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la lanterne de diogène
26 juin 2015

Kathleen Evin, puisqu'il le faut. (réponse)

Je ne pensais pas que le sujet intéresserait particulièrement surtout à la suite d'une remarque en passant.

Kathleen Evin est une des rares animatrices cultivées. De fait, elle connaît les sujets traités par ses invités et donne aux entretiens une hauteur à laquelle on n'est plus habitué. La génération des José Artur, Michel Bichebois, Pierre Bouteiller, Louis Bozon, Kriss, possédait le bagage culturel qu'ils n'étalaient pas mais nourrissait leurs plaisanteries, leurs bons mots, l'humour et le divertissement.

 

De nos jours, tout est séparé. On ne comprendrait pas qu'on puisse divertir avec des références culturelles. Il y a d'un côté les émissions à prétention culturelle, très parisiennes et très pédantes, d'un autre les humoristes, souvent peu instruits et encore moins cultivés qui répandent des vacheries sur des personnalités plus célèbres qu'eux et, enfin le divertissement à la limite de la vulgarité. Limite rarement franchie sur Inter soulignons-le mais le culturel en est exclu ou fait l'objet d'un temps à part. Il suffit de voir la page d'accueil d'Inter, le jour où j'ai commencé cette réponse, pour mesurer le niveau d'inculture qui prévaut dans tous les services : animation, information, toile.

On peut lire « statut quo ». La vidéo en question était en ligne depuis une semaine sans que personne n'ait rectifié. Sans même en appeler à l'origine de ce terme, on peut espérer que son sens courant est connu ainsi que son orthographe. (plus de détails sur http://www.franceinter.fr/emission-le-79-laurent-berger-refusons-le-statut-quo-et-proposons-des-solutions )

 

Le problème avec Kathleen Evin, c'est que son émission ne se renouvelle pas. Pour quoi faire, d'ailleurs puisqu'elle est reconduite systématiquement. Remarquons que la station ne communique jamais sur cette émission, particulièrement au moment de l'annonce des nouveaux programmes à la rentrée ; pas même pour signaler que les auditeurs la retrouveront. On n'en parle jamais. L'animatrice sait, dès la fin de la saison qu'elle reprendra du service « à la même heure » à la rentrée, quand les autres attendent les derniers ajustements et, parfois (de moins en moins), la surprise de l'été qu'on prolonge.

De son côté, Kathleen Evin ne prête aucune attention à ce qui se passe sur la chaîne qui l'emploie. Visiblement, le créneau qu'elle occupe est un dû qui ne saurait être disputé ou modifié. Elle ne cache jamais son mépris lorsque son émission doit céder la place à un événement genre concert exceptionnel. « On se retrouve lundi » ou « on se retrouve après-demain pour la dernière ». Ce qui peut se passer en attendant ne l'intéresse pas. Elle signale, encore moins que les autres, l'auteur des archives qu'elle passe et qui sont rarement des archives maison qui ne manquent pourtant pas. Faut-il rappeler que la tour de la Maison de la Radio abrite les archives ? Ça fait du volume !

 

Non seulement Kathleen Evin fait montre d'un mauvais esprit, d'un caractère imbu qui le dispute à la fatuité et à la pédanterie mais en plus, elle se sait inamovible et en profite. Reconnaissons à M. Schlessinger le mérite d'avoir dépoussiéré l'antenne mais Kathleen Evin demeure quoi qu'il arrive. Je ne dis pas que le dépoussiérage a toujours fait place à des émissions réussies mais il faut bien se renouveler et tenter de nouvelles formules de temps en temps. J'exprime assez souvent mon regret de ne plus entendre des émissions de création ni même des émissions où l'animateur se débrouille tout seul avec sa pile de disques et sa personnalité afin de faire passer un bon moment à l'auditeur. Néanmoins, on ne peut pas toujours faire la même chose. « Le Jeu des 1000 euros », a toujours évolué depuis son lancement. Depuis 13 ans, Kathleen Evin, sans jamais saluer ses auditeurs, annonce : « Ce soir, je reçois... ». Remarquons aussi que, contrairement à la sacro-sainte règle phobique du « tunnel » – c'est-à-dire de l'invité qui parle plus de 2 mn (je crois) sans interruption – elle laisse l'invité s'exprimer sans l'interrompre et c'est très bien. Ça montre bien qu'elle échappe à tout contrôle.

 

Alors, si je souhaite que Kathleen Evin raccroche et laisse la place à d'autres, pour faire autre chose, il me semble avoir pas mal de raisons. Son émission est un verrou incrochetable. Presque tous les autres ont bougé un tant soit peu. Rien que le journal de 13 heures, autrefois la vitrine de la rédaction, a changé très souvent depuis le départ d'Yves Mourousi fin 1974 et son « Inter Actualités-Magazine », puis le « 13-14 » de M. Elkabach et « Inter 13 » de Jean Lefèvre qui a pris la suite. Depuis la rentrée de 1981, ce journal a été, au gré de l'humeur des directeurs, des modes, rallongé, raccourci, à deux voix, avec des formules souvent éphémères pour se voir quasiment disparu depuis quelques années. Qui écoute un long journal à la mi-journée à la radio ? Évidemment. Jacques Chancel avait abandonné sa « Radioscopie » pour faire autre chose, assez semblable d'ailleurs. Il faut se dire que le créneau de 20 h à 21 h est bloqué tant que Kathleen Evin l'aura décidé. Impossible de lancer une grande émission de 20 h à 22 h, par exemple.

 

Quant à moi, mon blog est destiné avant tout à des amis que les vicissitudes de la vie ont éloignés. Je n'utilise pas un média généraliste et populaire qui doit s'efforcer de toucher le plus grand nombre. Je ne « reçois » pas, avec l'argent de la redevance, un invité pour mon plaisir en me disant que ça pourrait en intéresser aussi d'autres. Je propose une rubrique critique sur les médias avec un regard indépendant de toute chapelle, de toute idéologie, de tout esprit partisan et je suppose que ça fait du bien puisque, sans réseau, sans aucun moyen, mon blog est salué par des professionnels et d'anciens professionnels qui soulignent notamment le travail de mémoire effectué ici. Le succès de cette rubrique m'incite à la poursuivre et à l'étoffer.

Maintenant, chacun a bien le droit de préférer telle ou telle autre émission ou de la fuir.

 

Enfin, pour répondre à « la vanité et l'indigence » de mes propos, je laisse à Edmond Rostand les mots de la fin : « c'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! »

 

Pour la dernière de la saison , un bon édito, qu'on peut lire ou écouter. Sourions un peu quand elle évoque les « jeunes oreilles qui nous écoutent ce soir ».

 

http://www.franceinter.fr/emission-lhumeur-vagabonde-kathleen-evin-celebre-la-radio-en-compagnie-de-ses-reporteurs

 

http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1116993

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Commentaires
E
Merci Hélène, moi aussi je me régalais à l'écouter chaque soir et j'attendais ce moment culturel et passionnant avec impatience. Je regrette infiniment qu'elle ait quitté ce créneau horaire. <br /> <br /> Il me semble qu'au contraire ce qui caractérise KE c'est son habileté à relier. Sans doute sa manière à elle de travailler en allant du particulier vers l'universel, tout un art finalement. Un art d'ailleurs parfaitement maîtrisé où se rejoignent sensibilité et capacité d'analyse et expression. Souvent elle finit ses émissions en disant merci à tous et je vous remercie à mon tour de m'avoir donné l'occasion d'exprimer en simple auditrice ma reconnaissance pour ces heures de découvertes irremplaçables.
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H
Vous voilà exaucé "Diogène". L'émission prend fin en 2016. Vous semblez trop bien connaître les arcanes de cette radio pour en être étranger et ne pas avoir de compte(s) à régler. Je me trompe peut-être, dans ce cas-là pourquoi un blog destiné à vos amis, quand tant d'autres modes de communication sont à disposition. Votre analyse exhaustive est intéressante et vous avez raison, KE échappe mystérieusement à toute éviction. Elle bénéficie de protection, qui sait, et la seule que je lui connaisse porte un nom, outre du travail : le talent.
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H
Je ne retiendrai que vos compliments amplement mérités. Kathleen Evin, que je suis depuis des années, nous entraîne, sans explication, sur des chemins si peu empruntés et qui, humblement, élèvent notre réflexion. Sa culture, pour l'écouter fidèlement et attentivement, est vaste et elle sait rester elle-même, parfois distante et fuyant la médiocrité qui, ça n'a pu vous échapper, se généralise dans le Paf. Sa présence en cette seizième saison est un enchantement à chaque émission renouvelé et son absence sera une perte considérable pour ce qui fait, pour combien de temps encore ? la fierté du service public.
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