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la lanterne de diogène
20 novembre 2018

Radios généralistes : saison 2018-19 - 2e partie

Donc les résultats d’audience montrent une progression d’Inter et même de France-Culture. Faut-il en déduire que les Français deviennent plus cultivés ? Disons plutôt qu’il est plus difficile de trouver des radios sans publicité . Quoi qu’il en soit, dès le lendemain matin de la publication, Inter annonce avec tambours et trompettes que nous sommes 3, 9 millions à écouter « la première matinale de France ». Qu’est-ce que ce sera quand il y en aura 4 millions ! Soyons sûrs qu’au même moment, RTL triomphait aussi avec la matinale de la première radio de France. Pas sûr que tout le monde notera la différence.

Pas grand chose à dire sur Inter qui a connu des turbulences avec la démission du PDG de Radio-France cet été. PDG qui n’a jamais été vraiment accepté mais qui a eu le mérite d’attirer l’attention sur la révolution technologique qui induit de nouvelles pratiques d’écoute. Nous en avons parlé, il y a longtemps. Donc, changement d’indicatif puisque c’est l’habitude à chaque changement de direction. Visiblement, ça ne dérange pas plus les auditeurs d’Inter qui se piquent d’être un peu plus éduqués que les autres et peu attachés à ces détails. Autre changement, le départ à la retraite de la réalisatrice Michèle Soulier a dû rebattre les cases et la nouvelle grille nous propose des noms connus à la réalisation d’émissions où ils ne figuraient pas. Là non plus, ça n’intéresse pas l’auditeur moyen.

De nouvelles voix depuis la rentrée dont celle de M. Pierre Haski pour « Géopolitique ». Pourquoi faire appel à une personnalité extérieure alors qu’on avait l’habitude d’entendre M. Frédéric Ancel ou M. Antony Bellanger et que les commentaires de M. Luc Lemonnier, le chef de service, sont toujours pertinents ? Sa chronique a le mérite d’attirer l’attention sur des événements lointains mais sans véritable analyse originale et puis, M. Haski confond Batista et Somoza (10 oct. 2018). Bien sûr, il arrive de se gourer mais quand même, Cuba et le Nicaragua n’ont pas le même enjeu pour les É-U. C’est regrettable d’entendre des nouvelles voix venues d’ailleurs plutôt que des promotions internes. Le service politique a été complètement remanié mais force est de constater que ça n’est pas convaincant. Toujours pour l’info, retour des titres de l’édition de 13 h à 12 h 30 après une disparition d’environ 40 ans … Le journal de 13h n’est plus la vitrine d’une radio. Tout se joue dans la matinale et, dans une bien moindre mesure, entre 18 h et 20 h.

« Les Lumières dans la Nuit » était le gros morceau de la rentrée, la seule vraie nouveauté aussi. Ben, c’est pas terrible. Ça tient pas ses promesses. On a lu, ici ou là, sans doute parce que c’était dans le dossier de presse, que ça s’inscrivait dans la lignée du Pop Club de José Artur. D’abord, c’est pas sympa pour M. Goumarre et son NRV, à l’heure du Pop. Ensuite, on en est loin. Ça sent l’improvisation alors que tout est préparé. On ne croit pas un instant au coup de fil en direct, surtout si c’est un enfant qui appelle pour dire qu’il peut pas dormir. Un enfant n’écoute pas Inter ni la radio en général, même quand il n’arrive pas à s’endormir. S’il ne dort pas, soit il est devant sa console, soit devant la TV. Sur le principe, le concept n’est pas nouveau. Il y a quelques années, Raphaël Mezrahi proposait à peu près la même chose : il recevait des invités de passage dans son appartement mais ça marchait et l’on y croyait et c’était drôle.

Sinon, ça devient lassant de le répéter mais la matinale de M. Delvaux, les samedi-dimanche ne correspond pas du tout à ce qu’on attend de la radio ces jours-là, surtout à l’heure du petit-déjeuner en famille. Le pire reste l’entrevue avec un troisième couteau de la politique, un de ces « back-benchers » (comme on dit à Londres), rare homme politique disponible ces jours-là et trop heureux de se faire connaître un peu. Ce qu’il dit ne sera repris par personne et s’il diffère un peu de son parti, il sera facile de le faire oublier. Tout ça pour ça ? Si M. Delvaux tient absolument à nous montrer son talent dans une entrevue, qu’il fasse venir un intellectuel quelconque qui a une actualité ou qui peut apporter un éclairage sur l’actualité ; un peu comme le faisait M. Cohen le vendredi. En attendant, on a droit à une coupure publicitaire au milieu de l’entrevue avant de passer à la question du seul auditeur qui a daigné téléphoner. Quelle question originale à poser à un inconnu qui vient de débiter son catéchisme ? Toujours dans la matinale des samedi-dimanche, on arrive même plus à entendre une chanson en entier, on n’arrive même pas à entendre un morceau de musique classique quelque peu significatif pour accompagner la chronique de Mme Sigalevitch qui a vite dérivé vers l’actualité de l’opéra. Et malgré tout ça, ils terminent toujours en retard. Oh, jamais de beaucoup, 15 à 20 secondes en général mais il paraît que c’est grave et ils perdent encore de précieuses secondes pour commenter leur retard de 15 secondes désormais dépassées. Europe 1 fait pareil en insistant sur « la matinale-info » à l’heure où l’on est saturé d’info et qu’on voudrait oublier un peu le temps de la fin de la semaine.

 

 

Pas grand chose à dire, donc, sur la rentrée d’Inter puisque les auditeurs semblent gober sans rechigner la publicité qui fait maintenant partie de la vie normale à l’antenne. Ainsi, Mme Sonia Devilers, dans son émission consacrée aux médias, a rappelé l’introduction de la publicité à la télévision pour la première fois, il y a 50 ans. Les personnes présentes dans le studio ont pouffé de rire en entendant le style de l’époque. Ça fait toujours son petit effet d’entendre les vieilles réclames de la radio et les premières publicités à la TV : « On a toujours besoin de petits pois chez soi ». On avait oublié ce slogan qui a pourtant eu un succès considérable. Elle précise que l’introduction était limitée à 8 mn et ne concernait que la publicité pour une corporation et pas pour une marque. Comme les sourires persistaient autour d’elle, elle a cru bon ajouter qu’il n’y a pas si longtemps que c’était encore le cas sur Inter avant d’exprimer son mépris pour la pub collective.On entendait sa satisfaction d’entendre enfin des vraies pubs sur la radio dite de service public. En effet, on a droit aux promos sur les voitures, les meubles suédois et il faudrait dire que c’est un progrès ? C’est qu’elle appartient à une génération qui a toujours vécu avec la publicité omniprésente et, finalement, demande juste à ce qu’elles ne soient pas ringardes, selon ses critères. Il est bien évident que si les producteurs trouvent tout à fait bien et tout à fait moderne d’être interrompus par la pub de marques et les promotions commerciales, la voix des auditeurs a peu de chances d’être entendue. D’ailleurs, l’émission avec la médiatrice est édifiante. C’est à croire, et c’est peut-être vrai, que les auditeurs s’attachent à un mot de travers prononcé par un journaliste et s’accommodent parfaitement de cette gangrène qu’est la publicité.

 

solo_soro

Il y en a toujours mais forcément un grand regret dans la grille de cette année : la disparition de « L’Afrique enchantée ». Désormais, Soro Solo doit se contenter de deux rubriques, l’une dans l’émission cosmopolite de Mme Giulia Foïs, le samedi soir et l’autre, le lundi, dans le NRV de M. Goumarre.

 

Et puis, l’arrêt de la chronique de Frédéric Beigbeder devrait faire réfléchir. Voilà un type qui ne se la joue pas et qui a toujours eu le mérite de la franchise. Cette fois, suite à une énième chronique poussive, il jette l’éponge. Les autres devraient songer à en faire de même mais, surtout, la direction devrait renoncer à cette obstination à imposer des hâbleurs qui nous disent comment il convient de bien penser. Tous embauchés pour faire rire, pour faire office de soupape après la cocotte-minute de l’information, parfois lourde, ils ont vite dérivé vers la leçon de morale. Nous le citons à chaque fois mais c’est nécessaire : « N’oubliez jamais que ce qui est embêtant dans la morale, c’est que c’est toujours la morale des autres » signé Léo Ferré. Alors, leurs leçons qu’ils se les gardent !

 

Enfin, parlant de Léo Ferré, signalons une bizarrerie. Deux fois au cours de la première semaine d’octobre, Europe 1 et Inter invitent les mêmes artistes le même soir à quelques minutes d’intervalle D’abord, c’est Mme Émilie Mazoyer qui invite le chanteur Cali qui sort un disque de reprises de chansons de Léo Ferré. Par charité, nous n’insisterons pas sur le massacre mais il se trouvait dans les studio d’Europe 1 jusqu’à 21 h avant de rejoindre la Maison Ronde dès 22 h pour poursuivre le massacre chez Laurent Groumart. Samedi, encore plus fort. L’acteur Jean-Marc Barr termine la très bonne session d’information de M. Philippe Vandel un peu avant 20 h et le voilà qui, peu avant 20 h 10, se trouve dans l’émission de Mme Julia Foïs dont nous ne dirons jamais assez de bien. Comment a-t-il fait ? En fait, en écoutant attentivement, on comprend que son émission n’est jamais en direct. Donc, il doit y avoir des coupures, notamment au moment de déguster les plats préparés pendant les entrevues. Concernant le NRV, M. Goumarre, après avoir annoncé fièrement qu’il est en tête des audiences, toutes radios confondues, indique qu’on peut écouter son émission dès 18 h. Donc, non seulement elle n’est pas en direct mais, en plus, il incite à ne pas écouter sa consœur entre 18 h et 20 h mais lui-même. Nous avons, il y a quelques années, annoncé de nouvelles écoutes de la radio mais nous pouvons regretter qu’un plateau enregistré vraisemblablement dans l’après-midi ou selon la disponibilité de l’invité principal, n’offre pas la même atmosphère qu’un plateau nocturne. Même si l’on ne peut pas refaire le Pop Club – émission innovante à l’époque de sa création – on pourrait au moins espérer cette ambiance intimiste que permet la nuit. Malgré cette concurrence interne, Mme Fabienne Sintes annonce aussi qu’elle est en tête de toutes les radios pendant sa tranche horaire et c’est justice. Juste un mot pour saluer la chronique « Le monde à l’envers » de M. Jean-Marc Four, créateur de l’inoubliable « Et pourtant elle tourne », il y a quelques années et reprise après le départ du très parisianiste Philippe Val avec l’émission que nous connaissons aujourd’hui. En quelques minutes, celui qui occupe maintenant un poste de cadre à la direction de Radio-France, décrypte un événement et c’est drôlement salutaire.

 

Reste que si nous avons consacré de la place à Europe 1, c’est que la station a marqué profondément l’histoire des médias audiovisuels avec ses émissions innovantes et ses animateurs et ses journalistes dont on se souvient encore. La radio d’aujourd’hui n’innove plus. Tout n’est que la déclinaison de ce qu’avaient pu faire Europe n°1, donc ou Yves Mourousi qui présentait son journal parlé en dehors de son petit studio et en intercalant des variétés, de la culture de qualité entre les informations. En dehors des radios généralistes qui ronronnent, les autres proposent de la pub entrecoupée de musique, parfois de blagues à deux sous ou de grossièretés, et la parlote. Dans le genre on a le choix entre les communautés et les associations où règne le copinage. France Bleu excelle dans les anecdotes, les recettes de cuisine et les petites annonces. C’est la radio des femmes au foyer. Sans doute que les jeunes générations ne se précipitent plus sur leur radio (quelle que soit la manière de l’écouter) après les cours mais sur leurs smartphones pour voir qui leur a envoyé un texto. La radio n’est plus essentielle. Alors, c’est l’œuf et la poule. Est-ce parce que la radio est moins intéressante, paraît de plus en plus comme un support indigent, sans image (malgré les caméras dans les studios) avec peu de possibilités d’interagir, malgré les « tweets » ? Ou bien, est-ce que le public boude un support sans image et sans interaction ? Il est frappant de constater que les réseaux sociaux reprennent les vidéos des chroniques (dont celle de Constance) mais que le reste, si intéressant soit-il, passe à la trappe. La radio ne fait plus rêver.

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Commentaires
J
"La radio ne fait plus rêver."<br /> <br /> En tout cas, pas celle que tu décris... <br /> <br /> Hors l'heure que je consacre aux matinées (très matinales) de France-Culture (entre 5 et 7), je sélectionne des podcasts sur cette même chaîne. Le reste du temps, quand j'ai un moment, je me connecte sur une webradio américaine correspondant à mes goûts musicaux, qui diffuse de la musique en streaming entrecoupée de rares commentaires et flashes d'actu. <br /> <br /> L'univers que tu décris, et dont j'observe quelques bribes quand il m'arrive d'allumer ma télé, est franchement à des années-lumière de mes préoccupations et attentes. <br /> <br /> Je pense que quand on en a la possibilité, quand on est vraiment libre de le faire, il est bon de se distancier d'une mediasphère qui, du lointain de sa campagne, évoque les échos d'un lointain chaos dont on n'a que faire. <br /> <br /> En lire la description est par contre enrichissant, même si certains noms cités me sont et me resteront sans doute inconnus. <br /> <br /> Le rapport à la pub de nos contemporains, leur tolérance à ce fléau, je trouve cela saisissant... et tellemenrt symptomatique du désarroi du siècle...
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