaux de la matinale lui a rendu hommage et à 13 heures, Mme Estelle Schmitt lui a posé des questions, pour une fois, intéressantes. Ça n'est pas l'habitude de la chaîne qui préfère passer rapidement sur ce genre de nouvelles. Alain Bédouet, parti avec un petit mot à la fin de son dernier « Téléphone sonne » après plus de 20 ans. Jean-Luc Hees, autrefois, quittant « Synergie » par quelques mots sur le générique de fin. Christian Magdelaine à qui l'on a posé des questions banales. Les deux journalistes du dimanche – deux femmes : est-ce un hasard ? – ont tenu des propos chaleureux voire familiaux envers leur confrère.

 

Pour reprendre les termes d'Estelle Schmitt : Belle retraite, Monsieur !

 

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