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la lanterne de diogène
12 septembre 2013

lui reparait

lui reparaît. Ah bon ? Qui cela peut-il intéresser ?

 

Foin de l'hypocrisie dans ce domaine. Lui est sorti en 1963 afin d'offrir au public français un équivalent du fameux Play Boy. Ces magazines proposaient des photos dites « de charme » au milieu d'articles et de reportages susceptibles d'intéresser une clientèle masculine disposant d'un budget plus que correct et pouvant être tenté par de grosses voitures, des vêtements chers, des loisirs sélect. Une entrevue avec une personnalité, annoncée en couverture, devait permettre aux plus timides d'acheter une revue affichant des filles dénudées sans craindre les railleries ou les regards de travers. Une formule qui hésitait entre la présentation et le papier glacé des magazines de luxe et un jeune lectorat très varié et seulement attiré par les photos de charme.

 

À chaque numéro spécial anniversaire, le dessinateur Wolinski, pilier du mensuel, rappelait, à sa façon, les étapes qui ont marqué l'évolution de la « photo de charme ». On partait en 1963 de mannequins ou de célébrités nues mais dissimulant les parties les plus affriolantes. Tout était dans la suggestion comme il se devait pour un magazine qui s'adressait, de préférence, à des intellectuels. Il a fallu attendre 1966 pour voir entièrement les premiers seins nus. La révolution était proche. Pourtant, ce n'est qu'en 1971 qu'on pouvait publier des photos de filles dévoilant leur pubis. À partir de là, la concurrence s'est déchaînée et ne s'encombrait pas de reportages ou d'entrevues. Dans le même temps, les films pornographiques se sont multipliés. Ils font la joie des amateurs d'aujourd'hui qui les trouvent un tantinet désuets. C'est que – faut-il le préciser – les acheteurs regardaient davantage les photos de nu que le reste. Pour une somme relativement modique, on pouvait se rincer l’œil et admirer de très jolies filles. Si l'on voulait plus, il fallait débourser davantage de TVA.

 

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Qui posait dans lui ? D'abord et surtout de très jolies filles parfaitement inconnues. Quant aux vedettes, généralement, cela faisait partie d'une stratégie de promotion ou bien ça répondait à une sollicitation. Le public masculin était impatient de connaître la plastique d'une actrice en vogue et même le public féminin sur l'air de « Je me demande ce qu'elle a de plus que moi... ». Dans les années 1970, qu'un film soit annoncé et la vedette féminine se devait de se dévoiler dans le numéro qui coïncidait avec la sortie du film. En général, il prolongeait les quelques scènes dénudées du long métrage. À une époque où il n'existait pas de moyen de copier des films ou d'en avoir chez soi facilement, c'était un bon moyen de conserver un souvenir de l'actrice. Il y avait aussi des comédiennes qui posaient pour s'amuser ou pour le plaisir.

 

Forcément, à partir du moment ou les cassettes vidéo sont apparues, non seulement les films grand public mais aussi les films porno ont pu entrer dans tous les foyers et autrement plus discrètement. Les couples en étaient (en sont?) de gros consommateurs. Les cinémas porno ont fermé et les magazines de charme, qui venaient de connaître un âge d'or, ont raccroché les uns après les autres. lui a multiplié les formules nouvelles pour subsister avant de jeter l'éponge à son tour. Play Boy perdure mais difficilement et ses clubs également. Qui va payer pour voir des filles, même très jolies, en minijupes et collants et arborant des oreilles de lapin ?

 

lui était aussi le magazine des adolescents impatients de découvrir les secrets de l'anatomie féminine. On essayait de le feuilleter dans les magasins car notre argent de poche ne nous permettait pas ce luxe et notre âge nous disqualifiait auprès de la marchande. Quelle chance quand l'un d'entre nous s'en était procuré un et que nous avions accès à la beauté féminine sous la forme de filles plus âgées que nos copines de classe ! C'est ainsi que, les filles aussi, à l'occasion, feuilletaient la revue des garçons, tiraillées entre le mépris pour ces garces qui posaient à poil et gagnaient leur vie comme ça (parce que, forcément, elles pouvaient pas faire autre chose) et l'admiration pour des jolis corps qu'elles s'efforceraient d'imiter pour plaire à ces incurables mecs qui ne savent pas voir les vraies qualités féminines. Éternelle contradiction des filles qui pestent contre les gars qui ne s'intéressent pas à ce qu'elles ont dans la tête mais qui mettent en avant leur physique pour se faire remarquer.

Plus tard, nous pouvions nous offrir ce petit plaisir sans recourir à des stratagèmes. Bien sûr, nous savions que quelques vieux libidineux en consommaient sans modération mais nous ne serions pas de ceux-là. Pourtant, force est de constater qu'ils assuraient le chiffre d'affaire de la publication.

 

Donc, plutôt que de gloser sur la reparution de lui, il faudrait s'interroger sur les raisons de sa disparition et l'échec de sa reparution, dans les années 1990, sous le titre « Les filles de Lui » et proposant des clichés publiés à la grande époque des magazines de charme. La preuve que lui était recherché surtout pour les clichés de filles nues, c'est que la facilité à s'en procurer (et discrètement) grâce, d'abord aux VHS puis aux DVD et à l'Internet, a ruiné les magazines qui répugnaient à proposer des cuisses écartées.

Foin de l'hypocrisie : les acheteurs cherchaient non pas la beauté féminine mais la nudité et l'incitation au sexe. À l'heure de l'Internet,et ses milliers de sites plus ou moins obscènes, à l'heure où le corps féminin a été infantilisé avec la quasi obligation du pubis rasé pour toutes, des photos plus ou moins artistiques de vedettes ou d'inconnues à la plastique irréprochable ne devrait pas attirer grand monde, même avec de grandes signatures – pas si grandes que ça d'ailleurs – pour apporter une caution intellectuelle. Beigbeder le sait mais évoque la transgression que constituait la nudité autrefois et assure que « ce qui est transgressif aujourd'hui, c'est que ce soit beau et artistique ». S'il le dit...

 

http://www.franceinter.fr/emission-linvite-de-7h50-le-retour-de-lui

 

d'autant que Play Boy est quasiment devenu un nom commun pour désigner un magazine où l'on trouve des photos de filles nues mais que lui n'a jamais connu cette consécration malgré sa notoriété.

 

Alors, comme prévu, le nouveau lui est plein de pubs pour des montres (de luxe évidemment), des voitures mais, finalement, pas beaucoup plus que la plupart des hebdomadaires ; à l'exception notoire de Marianne ou de Politis. Il faut attendre 27 pages pour lire quelque chose, l'éditorial de Frédéric Beigbeder. On retrouve un peu le style d'autrefois dans le rédactionnel : des articles pas trop mal fichus avec quelques gros mots et des références aux pratiques sexuelles. C'est un magazine résolument pour adultes. On attend 96 pages pour voir les premières photos de nu. Innovation, chaque cliché précise les coordonnées des... vêtements que porte la modèle. En clair, c'est du nu habillé. Je suppose que ça doit être qualifié de « cérébral ». Il est vrai, encore une fois, que les amateurs de nu et de pornographie satisfont leurs besoins facilement aujourd'hui.

Une innovation intéressante : l'entrevue avec la vedette féminine qui dévoile ses charmes et plus seulement quelques commentaires réels ou fictifs de la fille qui pose nue et dit être timide tout en étant une bombe sexuelle et pas du tout concernée par la pudeur.

Bref, on se demande ce que lui va apporter aux lecteurs. http://www.lui.fr/

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