Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la lanterne de diogène
14 avril 2015

Les 400 coups dans la maison ronde

Après les 100 pas voici les 400 coups.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2015/03/27/31783507.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2015/04/01/31814484.html

400 pour 4ième semaine de conflits. Alors, non, je n'ai pas diffusé de pétition de soutien aux grévistes. Il y a des sites qui le font mieux que je ne ferais. Je n'ai pas non plus commenté au jour le jour l'évolution des conflits. Qu'aurais-je apporté qu'on ne trouve nulle part ailleurs ? Chaque jour, Radio-France fait parler d'elle et c'est l'occasion, encore une fois, de souligner le travail remarquable de Mme Sonia Devillers qui, lorsqu'elle peut tenir son émission quotidienne, apporte les dernières nouvelles et un regard professionnel. Les auditeurs sont mécontents. Ils prennent leur mal en patience. Ils se plaignent de subir les programmes des concurrentes et surtout la publicité. Je les rejoins sur ce dernier point car c'est un leitmotiv chez moi. Comme je suis exaspéré par la parlotte qui tient lieu de programme sur les différentes chaînes de Radio-France, je ne peux justifier ma fidélité que par ma réticence aux publicités. Sinon, on pourrait me répondre : si t'es pas content, va écouter ailleurs.

 

Eh bien, écouter ailleurs n'est pas forcément mauvais ! D'abord, il existe d'excellents professionnels sur toutes les antennes. Je me permets de vanter encore une fois l'excellente émission du soir sur RTL « La curiosité... » : des animateurs sans prétention, un éclectisme de sujets rendus accessibles à tous. C'est ça une radio populaire. Évidemment, je n'en dirai pas autant du reste de la grille. Celles qu'on appelait autrefois « les périphériques », et qu'on qualifie aujourd'hui de « généralistes », traitent également de la crise à Radio-France. On n'en apprend pas plus mais pas moins non plus vu que l'antenne d'Inter diffuse surtout – et enfin – de la variété et qu'il est difficile d'être juge et partie. Les concurrentes ne se livrent pas non plus à une mise à mort et traitent confraternellement de ce conflit. J'ajoute qu'on en apprend plus sur l'état et le fonctionnement de la société française du moment en écoutant la session de M. Jean-Marc Morandini qu'avec la promotion des produits culturels par M. Augustin Trapenard qui n'intéressent que les Parisiens et les bobos. Il n'est même pas nécessaire de l'écouter, d'ailleurs. Il suffit d'être à l'écoute au moment de l'annonce du programme de la matinée. Il commence par les audiences de la veille à la TV avec quelques commentaires quantitatifs. Il détaille un programme qui pose question ( ce jour-là un reportage dans « Zone interdite » sur M6). C'est important les programmes de TV quand on sait le nombre d'heures passées par les Français devant leur petit écran. Forcément, ça façonne la manière d'être et de penser. Donc, c'est bien un indicateur de la société. Ce jour-là encore, dans la partie interactive, il demandera aux auditeurs de téléphoner pour donner leur opinion à propos de la durée des vacances en France. Intéressant avant le mois de mai qui compte beaucoup de jours fériés et va permettre, cette année, de longues pauses. Bien sûr, ceux qui vont appeler ne reflètent pas l'ensemble des Français mais il vont passer à l'antenne, on va les entendre, les approuver quand ils diront que oui, décidément, il y en a trop et qu'il faudrait que les Français travaillent plus. Sauf que, bien sûr, pour téléphoner à une radio en fin de matinée, il faut être à la maison... Au boulot les autres, moi je reste chez moi, bande de fainéants ! Instructif.

 

Revenons aux conflits à Radio-France. Mon opinion, après presque quatre semaines, c'est que le fond du problème, c'est la personnalité de M. Matthieu Gallet. Je rappelle qu'à l'annonce de sa nomination, Mme Pascale Clark avait à peine dissimulé son désappointement.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2014/02/28/29330823.html

Reflétait-il l'ensemble de la Maison de la Radio ? Sans doute mais pas pour les mêmes raisons. Justement, c'est là le problème. La situation a explosé, moins d'un an après la nomination du jeune PDG dont, finalement, personne ne voulait. Les révélations du Canard enchaîné ont paru dans la foulée mais ne sont pas à l'origine de la grève. On peut penser qu'il y a eu concomitance. Les révélations ont paru comme pour justifier la légitimité de la grève et la demande des grévistes de voir leur patron partir. Le Gouvernement a pris le train en marche, visiblement satisfait que celui qui n'avait pas sa faveur se trouve affaibli. La Ministre en a remis une couche, ce qui plaît à ceux qui soutiennent le mouvement mais qui montre sa totale méconnaissance du dossier. Il est vrai, encore une fois, qu'il est complexe. C'est un peu comme la manif du 11 janvier dernier.

http://www.la-croix.com/Actualite/France/Regis-Debray-L-esprit-du-11-janvier-etait-destine-a-ne-pas-survivre-2015-04-09-1300650

Affluence monstre mais chacun défilait pour des raisons très différentes et souvent contradictoires. Le plus intéressant, ce sont ceux qui n'adhèrent pas au mouvement. Il serait bon de savoir pourquoi. Officiellement (ce qu'on entend à l'antenne pour expliquer la grève), la mobilisation « porte sur les difficultés budgétaires et la défense de l'emploi ». En gros, l’État demande à Radio-France de faire plus et mieux avec toujours moins d'argent. À droite, on dit que c'est possible, à condition de dégraisser. La bonne vieille recette. Il est vrai que partout les grosses boites licencient tout en continuant à produire autant et en multipliant les profits. Là encore, il serait bon de s'interroger sur la fonction « travail » dans la société moderne. Bien sûr, l'heure n'est pas à la réflexion. Gageons qu'elle n'y sera jamais.

 

Le personnel, lui, veut continuer comme avant, comme si rien ne changeait dans l'audiovisuel et notamment dans la radio. Il se comporte comme ces personnes d'un certain âge qui voudraient que tout ce qu'elles ont connu reste comme avant mais que ça tienne. Une indication tellement forte que personne ne pense à la relever tant elle paraît aller de soi : tous ceux qu'on entend ne parlent jamais de projet sauf pour réclamer des plans qu'on aurait tout aussi bien pu proposer il y a dix, trente ou même cinquante ans. On entend toujours les mêmes formules. Parmi celles-ci, « la garantie de l'indépendance ». On parle, bien sûr, de l'indépendance vis à vis du pouvoir politique. Le problème, c'est que depuis longtemps, depuis au moins trente ans, ce n'est pas la tutelle ou le lien avec le « politique » qui obère les médias mais le pouvoir économique et la concentration. Tout comme du temps des « périphériques », il existe cinq ou six grands groupes qui possèdent tout ou une partie : canaux de communication, supports journaux, TV, radios, sites internet etc. Compte-tenu de la tradition française, cette pression passe bien auprès du grand public qui ne la discerne même pas. Elle est indolore. En revanche, qu'un commentateur dise du bien (même et surtout à raison) de tel aspect d'une proposition ou mesure politique et aussitôt on le soupçonnera d'allégeance à un parti politique. Personne ne trouve à redire des soi-disant essais automobiles de marques qui apportent chaque années des millions à tous les médias confondus. Une banque qui se dit encore « mutuelle » possède un groupe de presse qui a le monopole de l'information dans un large quart nord-est de la France. Personne n'y trouve à redire quand on fait semblant de s'effrayer des maigres subventions de l’État dans la cadre de l'aide à la presse écrite. C'est avec des personnes qui sont en retard d'au moins une guerre qu'il faut discuter de l'avenir de Radio-France. Or, on n'entend qu'elles. Si l'on poursuit dans la métaphore militaire, c'est comme si (et ça a été très longtemps le cas dans l'armée) l'on écoutait les militaires de réserve et les décideurs qui réclament qu'on construise plus d'AMX 30, avec les dernières modifications techniques (quand même), afin d'impressionner un éventuel envahisseur et préserver l'outil industriel en fournissant du travail aux usines d'armement. Et puis, ça fait chouette sur les Champs-Élysées les jours de défilé. Quelle vitrine pour la France !

À notre époque de l'image reine, paradoxalement, ce n'est pas la télévision qui a le plus changé. L'offre a plus que décuplé et les pratiques commerciales se sont imposées (voir la polémique entre 2 clubs de football professionnel et Canal+).

http://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Marseille-et-paris-boycottent-canal-plus/549979

http://www.eurosport.fr/football/ligue-1/2014-2015/ligue-1-les-5-questions-que-pose-le-boycott-de-canal-plus-par-le-psg-et-lom_sto4676085/story.shtml

http://www.huffingtonpost.fr/2015/04/12/boycott-canal-plus-psg-laurent-blanc-refus-coupe-ligue-bastia_n_7048956.html

La technologie a évolué, les récepteurs aussi (plus de technologie cathodique) mais le résultat n'a, pour ainsi dire, pas évolué : la télévision consolide sa position de média qui remplace tous les autres. Après, le contenu suit les goûts supposés du public. La radio connaît depuis trente ans une série d'évolutions d'autant plus remarquables que ce média semblait fini et que, quoi qu'il en soit, il ne fait pas parler de lui. Qu'on change le présentateur du journal de 13 heures sur une station ou de la matinale (nouvelle vitrine des radios), ça ne fait pas beaucoup de bruit. À peine en parle-t-on sur la station concernée. En revanche, le siège de présentateur du « 20 heures » à la TV est une affaire nationale. Pendant qu'on s'étrille sur les cravates de l'un, la servilité de l'autre, la coloration de cheveux d'une autre voire même la couleur de la peau d'un autre encore, la radio a évolué.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2013/02/22/26476272.html

D'abord, les années 1980 ont vu l'explosion des stations de radio avec l'autorisation d'émettre sur la modulation de fréquence. Première révolution tant les ondes ultra-courtes sont faciles d'utilisation. Ça n'est sûrement pas un hasard si M. Gallet entend mettre fin à l'émission en ondes moyennes et longues pour économiser. Wolinski dans l'ex Charlie-Hebdo avait bien croqué cette multiplication des « radios libres » et tous ses excès. Toujours sur la bande FM, on a assisté au glissement de radios jeunes ou associatives vers ce que Michel Jobert (ça nous rajeunit pas) appelait les « radio pognon ». NRJ en est l'exemple emblématique : petite structure proposant des musiques pour ados, devenue support de publicité favori et aujourd'hui groupe médiatique majeur. En 1984, NRJ a pu mobiliser les jeunes pour une manifestation monstre dans Paris pour exiger de pouvoir enfreindre la loi et émettre avec un émetteur sur-puissant qui écrasait la concurrence. On connaît la suite. Les autres, les associatives ont soit coulé, soit été éliminées en 1986/87 par la CNCL (« Commission Nationale de la Communication et d'autre chose » comme disait le Président Mitterrand) dont tous les membres (sauf 2) étaient de droite et se co-optaient entre eux. Ne restent donc que les radios commerciales qui proposent, de temps en temps, des émissions ou plutôt des disques à promouvoir pour le compte des « majors » de l'édition musicale, entre deux séquences publicitaires.

 

Les animateurs aussi ont évolué.

Justement, ça fait le lien avec un des points majeurs qui motivent la grève. On sait maintenant que les entreprises culturelles usent et abusent des intermittents. Ce matin (lundi 13 avril) encore, sur Inter, M. Louis Gallois citait l'exemple d'un employé de Radio-France qui a enchaîné 54 contrats en une année. Ça fait plus d'un par semaine. Il y a quelque chose à faire et il est plus que temps que le Gouvernement se saisisse de ce problème. On ne peut tolérer que des employeurs fassent travailler du personnel qualifié pendant un temps et laisse la collectivité (donc les cotisation des employés) régler les congés payés, le chômage et autres prestations sociales. Aucun artisan, aucun chef d'une petite entreprise ne pourrait se permettre une telle pratique.

D'un autre côté, on n'est plus au temps où un animateur effectuait sa carrière dans la même boite ou en changeait une ou deux fois. Si les Maurice Favières, Pierre Bouteiller, José Artur, Christian Morin, Claude Chebel, André Arnaud, Yves Mourousi, Philippe Bouvard, Jacques Chancel, Max Meynier (Salut l'artiste!), Gérard Klein, Fabrice, José Sacre, Jean-Pierre Foucault, Jacques Bal, Pierre Bellemare, Jean-Loup Lafont, Philippe Alexandre etc. restaient fidèles à leur employeur, la génération d'après a connu d'autres pratiques. Les Christophe Dechavanne, Arthur, Diffool, Pascale Clark, Laurent Ruquier, Guillaume Durand*, Alexandre Devoise, Marc-Olivier Fogiel, Nicolas Demorand ont écumé les principales stations. Rien que Pascale Clark, lors de sa fameuse sortie, en a cité une petite dizaine. Et elle s'en vantait, encore !

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2015/03/13/31696709.html

http://www.acrimed.org/article4604.html

http://www.village-justice.com/articles/Pascale-Clark-est-elle-Journaliste,19259.html

aussi, il va falloir repenser les choses. Il est bien évident que des émissions ont vocation à s'arrêter à la fin de la saison ou à changer d'horaire ou d'animateur. De là à ce que ça devienne un « mercato » comme dans le football professionnel, il y a un pas qu'il serait bon de ne pas franchir. De même qu'il serait temps de revenir à des commentaires plus sains quand une émission ou une chronique s'arrête et ne pas y voir une censure intolérable. Rappelons que c'était Michel Droit qui avait inauguré cette analyse, se plaignant lors de l'arrêt de sa chronique qui avait pourtant perduré pendant des années sans qu'il y trouve à redire quand les autres avaient disparu. Michel Droit ! Belle référence, en vérité. Il a fait des émules depuis mais surtout dans un bord diamétralement opposé au sien. Extraordinaire !

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/03/23/17332283.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/medias/p90-0.html

 

Autre changement dans la radio, les pratiques d'écoute. J'y avais consacré un article entier dès 2010. Je ne me suis pas réveillé le même jour que Mme Pellerin :

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/12/02/19770050.html

Bien sûr, il ne fait pas partie de ceux qui ont reçu le plus de visites. La réflexion sur le fond intéresse moins que les critiques à l'encontre de personnes nommées.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2013/08/14/27824192.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/10/14/19325552.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/01/17/16554106.html

Néanmoins, il demeure d'actualité.

Le passage au numérique a été un autre grand changement. La nouveauté de cette saison, c'est la généralisation de la vidéo. Outre qu'on peut suivre une émission sur son ordinateur, on peut désormais voir le plateau et, éventuellement, des documents visuels. Les « périphériques » en font des tonnes avec plusieurs caméras dans le studio – comme à la TV – quand Inter ne propose qu'un plan fixe. L'humoriste François Rollin avait dit ce qu'il fallait en penser

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2014/11/03/30883671.html

On n'est plus au temps où Claude Villers pouvait plaisanter en disant : « Je l'approche bien du micro pour que les auditeurs puissent le voir ». Et José Artur ne pourrait plus dire : « à la radio, nous avons réussi à supprimer l'image ». Non, dans une société de la « figure », même la radio, même l'écrit doit être accompagné de l'image. Le temps n'est plus où Le Monde rebutait avec son format berlinois et ses articles insérés les uns dans les autres sans une seule image. Dès le milieu des années 1970, il avait accompagné le mouvement et Libération accordait une grande place aux reportages et au cinéma.

Disons le, l'image n'apporte pas grand chose, comme l'a souligné notamment le chroniqueur, mais ce processus est irréversible. Ce qui faisait le mystère de la radio (je me demande à quoi il/elle peut bien ressembler) y a perdu. Il est vrai que RTL avait anticipé en placardant sur les murs les visages des vedettes de la télévision lorsqu'elles rejoignent la station de la rue Bayard, notamment après Mai 68 et l'éviction de pas mal de journalistes.

Justement, les « sages » du CSA ont fait preuve de professionnalisme en prenant acte de cette série de changements et en en prévoyant d'autres. Ils ont nom celui qui présentait un dossier de candidature qui les prenait en compte. MM. Jean-Paul Cluzel et Jean-Luc Hees ont été nommés, comme on faisait autrefois, en raison de leurs états de services et pour couronner des carrières. C'était dans la logique des choses, notamment pour M. Hees. Après avoir été directeur de la rédaction puis de France-Inter, il était logique qu'il devienne PDG de Radio-France. Seulement, l'un comme l'autre ont travaillé comme on travaillait autrefois, sans vision d'avenir. Ils se sont entourés de collaborateurs qui alignaient aussi leurs états de services et dont la promotion entrait dans la logique des choses et des syndicats. Avec M. Jean-Marie Cavada, on avait quelqu'un qui était un très grand professionnel et qui avait une vision d'avenir. Comme il l'avait dit une fois à l'antenne, il avait aussi pour mission de former une nouvelle génération de dirigeants. Ses successeurs n'ont pas cru bon s'en soucier ou très peu. Seulement, M. Cavada voulait passer de l'autre côté et s'est lancé dans la politique. Peut-être aussi voulait-il éviter l'affront d'un non renouvellement de son mandat présidentiel. Le bateau va à vau-l'eau depuis son départ.

 

M. Gallet a été nommé pour sa vision de l'avenir et pour ses qualités de gestionnaire à une époque où l'on doit compter le moindre sou et rendre des comptes. Les professionnels, eux, se voient volontiers comme des saltimbanques. Des saltimbanques qui sont bien payés et entendent le demeurer quoi qu'il arrive. Ils se méfient viscéralement des gestionnaires. Comme si ça ne suffisait pas, M. Gallet n'a probablement pas un bon contact avec ses subordonnés. Ça, ça passe encore plus mal et l'on a vite fait de se retrouver avec tous les syndicats, pour une fois unis, sur le dos. Quand, en plus d'une gestion rigoureuse, d'économies imposées, on arrive en suggérant qu'on va tout chambouler et qu'il faudra changer les habitudes de travail, on obtient le résultat actuel : quatre semaines de grève. Le personnel de Radio-France aura peut-être (probablement) la peau de M. Gallet afin de mettre à sa place quelqu'un qui ne pourra qu'avaliser le plan de licenciements (il pourra toujours prétendre qu'il a été décidé par M. Gallet) mais freinera les mutations et consolidera les habitudes. Ça plaira aux salariés les plus anciens qui voient mal leur métier changer à dix ans de la retraite ; ou plus maintenant que l'âge est repoussé. Avec le recul, on dira probablement que cette grève aura coûté un maximum de pognon. D'abord, une grève coûte à ceux qui la font. Elle coûte à l'entreprise qui préfère perdre de l'argent plutôt que céder et accorder un minimum de satisfaction à des récalcitrants. Elle va coûter encore plus si les stations de Radio-France s'installent un peu plus dans le ron-ron parisianiste actuel.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/09/29/22187176.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2012/04/26/24108398.html

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/09/14/19060609.html

Le temps n'est plus où un Michel Péricard (ancien directeur de France-Inter à la fin de l'ORTF) pouvait dire qu'une grève est un cadeau aux « périphériques ». Aujourd'hui, la concurrence fait rage. Il y a des dizaines de radios disponibles un peu partout et chacune capte un certain type d'auditeurs. On change peu, finalement. Ceux qui écoutent Radio-Classique ne vont pas passer sur Fun et inversement. Tout au plus va-t-on suivre un animateur qu'on aime bien ou, au contraire, changer quand l'animateur horripile. Ceux qui écoutent Europe 1 en ce moment ne voient pas la belle heure de réintégrer Inter. Ça aussi, c'est un changement. Autrefois, ils seraient restés et il aurait fallu les « reconquérir ». Le problème, c'est que beaucoup ne voient pas ces changements qui crèvent pourtant les yeux ou les oreilles. Comme il se fait progressivement, il passe inaperçu. Le temps n'est plus non plus où il fallait un break ID décoré aux couleurs de la station pour emporter tout le matériel nécessaire à la réalisation d'un reportage de 3 minutes. Comme aurait pu dire le Général De Gaulle, celui qui a inauguré la Maison de la Radio, on peut entretenir la nostalgie des ID (et surtout des DS) et, malgré les dénégations, celle de l'ORTF avec ses programmes prestigieux, ses dramatiques dont on parle encore, ses studios, ses radios sans publicité et déjà en modulation de fréquence. On peut aussi se rappeler le bon temps des ondes moyennes (appelées aussi PO), de l'émetteur d'Allouis qu'on cherchait avec la règle roulante sur le transistor, pour les grandes ondes ; autre exception française. Depuis, on a fait mieux un peu partout et le numérique va encore apporter d'autres changements. C'est pour cela que c'est plutôt bien vu de la part des membres du CSA d'avoir nommé un jeune PDG plutôt que d'offrir un siège présidentiel à un professionnel en fin de carrière. Malheureusement, les brontosaures qui tiennent les manettes un peu partout sont engoncés dans des schémas du 19ième siècle. Il en est de la fonction « travail » dans la société mondialisée et informatisée d'aujourd'hui, ainsi qu'il est fait allusion plus haut, comme de la radio. Finalement, nos dominants, nos décideurs, se comportent comme Rome, du temps de son apogée, qui ne voyait pas l'intérêt de développer les inventions d'Archimède quand ils avaient pléthore d'esclaves pour effectuer les besognes.

M. Gallet n'est sûrement pas aussi génial qu'Archimède mais les dominants d'aujourd'hui sont aussi bornés et arriérés que les Romains, qui excellaient surtout dans les réglementations. Bien sûr le conflit va bientôt s'achever. Tout le monde en a envie. Notons que le Gouvernement a bien tardé avant de nommer un médiateur, comme s'il se réjouissait du conflit. L'issue risque bien de faire perdre du temps à la radio de service public (puisqu'il est mal vu de dire « nationale ») et de la cantonner dans une sorte de radio officieuse, ennuyeuse, sans moyen malgré la part de publicité qui devrait s’accroître, et travaillant à l'ancienne avec des auditeurs vieillissants et nostalgiques.

 

 

*Pour compléter les transferts de journalistes, il convient de rappeler qu'au moment où les chaînes de télévision privées sont apparues, avec leurs capitaux considérables, elles ont débauché celle qui avait la réputation d'être la meilleure rédaction de l'audiovisuel : Europe 1. Les Robert Namias, Olivier de Rincquesen, Jean-Claude Dassier, Charles Villeneuve, Gérard Carreyrou, Étienne Mougeotte, Guillaume Durand et tant d'autres, ont franchi le pas. Ceux qui ont choisi la Cinq de Robert Hersant et de Silvio Berlusconi** en ont été pour leurs frais et obligés de trouver un autre employeur. Le mouvement était lancé et durablement. Ces grands noms ont fait du journalisme de radio une référence encore saluée par le public qui accorde sa confiance, de préférence à ce média mis de côté mais qui tient la barre. Certains, en haut-lieu, feraient bien d'en tenir compte.

http://www.la-croix.com/Culture/Medias/Barometre-2015-les-Francais-ont-davantage-confiance-dans-les-medias-2015-01-28-1274017

http://www.schoop.fr/sons/europe1.php

**Notons aussi que l'article de Wikipédia consacré à La Cinq minore le rôle de M. Berlusconi, qualifié à l'époque « d'ami du pouvoir socialiste » par la droite qui enrageait de n'avoir pas pu « libérer », selon sa terminologie, l'audiovisuel français de la tutelle de l’État (pouah!) et qui s'était fait devancer par le pouvoir mitterrandien.

Publicité
Publicité
Commentaires
la lanterne de diogène
Publicité
la lanterne de diogène
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 219 661
Newsletter
Publicité