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la lanterne de diogène
14 novembre 2013

La politique française à l'automne 2013 (2)

Voyons, à présent les réponses des partis politiques. À droite, on n'a encore pas digéré la querelle (ne parlons que d'une) qui divise encore l'Ump. Certes, l'impopularité du Gouvernement est telle qu'elle va regagner des villes au printemps prochain mais ça ne changera pas la politique nationale. Il est tentant de tout confondre mais les maires ne font pas les lois. Ils sont chargés, en vertu de leurs pouvoirs de police, de les faire appliquer. La droite et, sans doute, l'extrême-droite, vont largement gagner les européennes. Ça ne leur servira pas à grand chose vu que, lorsqu'elles sont aux gouvernements des pays membres, elles freinent des quatre fers toute velléité du Parlement européen de jouer pleinement son rôle. Elles auraient tort d'accorder plus de pouvoir au Parlement européen vu que la Commission applique une politique qu'aucun gouvernement européen ne pourrait imposer à sa population sans risquer l'émeute.

 

La gauche est sonnée. Le PS continue de faire semblant de croire à la politique pour laquelle il a obtenu la majorité dans les deux chambres. Tout ce qui va dans le bon sens, tout ce qui est populaire a été abandonné. Le semblant de politique keynésienne proposée, la tentative de relance, sont abandonnés au profit d'une politique que le précédent gouvernement n'avait pas osé proposer. Le problème, c'est que les cadres du PS, convaincus qu'ils sont plus intelligents que les autres du fait de leur niveau d'études, ne veulent pas changer, persuadés que les Français comprennent qu'ils se serrent la ceinture, une fois de plus, pour leur bonheur. Sauf que ça fait quarante ans qu'ils se serrent la ceinture à chaque changement de Premier Ministre qui leur promet que cette fois est la bonne, que ça va être dur pendant encore plusieurs mois mais qu'après, tout ira mieux.

 

La gauche radicale (en fait la gauche puisque le PS a glissé au centre) se cherche toujours. Les militants « débattent ». C'est l'euphémisme qu'ils emploient pour dire qu'ils se disputent sur tout et aboutissent, parfois, à un accord minimal. Son chef charismatique, M. Mélenchon, se réjouit chaque fois qu'un groupuscule le rejoint mais c'est pour mieux « débattre » aussitôt et lui contester son autorité alors que c'est la seule personnalité connue de cette mouvance, ô combien mouvante. À chaque occasion, un des membres de cette mouvance se demande si l'herbe n'est pas plus rouge à côté et s'avise qu'il y a des chardons et des champignons dans son propre herbage.

 

Les écologistes sont les dindons de la farce. Ils ne vont pas disparaître. Le mouvement d'écologie politique est ancré définitivement dans le paysage politique mondial. La prise de conscience est forte et beaucoup plus étendue qu'il n'y paraît au vu des résultat des formations écologistes et des politiques menées. Paradoxalement, plus la prise de conscience augmente, plus les résultats des écologistes diminuent. En Allemagne, le poids des Verts ne suffit plus pour faire ou défaire un gouvernement. Pourtant, c'est dans ce pays que l'écologie politique s'est fait connaître et a fait naître un espoir. Les résultats sont là et l'écologie appliquée rapporte, développe des activités lucratives et permet à l'Allemagne de conforter sa place de numéro 1 européen. Seulement, les mouvements politiques, en France, n'ont réussi qu'une chose, c'est présenter l'écologie comme une chose « sinistre, moralisatrice et punitive » pour reprendre l'expression de Denis Cheissoux. En fait, l'écologie est à l'image des clients des bio-coops. Un tour dans l'un de ces magasins et l'on découvre des clients tristes, habillés tous un peu pareil, qui se renseignent pour savoir si les produits qu'ils achètent ont bien plus de ceci ou moins de cela et qui ne sont jamais vraiment satisfaits. Pourtant, ils devraient être contents puisqu'ils consomment des produits conformes à leurs souhaits et qui vont les maintenir en bonne santé quand les autres vont voir s'abattre sur eux les sept maladies (allusion à Boris Vian). C'est le contraire, ils sont déconfits en permanence, portent tout le poids de la culpabilité collective dans la détérioration de l'environnement (alors qu'ils n'y sont pour rien, eux) et plaignent les malheureux qui n'ont pas encore été touchés par la grâce écologique. EELV est à leur image puisqu'ils sont tous consommateurs des bio-coops. Forcément, ils ne vont pas attirer l'électeur à leurs thèses ; au contraire, ils apparaissent comme de véritables repoussoirs puisque le moindre effort des particuliers n'est jamais assez bien et n'est jamais encouragé.

 

Surtout, le Gouvernement socialiste est en passe de réussir avec les écologistes ce qu'il avait parfaitement accompli, il y a environ trente ans, avec les communistes et avec les syndicats. Depuis un an et demi, chaque nouvelle taxe, chaque impôt nouveau, est présenté comme une concession faite aux écologistes et à leurs lubies, en échange de leur participation au Gouvernement. Le PS va gagner dans la mesure où, à terme, il ne sera plus obligé d'intégrer la dimension environnementale dans sa politique et où il n'aura plus à négocier avec les écologistes, même pour leur faire plaisir, en sachant qu'il n'en fera qu'à sa tête, de toute façon. Il suffit de voir où en est réduit le parti des radicaux de gauche, partenaire historique du PS. S'il n'est plus allié au PS, il disparaît. S'il reste avec lui, il se fait sucer la moelle. Sauf que le PS n'aura plus de partenaires ; en supposant qu'il en ait encore. Il est vrai que, au coup par coup, le PS trouve un allié de circonstance : un coup les communistes (du moins ce qu'il en reste) pour les municipales en vue de garder des mairies (quitte à faire élire un maire PS avec les voix des communistes plus assez nombreux pour faire poids), un coup les écolos quand il faudra faire croire qu'on se préoccupe de l'avenir. En cas d'échec, on entraîne tout le monde dans sa chute. Quitte à chuter, autant chuter ensemble, comme ça, ceux qui sont déjà au fond amortissent le choc pour les autres.

 

L'extrême-droite engrange. Parti de frustrés par définition,

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2013/09/18/28041094.html

 

la biologie fait que les plus anciens, les nostalgique de la France qui éclairait le monde avec sa marine, son empire colonial, sa population qui saluait le drapeau (on ne précise pas le drapeau), disparaissent. Ils sont remplacés par tous ceux que le chômage de masse a mis sur la paille alors qu'ils ont les compétences et les mérites pour travailler et même prendre des responsabilités. Forcément, cette injustice réelle est le résultat du déclin du pays, de sombres conspirations, et les coupables doivent être désignés à défaut de pouvoir les châtier. Voir les responsables perdurer et d'autres prendre leurs places entretient la frustration. On a eu tort de ne pas y prendre garde plus sérieusement. Tous ceux-là sont maintenant rejoints par d'autres qui voient la gauche abandonner ses fondamentaux, faire litière de son héritage prestigieux et qui n'écoute plus le peuple.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/10/06/19255952.html

 

À quoi sert la gauche si elle n'est plus à l'écoute du peuple et si elle ne prend pas l’initiative de le défendre ? Ce que la gauche a abandonné dans la domaine social a été ramassé par l'extrême-droite qui a beau jeu de rejeter cette étiquette infamante maintenant que nombre de ses grandes lignes étaient celles de la gauche autrefois. Il fallait y penser avant. Le mal est fait et ne fait que commencer. Déjà, la menace d'une extrême-droite en tête des européennes n'est plus hypothétique.

 

À la fin de cette chronique d'une défaite annoncée (il ne s'agit pas seulement d'une défaite de la gauche), le reste de la classe politique n'a aucune réponse sérieuse à proposer. La droite hurle, comme d'habitude, que l'extrême-droite est le sous-produit de la gauche, voire sa créature, pour affaiblir la droite traditionnelle et plurielle. Plurielle puisque nombre de cadres et de militants de l'extrême-droite vient du RPR. Sa créature puisque c'est un journaliste de gauche assumé, François-Henri de Virieux qui, le premier, a invité Le Pen dans une émission politique grand-public en 1983. On connaît la suite qui nous empoisonne depuis trente ans.

 

La gauche ne fait pas mieux. Le PS condamne tous les propos venant de ce côté mais n'en fait pas plus et donne, effectivement, l'impression de ricaner en voyant l'embarras causé par cette force nuisible. Le reste de la gauche pousse, comme d'habitude, des cris de vierges effarouchées. Elle ressort les vieux slogans portés par nombre de combattants qui ont donné leur vie contre le fascisme sous toutes ses formes : « No pasaran ». C'est beau. C'est émouvant. C'est inefficace. Aucune des formations de gauche ne prend la mesure du danger. Toutes, au contraire – et les militants ne font pas mieux – se servent de l'extrême-droite pour se rassurer. Puisque les mauvais sont clairement identifiés, forcément, eux sont les bons. Faut-il que leurs convictions soient aussi peu solides qu'il faille s'appuyer sur la peur que provoque l'adversaire le plus détestable ? D'autant plus redoutable qu'on a tout fait pour qu'il le soit. Pas une de ses formations, pas un de ses militants qui prend la parole en public ou sur les réseaux sociaux ne fait autre chose que passer du temps, gaspiller de l'énergie à commenter, critiquer, condamner le moindre propos émanant de l'extrême-droite comme s'il était besoin de convaincre de l'inanité de tels propos ou de telles propositions. Ils se relaient pour glisser à tout bout de champ : « j'emmerde Le Pen », comme si c'était la preuve d'un courage digne de Bayard, comme si ça l'affaiblissait. Pas un n'a eu l'idée de s'emparer des fondamentaux de la gauche, de les revendiquer. Pas un n'a pris l'initiative d'écouter les doléances de la population qui souffre depuis quarante ans. Au contraire, le contact avec la population sert à donner raison aux récriminations mais pour aussitôt dire que la gauche (pas le PS) a des réponses, à condition d'être majoritaire, alors même que le système électoral ne le permet pas. Le contact avec la population leur sert aussi, hélas, à convaincre la population qu'il y a des combats plus urgents que leurs problèmes quotidiens (payer les médicaments, le loyer, le gaz, l'électricité, l'eau, les poubelles). Quand on est dans la mouise jusqu'au cou, on n'entend pas celui qui vous dit qu'il y a plus malheureux. Ça, l'extrême-droite l'a bien compris. Il ne faudra pas s'étonner du résultat. Surtout, par pitié, qu'on nous épargne les formules toute faites sur la montée de la « peste brune » et autres billevesées. L'heure sera grave et ne sera plus à réciter des slogans pour se faire plaisir.

 

Tout est donc perdu ? Le pire n'est jamais sûr. Bien entendu, il y a peu de chance qu'un sursaut de lucidité se manifeste dans les mois qui viennent. Le Gouvernement va plutôt continuer dans le jeu de « j'avance et je recule ». On va continuer à balancer des slogans. On va continuer à commenter la moindre connerie proférée par un candidat quelconque à une municipale ; surtout s'il est connu, mais la condition ne sera pas nécessaire. On va continuer à amuser la galerie avec des sujet qui n’intéressent pas ceux qui subissent la crise, la privation d'emploi et, donc, la perte de revenu et de dignité. La gauche a sorti depuis longtemps le triangle rouge. Elle continue avec « no pasaran ». On attend le prochain gadget. Rappelons, tout de même, qu'en 2002, elle proposait d'aller voter Chirac avec des gants et des pinces à linge. Ça ne l'a pas empêché d'être élu avec un score soviétique grâce aux voix de la gauche et de mener une politique ultra-libérale. Cette fois, ça ne concerne que les mairies mais beaucoup de maires se voient en roitelets, surtout s'ils ont une police municipale.

 

Tout n'est donc pas perdu. Et puis, le centre se reforme. Ceux qui n'ont pas réussi à convaincre les électeurs du bien fondé de leur démarche ont décidé d'associer leurs frustrations et de porter l'espoir d'une politique différente. Finalement, ils se comportent comme la gauche et l'extrême-gauche qui font la somme de leurs faiblesses en pensant en faire une force. Avec des journalistes qui les somment de se prononcer pour la droite ou pour le centre-gauche, comment faire entendre une voix centriste ? Ça va occuper les commentateurs et détourner l'attention des vrais problèmes que vivent les Français.

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