Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la lanterne de diogène
11 avril 2015

Le Pen une affaire de famille

Onze minutes ! Oui, pas moins de 11 minutes consacrées à l'affaire de la famille Le Pen dans le journal de 13 heures d'Inter du vendredi 10 avril, présenté par Mme Claire Servajean. 11 mn sur 28 minutes, journal très légèrement raccourci pour cause de grève sur Radio-France. Tout ça pour nous nous expliquer ce que tout le monde a déjà compris facilement. On n'a pas lésiné sur les moyens : d'abord un politologue puis un psychanalyste et enfin une enseignante de Stanford ; excusez du peu. Comme si l'on ne comprenait pas les raisons et les enjeux d'un conflit dans une famille que les médias nous ont rendu familière, hélas.

http://www.franceinter.fr/emission-le-journal-de-13h-inter-treize-758

Les médias ! Ce sont eux qui ont fait Le Pen. Depuis 1972 qu'existe le parti de l'extrême-droite française, on ne peut pas dire qu'il ait brillé politiquement. Il n'a enregistré que des succès locaux dont un strapontin de Conseiller d'arrondissement dans le XXième à Paris lors des Municipales de 1983. Pourtant, c'est ce succès qui a motivé l'invitation de Le Pen à l'émission phare de la télévision de l'époque : « L'Heure de vérité ». Le journaliste – par ailleurs cofondateur du regretté quotidien de gauche « Le Matin de Paris » – François-Henri de Virieux a cru voir dans cette élection du chef de l'extrême-droite dans le populaire XXième arrondissement, un fait de société majeur et un phénomène politique intéressant. Rappelons simplement que, à Paris, le Conseiller d'arrondissement récolte les miettes des suffrages, après l'élection des Conseillers municipaux et qu'il ne siège pas au Conseil Municipal. D'ailleurs, Le Pen ne se rendra au Conseil d'arrondissement que trois fois en six ans. Cette émission a relancé la carrière finissante de Le Pen, alors qu'il se faisait tailler des croupières par le PFN (Parti des Forces Nouvelles) et que les électeurs adeptes d'une ligne dure se retrouvaient parfaitement dans le tout nouveau RPR chiraquien derrière les Pasqua, Guéna et Pandraud par exemple. L'émission a fait un tabac mais très relatif car c'était la période estivale.

Depuis ce relatif succès, rien ne se passe en France sans qu'on ne demande à Le Pen ce qu'il en pense ni sans qu'on s'interroge sur la moindre opinion d'un politique ou d'un citoyen ordinaire pour savoir si Le Pen aurait pu le dire ou si ce qui est dit « fait le jeu du FN ». Tout passe par le prisme de Le Pen. D'une manière générale, si l'on ne prend pas le contre-pieds absolu d'un propos qu'il a tenu ou qu'il aurait pu tenir, on est accusé de tous les maux. Depuis plus de trente ans, donc, on n'arrête pas de s'interroger sur le phénomène Le Pen. Si l'on en dit du bien, il progresse logiquement mais si l'on en dit du mal aussi. Un vieil adage prétend bien que l'on en dise du bien ou du mal, peu importe du moment qu'on en parle. Tout Le Pen se retrouve là-dedans ; et ça marche furieusement. Le Pen n'a pas enregistré que des succès depuis ce temps-là. Les scores du FN, toujours modestes ont été en dents de scie. Au plus haut de la vague, le FN n'a jamais rien gagné à l'échelon national mais à chaque fois, on l'a déclaré « grand vainqueur de ces élections ». L'expression a été détournée de son sens et construite sur mesure pour le FN. Parler de « grand vainqueur » pour une formation qui arrivait régulièrement en quatrième ou cinquième position ne manque pas de piquant. Au plus bas de la vague, quand on pensait que le phénomène allait retomber, il s'est toujours trouvé un journaliste pour aller tendre le micro à Le Pen et ça repartait de plus belle. À chaque fois, alors qu'on a dénoncé la pression exercée par Le Pen sur les plateaux, les journalistes ont accepté cette épreuve tant bien que mal comme s'il s'agissait d'un sacrifice salutaire. En réalité, cette profession a bien compris et depuis 1983, que Le Pen assure le spectacle. On espère le dérapage, le lapsus, l’outrance dont on va parler pendant des mois. Pendant ce temps, on ne parle pas d’autre chose. C'est un bouffon indispensable, un fusible commode, un sinistre pitre, un paravent utile pour les pouvoirs. On aime à répéter que Mitterrand le regardait avec bienveillance, sachant qu'il prenait des voix à Chirac mais pas assez pour être vraiment dangereux. Il focalise sur lui toutes les énergies et il n'en reste plus pour défendre la protection sociale, la santé, l’environnement ; autrement dit ce qui nous touche au quotidien. Alors qu'il n'est plus que le président d'honneur (sic) du FN, Le Pen (père) est systématiquement interrogé par les journalistes. D'habitude, la présidence d'honneur d'un parti ou d'une association quelconque est purement honorifique ; comme son nom l'indique. Seulement, dans ce cas-là, on fait une exception. Le FN suscite des exceptions pour tout. Donc, Le Pen est encore interrogé car sa fille, si elle a aussi une grande gueule, n'en fait pas assez.

Le summum de ce cirque médiatique a été atteint en 2002, peu avant la Présidentielle. Comme d'hab, Le Pen se posait en victime de « l'établissement » (comme il dit), n'ayant pas assez de signatures pour se présenter. Aussitôt, le Premier Ministre, M. Jospin se lamentait et on le sentait capable de trouver une astuce pour qu’il se présente quand même. Dans ce concert digne de Jérémie, seule Mme Taubira s'en réjouissait et affirmait que, au contraire la démocratie en sortirait grandie s'il ne pouvait pas se présenter. On connaît la suite et l'on saura un jour par quel subterfuge il a pu arriver au second tour. Néanmoins, il a fait le plein des voix à cette occasion et l'on a pu mesurer exactement son poids : une vingtaine de pourcents de l'électorat. C'est beaucoup mais il n'y a pas de quoi en faire un saladier. Qu'on songe que la plupart des battus à l'élection présidentielle tournent au minimum autour de 45 %, soit plus du double du score de Le Pen, le 21 avril 2002.

Maintenant que la responsabilité des journalistes vient d'être établie, il faut aussi s'interroger sur le succès auprès du public car, ça ne serait pas la première fois que le favori de la presse ne rencontre pas le succès du public. Or, il faut bien reconnaître qu'on entend assez souvent « Le Pen, lui, va remettre de l'ordre là-dedans, parce que, vraiment, y en a marre » ou bien « quand je vois ça, j'ai envie de voter Le Pen ». C'est qu'il existe dans l'inconscient collectif une sorte de masochisme qui pousse vers le mal avéré ou supposé. On aime recevoir des ordres, se plier à une discipline qui donne l'impression qu'on marche dans le droit chemin et que tout va aller bien. C'est ce qui fait le succès de tous les intégrismes. D'ailleurs, Le Pen attire les intégristes. Ceux qui sont irrémédiablement rétifs à cette état d'esprit ont aussi besoin de cette figure du mal absolu. On aime haïr. Le succès du feuilleton « Dallas » doit beaucoup au personnage haïssable de JR. Alors, tout comme l'avait imaginé Orwell, les foules adorent haïr collectivement quelque chose ou, mieux, quelqu'un. « La jeunesse emmerde le Front National ». Combien se sont senti vivre en vociférant ce slogan. On a fait sa BA en affirmant en public sa détestation de ce parti funeste. Encore aujourd'hui, il se trouve des artistes (surtout) qui à tout propos profitent qu'on leur tend le micro pour lancer courageusement : « J'emmerde M. Le Pen ». Comme si allait le défriser ou lui donner des fourmis dans son œil borgne. Mais bon, on mène le combat qu'on peut. Quand une génération d'après-guerre a pu dire « Hitler, connais pas », on mesure qu'elle regrette de ne pas pouvoir élever ses combats à la hauteur de ses aînés. Par conséquent, on a besoin de se trouver une figure équivalent à combattre. Dans les années qui ont suivi Mai 68, toute personne radicalement à droite était qualifiée de fasciste. Avec l'évanescence du gauchisme, la chute des dictatures fascistes dans le monde, cette insulte ne convainc plus mais la démarche demeure. Très récemment, le Premier Ministre, M. Valls s'est mis en tête de mener un front anti-fasciste pour se recentrer à gauche tout en menant une politique très marquée à droite. Rien de tel pour remobiliser des troupes en perte de repère.

On peut dire que Le Pen fait couler de l'encre et de la salive depuis plus de trente ans : commentaires, articles, magazines, livres, conférences, reportages, films, débats, spectacles, festivals, comités antifas, comités anti-FN etc. Et tout ça pourquoi ? Tout ce qui se dit pour ou contre, lui profite d'une manière ou d'une autre. Il faudrait peut-être s'interroger sur ce qui va peut-être devenir un vrai succès et pas seulement un faux « grand vainqueur ». Évidemment, la raison qui vient d'abord à l'esprit est que la politique incarnée par le Président Sarkozy a déçu ceux qui espéraient l'ordre ou l'idée qu'ils se faisaient. Dans la foulée, la politique incarnée par le Président Hollande déçoit encore plus. Donc, pour ceux dont les convictions ne sont pas chevillées au corps mais varient selon leurs intérêts et leurs besoins, après avoir mis la droite puis la gauche aux affaires et constaté qu'ils vont de plus en plus mal, il ne reste que le FN.

On pourrait penser que le moment serait venu d'essayer une politique alternative et innovante mais, ainsi que mentionné plus haut, le collectif laisse plus souvent aller ses pulsions masochistes plus faciles à exprimer qu'une réflexion sur l'avenir. Donc, les mouvements écologistes, la gauche dite radicale, un vrai centre ne font pas recette. On veut du sang et des larmes surtout si l'on espère qu'ils seront pour l'autre qu'on soupçonne de profiter du système et, partant, d'être responsable de la crise. Une telle maldonne n'est pas seulement le résultat d'une propagande de fait réalisée par la gent journalistique. Elle est rendue possible grâce à l'indigence des propositions alternatives. Ou plutôt, ce ne sont pas les propositions qui sont en cause mais la manière de les présenter qui donne l'impression de ne pas s'adresser à tous mais à une élite éduquée et urbaine. Si la France ne compte plus beaucoup de paysans, elle reste un pays de tradition rurale qui entretient un rapport à la terre, certes fantasmé, mais très fort. Et puis – pourquoi ne pas le dire – les formules simplistes et la démagogie remportent toujours du succès sous toutes les latitudes. Un des ressorts de ce succès consiste à s'en prendre à une catégorie (rarement plusieurs) et la désigner comme responsable des maux. Des anomalies seront montées en épingle et généralisées. Il convient aussi de vouer aux gémonies non pas des puissants mais des semblables ou des misérables qui comptent forcément parmi eux des brebis galeuses qui, paradoxalement s'en sortiront. Pour s'en convaincre, il suffit de se rappeler que le citoyen de base est plus sensible aux fraudes aux prestations sociales qui représentent quelques centaines de millions d'euros par an qu'aux fraudes fiscales qui s'élèvent à plusieurs dizaines de milliards. C'est que le fraudeurs aux prestations sociales, c'est le voisin, le semblable, celui qui partage la même condition mais parvient à y échapper partiellement en fraudant et donc en rompant la solidarité de classe ou de quartier. Le Pen qui n'appartient pourtant pas à cette classe sociale fait semblant de la défendre et les laissés pour compte ont besoin de croire que quelqu'un les écoute. C'est peut-être ça la grande leçon du phénomène Le Pen.

En attendant, les dernières semaines illustrent parfaitement ce qui vient d'être démontré. D'abord, le FN a été déclaré « grand vainqueur » des élections départementales avant même le scrutin. En fait, il ne remporte que 31 cantons sur 2054 et ne va présider ni même intégrer la majorité dans aucun département. Pourtant, les journalistes ne parlent que de ça.

Le Pen (père), sentant qu'il n'est plus dans le coup, tente de revenir sur le devant en rejouant son vieux succès d'antan sur « le détail ». http://lelab.europe1.fr/jean-marie-le-pen-repete-que-les-chambres-a-gaz-sont-un-point-de-detail-de-la-seconde-guerre-mondiale-24404

Et c'est reparti !

Dans la foulée, il accorde une entrevue à un hebdomadaire de faible tir

Onze minutes ! Oui, pas moins de 11 minutes consacrées à l'affaire de la famille Le Pen dans le journal de 13 heures d'Inter du vendredi 10 avril, présenté par Mme Claire Servajean. 11 mn sur 28 minutes, journal très légèrement raccourci pour cause de grève sur Radio-France. Tout ça pour nous nous expliquer ce que tout le monde a déjà compris facilement. On n'a pas lésiné sur les moyens : d'abord un politologue puis un psychanalyste et enfin une enseignante de Stanford ; excusez du peu. Comme si l'on ne comprenait pas les raisons et les enjeux d'un conflit dans une famille que les médias nous ont rendu familière, hélas.

http://www.franceinter.fr/emission-le-journal-de-13h-inter-treize-758

Les médias ! Ce sont eux qui ont fait Le Pen. Depuis 1972 qu'existe le parti de l'extrême-droite française, on ne peut pas dire qu'il ait brillé politiquement. Il n'a enregistré que des succès locaux dont un strapontin de Conseiller d'arrondissement dans le XXième à Paris lors des Municipales de 1983. Pourtant, c'est ce succès qui a motivé l'invitation de Le Pen à l'émission phare de la télévision de l'époque : « L'Heure de vérité ». Le journaliste – par ailleurs cofondateur du regretté quotidien de gauche « Le Matin de Paris » – François-Henri de Virieux a cru voir dans cette élection du chef de l'extrême-droite dans le populaire XXième arrondissement, un fait de société majeur et un phénomène politique intéressant. Rappelons simplement que, à Paris, le Conseiller d'arrondissement récolte les miettes des suffrages, après l'élection des Conseillers municipaux et qu'il ne siège pas au Conseil Municipal. D'ailleurs, Le Pen ne se rendra au Conseil d'arrondissement que trois fois en six ans. Cette émission a relancé la carrière finissante de Le Pen, alors qu'il se faisait tailler des croupières par le PFN (Parti des Forces Nouvelles) et que les électeurs adeptes d'une ligne dure se retrouvaient parfaitement dans le tout nouveau RPR chiraquien derrière les Pasqua, Guéna et Pandraud par exemple. L'émission a fait un tabac mais très relatif car c'était la période estivale.

Depuis ce relatif succès, rien ne se passe en France sans qu'on ne demande à Le Pen ce qu'il en pense ni sans qu'on s'interroge sur la moindre opinion d'un politique ou d'un citoyen ordinaire pour savoir si Le Pen aurait pu le dire ou si ce qui est dit « fait le jeu du FN ». Tout passe par le prisme de Le Pen. D'une manière générale, si l'on ne prend pas le contre-pieds absolu d'un propos qu'il a tenu ou qu'il aurait pu tenir, on est accusé de tous les maux. Depuis plus de trente ans, donc, on n'arrête pas de s'interroger sur le phénomène Le Pen. Si l'on en dit du bien, il progresse logiquement mais si l'on en dit du mal aussi. Un vieil adage prétend bien que l'on en dise du bien ou du mal, peu importe du moment qu'on en parle. Tout Le Pen se retrouve là-dedans ; et ça marche furieusement. Le Pen n'a pas enregistré que des succès depuis ce temps-là. Les scores du FN, toujours modestes ont été en dents de scie. Au plus haut de la vague, le FN n'a jamais rien gagné à l'échelon national mais à chaque fois, on l'a déclaré « grand vainqueur de ces élections ». L'expression a été détournée de son sens et construite sur mesure pour le FN. Parler de « grand vainqueur » pour une formation qui arrivait régulièrement en quatrième ou cinquième position ne manque pas de piquant. Au plus bas de la vague, quand on pensait que le phénomène allait retomber, il s'est toujours trouvé un journaliste pour aller tendre le micro à Le Pen et ça repartait de plus belle. À chaque fois, alors qu'on a dénoncé la pression exercée par Le Pen sur les plateaux, les journalistes ont accepté cette épreuve tant bien que mal comme s'il s'agissait d'un sacrifice salutaire. En réalité, cette profession a bien compris et depuis 1983, que Le Pen assure le spectacle. On espère le dérapage, le lapsus, l’outrance dont on va parler pendant des mois. Pendant ce temps, on ne parle pas d’autre chose. C'est un bouffon indispensable, un fusible commode, un sinistre pitre, un paravent utile pour les pouvoirs. On aime à répéter que Mitterrand le regardait avec bienveillance, sachant qu'il prenait des voix à Chirac mais pas assez pour être vraiment dangereux. Il focalise sur lui toutes les énergies et il n'en reste plus pour défendre la protection sociale, la santé, l’environnement ; autrement dit ce qui nous touche au quotidien. Alors qu'il n'est plus que le président d'honneur (sic) du FN, Le Pen (père) est systématiquement interrogé par les journalistes. D'habitude, la présidence d'honneur d'un parti ou d'une association quelconque est purement honorifique ; comme son nom l'indique. Seulement, dans ce cas-là, on fait une exception. Le FN suscite des exceptions pour tout. Donc, Le Pen est encore interrogé car sa fille, si elle a aussi une grande gueule, n'en fait pas assez.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/05/25/21223104.html

Le summum de ce cirque médiatique a été atteint en 2002, peu avant la Présidentielle. Comme d'hab, Le Pen se posait en victime de « l'établissement » (comme il dit), n'ayant pas assez de signatures pour se présenter. Aussitôt, le Premier Ministre, M. Jospin se lamentait et on le sentait capable de trouver une astuce pour qu’il se présente quand même. Dans ce concert digne de Jérémie, seule Mme Taubira

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2013/11/17/28450886.html

s'en réjouissait et affirmait que, au contraire la démocratie en sortirait grandie s'il ne pouvait pas se présenter. On connaît la suite et l'on saura un jour par quel subterfuge il a pu arriver au second tour. Néanmoins, il a fait le plein des voix à cette occasion et l'on a pu mesurer exactement son poids : une vingtaine de pourcents de l'électorat. C'est beaucoup mais il n'y a pas de quoi en faire un saladier. Qu'on songe que la plupart des battus à l'élection présidentielle tournent au minimum autour de 45 %, soit plus du double du score de Le Pen, le 21 avril 2002.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2012/04/06/23946622.html

Maintenant que la responsabilité des journalistes vient d'être établie, il faut aussi s'interroger sur le succès auprès du public car, ça ne serait pas la première fois que le favori de la presse ne rencontre pas le succès du public. Or, il faut bien reconnaître qu'on entend assez souvent « Le Pen, lui, va remettre de l'ordre là-dedans, parce que, vraiment, y en a marre » ou bien « quand je vois ça, j'ai envie de voter Le Pen ». C'est qu'il existe dans l'inconscient collectif une sorte de masochisme qui pousse vers le mal avéré ou supposé. On aime recevoir des ordres, se plier à une discipline qui donne l'impression qu'on marche dans le droit chemin et que tout va aller bien. C'est ce qui fait le succès de tous les intégrismes. D'ailleurs, Le Pen attire les intégristes. Ceux qui sont irrémédiablement rétifs à cette état d'esprit ont aussi besoin de cette figure du mal absolu. On aime haïr. Le succès du feuilleton « Dallas » doit beaucoup au personnage haïssable de JR. Alors, tout comme l'avait imaginé Orwell, les foules adorent haïr collectivement quelque chose ou, mieux, quelqu'un. « La jeunesse emmerde le Front National ». Combien se sont senti vivre en vociférant ce slogan. On a fait sa BA en affirmant en public sa détestation de ce parti funeste. Encore aujourd'hui, il se trouve des artistes (surtout) qui à tout propos profitent qu'on leur tend le micro pour lancer courageusement : « J'emmerde M. Le Pen ». Comme si allait le défriser ou lui donner des fourmis dans son œil borgne. Mais bon, on mène le combat qu'on peut. Quand une génération d'après-guerre a pu dire « Hitler, connais pas », on mesure qu'elle regrette de ne pas pouvoir élever ses combats à la hauteur de ses aînés. Par conséquent, on a besoin de se trouver une figure équivalent à combattre. Dans les années qui ont suivi Mai 68, toute personne radicalement à droite était qualifiée de fasciste. Avec l'évanescence du gauchisme, la chute des dictatures fascistes dans le monde, cette insulte ne convainc plus mais la démarche demeure. Très récemment, le Premier Ministre, M. Valls s'est mis en tête de mener un front anti-fasciste pour se recentrer à gauche tout en menant une politique très marquée à droite. Rien de tel pour remobiliser des troupes en perte de repère.

On peut dire que Le Pen fait couler de l'encre et de la salive depuis plus de trente ans : commentaires, articles, magazines, livres, conférences, reportages, films, débats, spectacles, festivals, comités antifas, comités anti-FN etc. Et tout ça pourquoi ? Tout ce qui se dit pour ou contre, lui profite d'une manière ou d'une autre. Il faudrait peut-être s'interroger sur ce qui va peut-être devenir un vrai succès et pas seulement un faux « grand vainqueur ». Évidemment, la raison qui vient d'abord à l'esprit est que la politique incarnée par le Président Sarkozy a déçu ceux qui espéraient l'ordre ou l'idée qu'ils se faisaient. Dans la foulée, la politique incarnée par le Président Hollande déçoit encore plus. Donc, pour ceux dont les convictions ne sont pas chevillées au corps mais varient selon leurs intérêts et leurs besoins, après avoir mis la droite puis la gauche aux affaires et constaté qu'ils vont de plus en plus mal, il ne reste que le FN.

On pourrait penser que le moment serait venu d'essayer une politique alternative et innovante mais, ainsi que mentionné plus haut, le collectif laisse plus souvent aller ses pulsions masochistes plus faciles à exprimer qu'une réflexion sur l'avenir. Donc, les mouvements écologistes, la gauche dite radicale, un vrai centre ne font pas recette. On veut du sang et des larmes surtout si l'on espère qu'ils seront pour l'autre qu'on soupçonne de profiter du système et, partant, d'être responsable de la crise. Une telle maldonne n'est pas seulement le résultat d'une propagande de fait réalisée par la gent journalistique. Elle est rendue possible grâce à l'indigence des propositions alternatives. Ou plutôt, ce ne sont pas les propositions qui sont en cause mais la manière de les présenter qui donne l'impression de ne pas s'adresser à tous mais à une élite éduquée et urbaine. Si la France ne compte plus beaucoup de paysans, elle reste un pays de tradition rurale qui entretient un rapport à la terre, certes fantasmé, mais très fort. Et puis – pourquoi ne pas le dire – les formules simplistes et la démagogie remportent toujours du succès sous toutes les latitudes. Un des ressorts de ce succès consiste à s'en prendre à une catégorie (rarement plusieurs) et la désigner comme responsable des maux. Des anomalies seront montées en épingle et généralisées. Il convient aussi de vouer aux gémonies non pas des puissants mais des semblables ou des misérables qui comptent forcément parmi eux des brebis galeuses qui, paradoxalement s'en sortiront. Pour s'en convaincre, il suffit de se rappeler que le citoyen de base est plus sensible aux fraudes aux prestations sociales qui représentent quelques centaines de millions d'euros par an qu'aux fraudes fiscales qui s'élèvent à plusieurs dizaines de milliards. C'est que le fraudeurs aux prestations sociales, c'est le voisin, le semblable, celui qui partage la même condition mais parvient à y échapper partiellement en fraudant et donc en rompant la solidarité de classe ou de quartier. Le Pen qui n'appartient pourtant pas à cette classe sociale fait semblant de la défendre et les laissés pour compte ont besoin de croire que quelqu'un les écoute. C'est peut-être ça la grande leçon du phénomène Le Pen.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/03/23/20704733.html

En attendant, les dernières semaines illustrent parfaitement ce qui vient d'être démontré. D'abord, le FN a été déclaré « grand vainqueur » des élections départementales avant même le scrutin. En fait, il ne remporte que 31 cantons sur 2054 et ne va présider ni même intégrer la majorité dans aucun département. Pourtant, les journalistes ne parlent que de ça.

Le Pen (père), sentant qu'il n'est plus dans le coup, tente de revenir sur le devant en rejouant son vieux succès d'antan sur « le détail ». http://lelab.europe1.fr/jean-marie-le-pen-repete-que-les-chambres-a-gaz-sont-un-point-de-detail-de-la-seconde-guerre-mondiale-24404

Et c'est reparti !

Dans la foulée, il accorde une entrevue à un hebdomadaire de faible tirage

http://www.directmatin.fr/politique/2015-04-10/rivarol-lhebdo-qui-declenche-la-nouvelle-affaire-le-pen-702848

qu'à cela ne tienne ! Les autres médias vont compenser la faible audience qu'aurait eue Le Pen avec ce seul hebdo en se faisant les échos de ses propos les plus outranciers. La fille s'en mêle (à la demande des médias naturellement) et ça devient une affaire de toute première importance. Et c'est comme ça qu'on fait 11 minutes sur 28 mn dans Inter 13. Mme Servajean pourra parler de « suite du feuilleton » (sic). Tout est dit. Le Pen, c'est le spectacle permanent, c'est l'audience assurée.

Rien sur la grève de la veille et de la manifestation monstre à Paris alors qu'il y avait parmi les manifestants des grévistes de Radio-France et des auditeurs solidaires. Le journal de 13 heures d'Inter finit par le sport comme assez souvent. Qu'on en juge : la suspension du joueur vedette de Paris SG et un long sujet sur le bébé qu'attend Amélie Mauresmo. Si, si, c'est du sport. Comme Le Pen, c'est de la politique.

Et encore :

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/04/12/20878758.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2012/02/19/23559713.html

age

http://www.directmatin.fr/politique/2015-04-10/rivarol-lhebdo-qui-declenche-la-nouvelle-affaire-le-pen-702848

qu'à cela ne tienne ! Les autres médias vont compenser la faible audience qu'aurait eue Le Pen avec ce seul hebdo en se faisant les échos de ses propos les plus outranciers. La fille s'en mêle (à la demande des médias naturellement) et ça devient une affaire de toute première importance. Et c'est comme ça qu'on fait 11 minutes sur 28 mn dans Inter 13. Mme Servajean pourra parler de « suite du feuilleton » (sic). Tout est dit. Le Pen, c'est le spectacle permanent, c'est l'audience assurée.

Rien sur la grève de la veille et de la manifestation monstre à Paris alors qu'il y avait parmi les manifestants des grévistes de Radio-France et des auditeurs solidaires. Le journal de 13 heures d'Inter finit par le sport comme assez souvent. Qu'on en juge : la suspension du joueur vedette de Paris SG et un long sujet sur le bébé qu'attend Amélie Mauresmo. Si, si, c'est du sport. Comme Le Pen, c'est de la politique.

Publicité
Publicité
Commentaires
la lanterne de diogène
Publicité
la lanterne de diogène
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 219 689
Newsletter
Publicité