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la lanterne de diogène
17 janvier 2015

Charlie 2

Difficile de prendre la plume, tant l'émotion est grande. Encore plus difficile de dire ce qu'il n'est pas convenable alors que nous avons tous envie de dire la même chose. Justement, tout est dit, surtout après cette grande manifestation qui a vu défiler ceux-là mêmes que Charlie Hebdo étrillait à longueur d'années pour les soutenir. Alors que l'indignation est légitime, quoique bien dérisoire, que la condamnation est nécessaire, on voit, aujourd'hui, qu'il y a une obligation de solidarité. L’État, dégage 1 million d'euros pour aider un titre qui bat de l'aile et qu'on aurait vu disparaître avec plaisir, il y a quelques jours seulement. La Ville de Paris vient d'abonner tous les Conseillers municipaux à Charlie-Hebdo. On aurait aimé qu'au cours de ce Conseil Municipal extraordinaire, on incite les Conseillers à y aller de leur poche. Qu'est-ce que le prix d'un abonnement sur le total des émoluments d'un Conseiller, même de base ? Tandis que là, les contribuables sont mis à contribution sans qu'on leur demande leur avis. Facile d'être généreux avec l'argent des autres. Comme me l'a fait remarquer une amie, à ce train, Charlie-Hebdo va pouvoir racheter TF1...

 

Ah, non, il ne faut pas rire avec ça ! Ah bon ? je croyais qu'on pouvait rire de tout mais pas avec n'importe qui. Où l'on voit les limites de l'humour et de la critique. Oui, l'on peut rire de tous les autres mais pas de ceux qui nous sont proches par les sentiments. Dure leçon.

Manifestation nationale, donc, internationale, même. Plus que pour les obsèques de l'Abbé Pierre alors que le professeur Kapé de Bana réclamait des obsèques internationale pour le grand homme qui a soulagé tant de souffrances de par le monde.

 

Parmi ceux qui ont défilé dimanche, combien étaient-ils, l'été 2012, à critiquer le relèvement du niveau du plan vigipirate et à traiter le Ministre de l'Intérieur de l'époque, M. Valls ? Combien étaient-ils à s'indigner et à appeler à descendre dans la rue pour défendre l'écrivaine qui donnait, tous les soir, dans un théâtre de l'est parisien, un spectacle qui déplaisait aux islamistes qui menaçaient l'auteure, le théâtre et son personnel ? N'aurait-il pas fallu faire preuve de détermination à ce moment-là ? Combien étaient-ils à défendre Charlie-Hebdo qui publiaient des numéros anti-islamisme, dans la grande tradition des journaux satiriques anticléricaux ? Pas plus que ceux qui manifestaient contre les catholiques intégristes ou non qui vociféraient contre une exposition montrant un crucifix trempant dans un bocal de pisse.

Enfin, combien étaient-ils à acheter Charlie-Hebdo ? Pourquoi ne l'achetaient-ils pas, d'ailleurs ? N'était-ce pas sa ligne anti-islamiste qui les dérangeaient ? On apprend, à l'occasion de ces événements meurtriers que nombre de kiosquiers musulmans ne mettaient pas Charlie-Hebdo en vente, le laissait dans son paquet et le renvoyait en invendus. On ne le savait pas avant ? On a donc laissé faire en se disant qu'on comprenait. C'est ainsi que le dernier numéro avant l'attentat avait tiré à 40 000 exemplaires. Dérisoire, donc. Une petite fraction de ceux qui ont défilé dimanche à travers toute la France aurait suffi pour maintenir le titre à un niveau normal. Seulement, les bien-pensants – qui étaient tous présents dimanche et plutôt deux fois qu'une – boudaient Charlie-Hebdo à cause de ses positions contre l'islamisme. Les plus moralisateurs d'entre eux se sont reporté sur Siné-Hebdo devenu mensuel qui sait parfaitement sur qui taper pour ne pas être menacé.

 

Quand on met tout ça bout à bout, on en arrive à se dire que les deux attentats de début janvier 2015 ne sont pas surgis du néant mais qu'il y avait un terrain favorable. Terrain d'autant plus favorable que les derniers attentats islamistes commis à proximité on fait l'objet d'excuses et de justifications. On peut admettre les excuses. Les religions pratiquent le pardon. La République accorde la grâce. Mais les justifications ? Comment peut-on oser justifier le meurtre froid de civils sans armes, d'enfants alors qu'ils vaquaient à leurs occupations ? Eh bien, il s'en trouve et il y en avait dans le défilé de dimanche. Sur les murs de Paris, on a vu tout de suite des slogans tentant à faire croire que ces attentats sont une manipulation sioniste. Des ados et des pré-ados musulmans ont refusé de participer à la minute de silence en mémoire des victimes de Charlie-Hebdo. « Eh non, madame, ça s'fait pas ! ». ça ne se fait pas de se moquer ou même simplement de critiquer leur religion quand on est pas soi-même musulman. D'ailleurs, quand on est musulman, on ne le fait pas non plus. On peut critiquer la religion mais pas leur religion. Dans le même temps, Boko Haram massacre des villages entiers sans que le monde, ni même l'Afrique, ne s'en émeuve. Et l'on est toujours sans nouvelle des filles puis des garçons enlevés depuis plusieurs mois déjà. Là, on ne dit rien. On ne manifeste pas.

 

Il faudra bien, enfin, qu'on règle ces contradictions. Seulement, c'est pas facile dans un contexte où « celui qui pense » passe pour un emmerdeur, et où l'on a chassé toute pensée, tout ce qui a du sens, toute méthodologie, tout repère intellectuel de l'environnement des élites et de ceux qui prennent la parole. « Ni dieu, ni maître » ne souffre aucune exception. Le terme de « maître à penser » doit être compris non pas comme celui qui dicte sa pensée et incite à le suivre mais comme celui qui fait réfléchir et propose des amorces de réponses.

 

 

Il n'y a pas si longtemps, on entendait les propos outrés de commentateurs lorsqu'on a demandé aux autorités musulmanes de condamner les exactions des islamistes commises au nom de l'islam. On avait ironisé et l'on s'était indigné qu'on « somme » les musulmans à se désolidariser de leurs coreligionnaires meurtriers. Cette fois, la plus haute autorité musulmane du monde, l'université Al-Azahar du Caire a condamné, et tout de suite, l'attentat contre Charlie-Hebdo. Les musulmans, interrogés dans la rue ont unanimement condamné ces meurtres qui salissent leur religion. Dans une communauté où la pression du groupe est aussi forte, c'est à souligner d'autant plus que, depuis à peu près 1979, la grande majorité des musulmans s'est soumise aux diktats de jeunes excités qui étaient allés jusqu'à contraindre leurs propres mères à sortir revêtues de robes longues et de foulards. Aujourd'hui, bien peu de musulmanes peuvent s'habiller comme elles veulent et l'on commence à voir des petites filles portant des foulards qui ne laissent voir que l'ovale du visage.

 

 

Pour ceux qui en douteraient encore, soulignons que cette indignation mondiale, la présence de nombreux chefs de l'exécutif étrangers, de nombreux représentants d’États étrangers à la manifestation du dimanche montre bien que la France, malgré le discours décliniste à la mode, malgré l'émergence de grands pays dans des régions du monde délaissées, conserve son prestige qui ne s'arrête pas à des valeurs marchandes mais bien des valeurs de bien-être et de démocratie qui s'imposent à tous.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/11/05/19521460.html

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