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la lanterne de diogène
23 décembre 2014

Jacques Chancel

Jacques Chancel connaît, à présent, la mort, thème auquel il était lié par la caricature qu'on faisait de ses entretiens. Comme quoi, les raccourcis et les idées reçues ont toujours fait partie de l'arsenal des humoristes qui n'ont pas grand chose à dire.

 

Bien qu'ayant commencé sa carrière comme grand-reporter – à une époque où ça n'était pas seulement un titre honorifique – il est surtout connu pour sa Radioscopie quotidienne sur France-Inter. Presque une heure de débat avec un invité qui n'était pas toujours un philosophe ou un scientifique pétri d'humanisme. Parfois, c'était un anonyme mais toujours quelqu'un dont la vie tranchait avec le commun des mortels. L'époque de Radioscopie, c'est aussi le temps où la radio ne craignait pas de laisser parler ceux qu'elle interrogeait. On n'avait pas cette hantise du « tunnel » et on laissait développer un raisonnement pour peu qu'il soit intéressant ou original. La dictature de l'audimat et de son corollaire le « tunnel » a créé cette génération de journalistes qui interrompent systématiquement leur invité, surtout s'il se met à argumenter. Il le recadre, ainsi, afin de coller à l'idée qu'ils se font des attentes de leur public et, en le déstabilisant, ils espèrent le petit dérapage qui va faire qu'on va parler d'eux. La gloire suprême, c'est quand on cite leurs noms dans les écoles de journalistes pour avoir fait dire la formule qui a fait date.

 

Jacques Chancel n'était pas agressif avec ses invités. Après tout, c'est la moindre des politesses. Ça finissait par agacer ceux qui vont au cirque pour voir l'acrobate chuter ou le dompteur dévoré. Reste que, aujourd'hui encore, quand on veut entendre des propos sérieux de la part d'un intellectuel de renom, on les trouve dans les Radioscopie de Jacques Chancel, même quand on ne le cite pas, lui. D'une manière générale, les archives sonores de grand intérêt sont, le plus souvent, des entrevues menées par Jacques Chancel ou Yves Mourousi. On peut bien se moquer d'eux, on n'a pas fait mieux depuis.

 

Jacques Chancel, c'est aussi la télévision. Le Grand Échiquier a été longtemps l'émission de variété de haut de gamme avant de glisser vers une vulgarisation de la musique classique avec un style « sucre et miel » ; pour reprendre l'expression de Télérama de l'époque. En effet, on ne risquait pas de voir l'invité mal à l'aise sur ce plateau où tout était fait pour le flatter et en remettre de tonnes. Jacques Chancel à la télévision, c'était aussi et surtout son rôle de conseiller auprès du premier PDG d'Antenne 2, le grand Marcel Julian ; trop grand pour ce qu'on attend de la télévision. Ensuite, il a repris ces fonctions auprès de Philippe Guilhaume puis d'Hervé Bourges. C'est donc à lui qu'on doit en grande partie de n'avoir pas vu la télévision française connaître une évolution à l'italienne après la multiplication des chaînes privées. Certes, en général, c'est plutôt « la mauvaise monnaie qui chasse la bonne » mais le contraire existe aussi. La preuve. Il est évident que si des programmes de qualité réalisent une bonne audience, ça fait aussi réfléchir les chaînes privées, tentées de (re et re-) diffuser des séries étrangères et des jeux pour faire patienter le téléspectateur entre deux écrans de publicité. D'ailleurs, c'en est arrivé à un tel point qu'on parle aussi de « tunnel » pour la pub à la TV.

 

Avec Jacques Chancel, c'est une époque où les médias n'hésitaient pas à approfondir les sujets qui se termine. La semaine dernière, c'était Denis Poncet qui s'en allait. Pour les faits divers et les vedettes du moment, les journaleux se répandent sur la « loi des séries ». Quand il s'agit de la mort de professionnels qui faisaient honnêtement leur boulot, ça ne touche que ceux qui suivent les dossiers.

 

En attendant, ça fait deux grandes voix qu'on n'entendra plus. Restent les archives, même si l'on omet de citer leurs noms comme les auteurs de ces documents irremplaçables.

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Commentaires
J
J'ai un bon souvenir du Grand Echiquier, j'ai parmi ceux-ci une collection de grands moments. Un duo au piano où Michel Legrand donnait la réplique à Lalo Schifrin. Georges Brassens accompagné par un orchestre symphonique. Des soirées fantastiques où l'on retrouvait Ivry Gitlis, Stéphane Grapelli, Yehudi Menuhin, Isaac Stern, Von Karajan, les soeurs Labecque, Bernstein, le luthier Etienne Vatelot, Lorin Maazel, les violoncellistes Maurice Baquet et Mtislav Rostropovitch, le trompettiste Maurice André mais aussi Léo Ferré, Raymond Devos... <br /> <br /> Si c'est ça le sucre et le miel, je veux bien risquer le diabète !
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