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la lanterne de diogène
15 décembre 2015

Après les régionales de 2015

On a déjà eu des élections lamentables, des élections dont le résultat désespérait, des simulacres, des numéros de cirque mais là, je crois que tous les records sont battus et qu'on a eu tout à la fois.

 

Déjà, la date avait de quoi dérouter. Un peu avant Noël, alors que le froid s'installe, que la campagne résonne de coups de fusils de chasse, il faut chausser ses bottes et aller voter. C'est pas le moment. La preuve, il n'y a pas eu de campagne (électorale) car les esprits étaient ailleurs. Les partis politiques eux-mêmes ne s'en préoccupaient que peu, tout aux prémices de la présidentielle. Seuls les sondages faisaient semblant d'alimenter la flamme qui ne montait pas beaucoup. Il faut bien que les instituts de sondages travaillent un peu. Alors, on a eu droit à « la montée du FN » et seulement à ça. Rien sur le fond. Rien sur la forme non plus. Tout pour le FN. On en a bouffé jusqu'à la nausée.

 

Comme si ça ne suffisait pas, les attentats sont venus nous arracher aux quelques velléités de s'intéresser un peu à nos candidats. Quel rapport ? Il n'y en a pas mais c'est bien la caractéristique de nos élections. Peu de gens savent pour quoi ou pour qui voter. La preuve nous est donnée par les sondages – encore eux – qui montrent que les présidentielles et les municipales sont les élections préférées des Français et que le maire est l'élu préféré des Français. On ne se demande jamais pourquoi. Ces élus sont « lisibles », compréhensibles. Ils sont les chefs que nos lointaines racines barbares nous font reconnaître comme tels. Chef de la tribu pour l'un, chef du village pour l'autre. Tandis que le député… il est plutôt vu comme celui qui vit dans l'opulence grâce aux impôts qu'on acquitte. Au mieux, c'est celui qu'on va voir pour faire accélérer un dossier oublié par l'administration. Ce qu'il fait le reste du temps ? On n'en sait trop rien. Ne parlons pas des sénateurs dont on a l'image d'un homme politique à la retraite mais qui continue à nous coûter. Alors, quand on parle des Conseils Généraux, devenus « Départementaux » (ceux qu'on va voir pour toucher un petit quelque chose quand on n'a plus rien) et plus encore des Conseils Régionaux, lointains, on n'en sait trop rien. Tout ce qu'on sait, c'est qu'on paie des impôts pour tout ça et qu'à la longue, ça commence à bien faire.

 

On ne peut pas dire que les partis politiques aident à comprendre. À chaque élection dite « intermédiaire », l'opposition appelle à sanctionner le Gouvernement. Quel rapport ? Aucun mais ceux qui se déplacent encore pour voter y sont sensibles. C'est pour ça que je dis, depuis longtemps, qu'il faudrait instituer un permis de voter. Pour l'obtenir, il suffirait de répondre à des questions simples relevant du programme d'éducations civique du collège. Simplement pour être sûr que, avant de voter, on sache pour quoi. Un Conseiller régional, en l'occurrence, ne décide pas de la politique nationale et ne va pas faire tomber le Gouvernement ni l'appuyer. Le Conseiller régional va s'occuper des domaines de la vie quotidienne dans sa Région et dont les contours sont décidés, entre autres, par les députés, précisément. Il est vrai aussi que, pour ajouter à la confusion, depuis 1982, date du véritable début de la régionalisation, les investissements brouillent les pistes. Prenons des travaux dans un lycée. Le panneau va nous informer fièrement : « Ici, la Région x. investit pour votre avenir ». Certes. S'ensuit la liste des entreprises qui y travaillent et finalement la liste de ceux qui paient. À côté du Conseil Régional dont c'est effectivement le ressort, on trouve, le Conseil Général, la Mairie de la commune où est implanté le lycée et même l’État dont on croyait qu'il n'était plus partie prenante sauf pour la pédagogie.

D'une manière générale, avant chaque investissement, quelque soit le niveau local, les élus vont aller pleurnicher auprès de tous les autres échelons et vont accorder des « subventions » pour des domaines dont ils n'ont pas la compétence. Tout est perverti.

 

Justement, à l'occasion de ces régionales et de la refonte des Régions, le Gouvernement a indiqué son intention de faire le ménage pour que chacun paie ce qui est de son ressort et pas pour les dépenses des autres. En a-t-on entendu parler ? Très peu. Pourtant, on ne peut pas se plaindre de payer des impôts et ne pas s'intéresser à ce qu'on en fait. Permis de voter, encore une fois !

De quoi a-t-on parlé alors. D'abord, on n'a pas parlé beaucoup. Ensuite, on a parlé, presque exclusivement du FN. Chacun s'est senti un peu « nordiste », presque « chti ». On voulait aller prêter main forte dans la nouvelle région Nord-Picardie. On a parlé un peu du sud, aussi. Le sud, c'est bon pour les vacances. Le reste du temps, on n'y comprend rien. Et puis, c'est loin de Paris où se trouvent ceux qui gagnent leur vie en commentant des sondages, des petites phrases, des dérapages, des vidéos prises par smartphone, des photos ratées. Eh oui, il y a des gens qui vivent de ça et plutôt bien. Le problème, c'est qu'à chaque fois, ils se gourent. Ils se gourent mais alors, en beauté ! Et à chaque fois, ils remettent ça. Et à chaque fois, une petite pirouette et ils font oublier qu'ils viennent, à l'instant, de se gourer. Ce sont les anti-Garcimore, cet illusionniste qui faisait semblant de rater ses tours mais qui les réussissait brillamment. Eux, font croire qu'ils réussissent alors qu'ils se trompent en permanence. Comme dirait Brassens, c'est devenu leur raison de vivre. Ils ne s'en privent pas et ils durent sur les plateaux de radio et de télévision depuis des décennies. Certains commentaient déjà du temps du Général De Gaulle…

 

Donc, comme d'hab, on avait annoncé le FN ravir une, deux, plusieurs régions peut-être. C'est le premier parti de France. Entre les deux tours, on a eu droit, comme souvent, aux vedettes politiques prendre des engagements destinés à entrer dans l'Histoire. Tu parles, Charles !

Tout ça n'était que de la bouille pour les chats (re Brassens) mais ça a occupé les antennes et les conversations. C'était à croire qu'il n'y avait pas eu d'attentats le mois dernier. C'était croire que les Français n'avaient pas d'autre préoccupation. C'est bien mal connaître les gens dont on sollicite les suffrages. Malgré tout, quelques abstentionnistes se sont déplacé au second tour pour « faire barrage à » (qui tu sais). Ont-ils fait la différence ? On ne le saura jamais car les commentateurs ont tout intérêt à se garder quelques biscuits pour la prochaine fois. Le fait est que le FN n'arrive pas à décrocher la timbale et qu'il est toujours trop court, quelque soit le mode de scrutin. Notons aussi ce paradoxe qui a vu des électeurs ne pas se déplacer au premier tour, par dégoût de la chose politique, parce qu'ils ne trouvaient pas de liste à leur convenance malgré le nombre mais qui se sont déplacés alors qu'il n'y avait plus qu'une liste et encore menée par des gens qu'ils débinent tout le temps. Ils se disaient dégoûtés de la politique et ont voté pour une liste déjà au premier tour (qu'ils ont donc boycotté) et soutenue par tous les candidats battus. La confusion est à son comble.

 

C'est à croire que les domaines sur lesquels les Conseils Régionaux ne sont pas importants et que rien ne l'est plus que d'avoir des élus FN. Les CR ont l'autorité (en partie du moins) sur les TER. C'est à croire que tout va bien, qu'il y en a en nombre et aux heures qui conviennent et qu'ils arrivent tous à l'heure. Que dire à ceux qui prennent les trains après 20 heures et qui ont peur de se faire agresser en rentrant chez eux ? Que leur dire alors que, passée cette peur, arrive celle de ne pas arriver à l'heure (encore une fois) ou même pas du tout ? Que dire à tous ceux qui voient leur train-train habituel se transformer en omnibus dans les secteurs très urbanisés parce qu'on a supprimé d'autres trains ce jour-là. Ils voient alors des voyageurs qu'ils ne croisent pas d'habitude et préféreraient ne pas croiser du tout. On n'a pas parlé des TER, donc tout va bien.

On n'a pas parlé non plus des hôpitaux qui suppriment des lits, des services. On veut tout regrouper au chef-lieu et en supprimer en chemin. Les urgences sont menacées partout après avoir vu les maternités fermer. On n'en a pas parlé. Les médecins libéraux vieillissent. Ils ne sont pas remplacés quand ils s'en vont alors que, quand ils se sont installés, ils espéraient céder leur clientèle à un jeune. Que dalle ! Dans la plupart des départements (et donc des régions), les déserts médicaux avancent. Délais plus longs pour les spécialistes, attentes insupportables aux urgences pour des maladies courantes. Faut pas être malade ! Faut pas être vieux non plus. Là, c'est la cata. Or, de nos jours, on est vieux presque la moitié de sa vie. On n'en a pas parlé. Tout va bien, donc.

Et les routes ? On nous avait dit que les Conseils Généraux étaient plus réactifs et plus à même d'entretenir les routes. Finies les Nationales : plus que des Départementales ! Eh bien, c'est la cata aussi. Au début, tout allait bien. On allait voir ce qu'on allait voir. La différence sauterait aux yeux. Les CG ont sous-traité avec des entreprises locales ou pas : location de véhicules légers, d'engins etc. Plutôt rapidement, la location s'est avérée plus coûteuse que l'entretien par la maison qui dispose du matériel et du personnel pour ça. Seulement, il fallait marquer les esprits. Aujourd'hui, ça coûte plus et c'est pas fait car y a plus de sous. Les caisses sont vides. Les CG fournissent les fonds pour alimenter l'aide sociale (RSA, AAH, MDPH etc. sans compter les aides à ceci ou cela). Avec la montée du chômage et de la précarité, ce poste représente plus de la moitié des dépenses des CG. Et avec ce qui reste, il faut payer ceux qui doivent gérer la pénurie et verser à temps à tous ces fainéants d'assistés. Faudrait qu'ils bossent ! Oui mais où ? Les entreprises locales ferment les unes après les autres. Autrefois, on savait où l'on allait travailler et y passer sa vie, puisqu'on pourrait se payer une baraque. Plus question aujourd'hui. Y a plus rien.

Ah si, y a les emplois de proximité ! Les CG s'en vantent. Une heure par ci pour démerder une vieille. Une heure par là pour faire bouffer pépère. Allez, vite, encore une heure pour aller chercher les chiards des autres et les faire goûter en attendant que maman rentre du boulot à l'autre bout du département. Ça fait 4 ou 5 heures par jour dans les meilleurs cas et pas payées lerche. On en n'a pas parlé non plus. Tout va bien.

 

Tout va bien et le spectacle va continuer. Prochain numéro, l'élection des présidents. Normalement, il ne devrait pas se passer grand-chose mais on fera comme si. Et qu'on entende, le même jour, l'un puis l'autre, puis un autre encore asséner ses bonnes intentions. Ensuite, à chaque fois, on ne manquera pas de tendre le micro aux élus du FN pour alimenter la pompe.

Toujours cette année, il faudra choisir un nom pour les nouvelles Régions. Ça va occuper du monde. Pendant ce temps, on ne s'occupera ni des TER, ni des hostos, du RSA, ni de l'état des routes. Et on va en entendre… et le Conseil d’État est bien capable de refuser certains noms. Après tout, ce sera pas la première fois. Déjà au début des années 1980, le Nord voulait se faire appeler « Hauts-de-France » trouvant que « nord » était connoté négativement. Comment s'intéresser à la politique régionale dans ces conditions ? Comment ne pas être dégoûté de la politique ?

« Nous avons compris le message ». Déjà en 1983, M. Jospin, alors premier secrétaire du PS l'avait dit, suite à la défaite aux cantonales. On connaît la suite.

Quand on voit le peu d'intérêt porté aux CG et l'image qu'on en a, on frémit en pensant aux Conseils Régionaux et à la façon dont les électeurs ont voté pour eux. Le CR, c'est loin et l'on ne sait pas bien à quoi ils servent. En plus, on peut pas dire qu'on nous l'a expliqué avant d'aller voter.

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