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la lanterne de diogène
22 novembre 2018

Mémoire d'auditeur - réponse à Jérémy

Après avoir regretté que l’ami fidèle, Alain, ne veuille pas que son commentaire soit publié, et après avoir remanié celui de Jérémy avec qui nous partageons beaucoup de souvenirs – quoi que n’ayant pas vécu dans les mêmes sphères – voici mes propres souvenirs d’auditeur.

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Tout commence quand, tout petit, pour rien au monde, je n’aurais manqué Zappy Max sur notre poste à lampes. Aucun véritable souvenir de ce qu’il faisait mais sans doute le nom sonnait bien dans mes petites oreilles. Par la suite, c’est le transistor japonais reçu comme cadeau de mariage de mes parents qui a apporté « la magie des ondes » dont Claude Villers se moquait tant.

 

Claude Villers passait son temps à se moquer des traditions, des choses instituées. Il déclamait les poésies apprises au collèges (« Oh ! combien de marins, combien de capitaines ») et les chansons entrées dans le patrimoine comme « Village au fond de la vallée... » des Compagnons de la chanson. À l’époque, il était de bon ton de démolir les monuments comme Victor Hugo. On voit le résultat que ça donne dans l’Éducation nationale, enviée autrefois dans une bonne partie du monde et à la traîne aujourd'hui après les délires du pédagogisme, de la méthode globale et des classiques jetés aux orties. Il cassait tous les soir du sucre sur le dos de Jo Dona et son « Inter-Danse » qu’il présentait comme le symbole de la radio ringarde quand lui incarnait la modernité et le bon goût. Avec lui, on voyait poindre ce qu’on a appelé plus tard la pensée unique : un prêt à penser obligatoire. On passait beaucoup de chansons en anglais chez lui. Bernard Lenoir était dans l’équipe mais pas au micro sauf quand il faisait des incursions à RTL où il n’avait, bien sûr, pas le profil de l’antenne populaire. On passait les morceaux de Dominique Blanc-Francard, « le frère de l’autre » comme il disait ; l’autre étant son co-animateur prénommé Patrice. Aujourd’hui, ce serait impensable. Il y avait plusieurs rubriques dont « Yves Simon story ». Je ne me rappelle pas quand il avait remplacé les animateurs mais je me souviens d’Eddy Mitchell qui avait beaucoup de difficultés d’élocution. La radio, c’est pas comme la chanson. Eddy Mitchell tenait une rubrique consacrée au cinéma série B. Villers et Blanc-Francard le considéraient comme le rocker français contre Dick Rivers et, bien sûr, Johnny, caricaturé dans le « feuilleton » de « Pas de panique » où tous ceux qu’ils n’aimaient pas apparaissaient avec un pseudo à peine modifié pour y être ridiculisés, à commencer par leurs confrères de la station.

D’accord, ça changeait, ça me faisait découvrir plein de choses mais je ne comprenais pas tout. Néanmoins, je garde de bons souvenir. Curieusement, je me souviens du « musée de pas de panique » où j’ai entendu Rudy Irigoyen, au moins aussi bon que le chanceux Mariano et du « jazz de pas de panique » que Villers détestait mais qu’il concédait à PBF. Oserai-je rappeler un jeu de mots auquel je pense souvent ? Patrice Blanc-Francart venait de présenter un morceau de Charly Mingus quand Villers lui répond : « Parle à Mingus, ma tête est malade ».

En fait, ce qui m’avait captivé au cours de la toute première saison, c’était la série de reportages sur les OVNI par Jean-Claude Bourret, connu surtout, à l’époque pour la présentation des flashes du matin. Sceptique au début, il avait fini par conclure que le phénomène existe. C’est lui qui a popularisé les OVNI. Avant, on n’en parlait pas et les soucoupes volantes étaient des objets de BD ou de films de science-fiction.

Henri Gougaud intervenait de temps en temps, au gré des séries qui se renouvelaient. Lui aussi s’intéressait aux OVNI et avait cru trouver dans la Bible (Ezéchiel) le premier témoignage d’un rencontre du troisième type. Des années plus tard, il racontera des histoires face à Pierre Bellemare sur Europe 1 et, plus tard encore, aura son émission sur l’étrange avec Jacques Pradel « Ici l’ombre ». J’aimais bien quand Bellemare racontait « les aventuriers » mais j’avoue que les affaires criminelles, mêmes racontées par lui, sans détails sordides (Bellemare avait de la tenue et ne racolait pas), finissaient par mettre mal à l’aise. Force est de constater que les auditeurs ont davantage plébiscité les criminels et les policiers que les aventuriers. Jean-Pierre Cuny a rejoint l’équipe de Bellemare d’ailleurs, au point de lui succéder dans la présentation de « La Tête et les Jambes » où il n’était pas à sa place. Il a fini par être remplacé, d’abord par le co-producteur Jean-Paul Rouland puis par Philippe Gildas dont je découvrais le visage. Je n’avais jamais oublié sa voix et sa prestation dans le 6-9 de France-Inter.

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Finalement, je n’aimais pas tant que ça cette émission. Je préférais ce qu’il y avait avant, en lieu et place. Avant, tous les soirs, il y avait un programme différent qui a été balancé sur Inter-Variétés, la déclinaison en PO de France-Inter à la création de « Pas de panique ». Nicolas Hulot a débuté dans la rubrique « La poignée dans le coin » consacrée à la moto dont PBF était fan mais c’était déjà dans « Loup-Garou » et plus dans « Pas de panique ». J’ai adoré « Viva », l’été 1978 où le duo passait souvent « Airport » des Motors, groupe éphémère. Ensuite, ils ont fait émission à part. « Marche ou rêve » a été un monument que j’ai suivi épisodiquement. La vie étudiante avec ses cours, ses partiels et ses loisirs annexes est incompatible avec le suivi régulier de la radio et de la télévision. Je suis revenu à la radio mais suis resté éloigné de la TV.

 

Je déplore également la disparition des dramatiques (c’est comme qu’on disait avant) de l’antenne de France-Inter. Justement, encore au début des années 1970, il y avait le Théâtre de l’étrange le lundi soir, L’heure du mystère le mardi, le boulevard le vendredi. Entre temps, le mercredi soir, il y avait eu « La Tribune de l’Histoire ». Soient quatre dramatiques pendant la semaine parfois précédées par Gérard Sire et son « conte à rebours » ou José Artur et « Qu’il est doux de ne rien faire... ». Par la suite, « la Tribune » a subsisté le samedi soir avant de céder la place (quand Alain Decaux est entré au Gouvernement et qu’André Castellot n’a pas voulu continuer sans lui) à « Question pour l’Histoire ». Il faudrait faire une compilation des deux premières saisons de cette émission, alors reprise par Jean-François Chiappe. Tout y était désuet et même suranné. Il faut réaliser que cette émission passait à la fin des années 1980, donc. Heureusement, l’émission a été reprise par Claude Chebel devenu producteur et réalisateur avec la participation de Jean Favier, Marcel Julian et d’autres grandes signatures.

Tout au long de ces mêmes années 1980, il y avait aussi « Les Tréteaux de la nuit », de Patrice Galbeau et Jean-Jacques Vierne, le samedi à 22h, où les plus grands comédiens du moment participaient : Michel Serault, Claude Piéplu, Jean-Luc Bideau, Anny Duperey etc. Impensable aujourd'hui. Et puis, il faut bien constater que la dramatique qui subsiste, toujours dans l’émission d’Histoire de Stéphanie Duncan, sans doute par manque de moyens est très en dessous de ce qui est cité plus haut. Le scénario tente de placer les faits historiques à la va-comme-je-te-pousse, les ellipses sont narrées et les comédiens souvent pas bons.

 

 

J’ai indiqué à plusieurs reprises, ici, que celui qui m’a attaché au poste de radio, c’est Yves Mourousi. « Édition-on-on-on, treize heures-zeures-zeures » suivi du « Bonjour » qui est devenu sa signature. Il changeait beaucoup et l’indicatif était tantôt pop, tantôt martial. Yves Mourousi, c’était du journalisme rigoureux et, dans le magazine, un programme à lui tout seul. Yves Mourousi m’a fait aimer la radio et ses invités. Quelle joie, le jour où ma mère m’a montré sa photo dans un magazine ! Et quelle joie, plus tard, lorsque nous avons eu la télévision, et que je le voyais présenter Inter 3, le journal de la 3e chaîne qui venait juste d’être lancée. Je ne l’imaginais évidemment pas comme ça, avec un léger strabisme. C’était ça la magie de la radio, imaginer la tête du bonhomme qui parle et le studio. On savait qu’il y avait une vitre derrière laquelle se trouvait le réalisateur, deuxième nom cité au début et à la fin de l’émission.

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Quand on habitait Paris, qu’on ne sortait pas beaucoup, toutes ses émissions à l’extérieur étaient une ouverture extraordinaire. Même quand on ne connaissait pas l’ABC (ancien music-hall reconverti en cinéma dont YM a accompagné l’ouverture), la scène de l’Opéra (que je ne connaîtrai jamais), la Croisette (pour le Festival de Cannes et le Midem), le Palais des papes d’Avignon etc., c’était quelque chose ! Il me semblait que me parvenait le parfum de ces lieux inconnus. Yves Mourousi a tout inventé et si je garde une dent contre Fabrice Drouelle, c’est parce qu’un jour,, il a fait répéter trois fois à Gilles Jacob que c’était Yves Mourousi qui avait eu l’idée de la montée des marches à Cannes, tellement ça lui paraissait incongru. Yves Mourousi qui a aussi eu l'idée de l'arrivée du Tour de France sur les Champs et qu'on n'a même pas évoqué pour le centenaire...C’est là que j’ai compris qu’on dézingue les anciens et les pionniers dans les écoles de journalisme et que Mourousi n’est plus connu que pour avoir interrogé Mitterrand « une fesse sur le coin du bureau ». C’est le mot « fesse » qui est important dans l’affaire…

 

 

Aiguisé par les pages du Quid consacrées aux médias, avec quelques publicités, j’ai cherché à découvrir sur le transistor que je m’étais fait offrir, les radios plus lointaines. Adolescent, j’écoutais de préférence le hit-parade de RTL pour ne pas être en reste vis à vis de mes camarades. Je restais pour « Poste restante » de Jean-Bernard Hebey et j’ai même révisé le BEPC en écoutant « Les routiers sont sympas ». On captait pas RMC ni Sud-Radio à Paris mais, de temps en temps, sans doute quand le temps était dégagé, on pouvait choper quelques bribes. Plus tard, je me suis fait offrir un poste pour les ondes courtes (OC) qui me permettait d’avoir la BBC.

Malgré tout, au gré de mes déplacements, j’ai quand même connu José Sacre, Jean-Pierre Foucault, Guy Vial, Carole Chabrier et Zappy Max, le midi... Enfin, je le retrouvais ! Ce qui m’étonnait, c’était que ces animateurs intervenaient plusieurs fois dans la journée. J’ai pu aussi entendre Jacques Bal sur Sud-Radio après avoir quitté France-Inter. Je me souviens aussi de l’accord passé entre RTL et RMC pour que les auditeurs du nord puissent entendre un peu la radio du sud et inversement. Ça concernait surtout « Les routiers sont sympas », privés de leur Max dès qu’ils s’aventuraient dans les Maures et l’Estérel. Ça me paraissait tellement lointain tout ça...

C’était encore la grande époque de RMC à laquelle Jérémy fait allusion, ce ton familier et familial. Dès le début des années 1980, la chaîne monégasque se portait mal et ce n’est pas avec Simon Monceau, ni avec Claude Villers à sa tête, parisiens en diable, qu’elle a pu se relever. On ne s’improvise pas patron d’un grand média (ni même d’un petit). RMC a connu un sursaut quand Hervé Bourges, débarqué de TF 1 par Bouygues, en a pris la direction. C’est lui qui avait embauché Yves Mourousi, débarqué plus tard pour cause d’audience en baisse. Hervé Bourges se souvenait des avertissements et conseils d’Yves Mourousi quand il était son patron. Il faut bien reconnaître qu’il a fallu attendre l’époque de la reprise par NextRadioTV d’Alain Weill et sa transformation en station d’info continue pour imposer la station durablement. Bien sûr, il ne reste rien de la radio soleil qui est plutôt l’affaire de France-Bleu Provence de nos jours.

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Un mot sur Jean Sas, découvert à la télévision quand Guy Lux avait en charge les dimanches après-midi, présentés par Jean-Pierre Foucault dont je découvrais, enfin, le visage. Avec Jean Sas, on sentait qu’il y avait quelque chose de nouveau, du jamais vu. Peu après, il a été embauché sur France-Inter dans « Sas dit, Sas fait ». Disons que le « charablabla » amusait jusqu’à ce qu’on se rende compte que, la plupart des gens, nos semblables, n’écoutent pas les questions et répondent n’importe comment. L’humain est ainsi fait qu’il n’aime pas voir sa médiocrité exposée au grand jour. Je crois qu’il est retourné sur RMC avant de finir sur France-Bleu.

 

RMC comme radio a souffert de paradoxes. Radio périphérique, elle n’a jamais eu ni la taille, ni les moyens, ni l’envie de concurrencer les trois autres radios généralistes. Il aurait fallu qu’elle se contente d’être une radio locale mais son patrimoine, son prestige, notamment au Moyen-Orient, ne pouvaient pas la cantonner dans ce rôle. Avec l’émergence des radios FM dans les années 1980, la situation est devenue intenable. Les expériences, les erreurs de stratégie, l’embauche des renvoyés des médias nationaux n’ont pas redressé la barre. Curieusement, Sud-Radio, à l’ouest, a mieux négocié le virage de la bande FM avec des ambitions plus modestes et, finalement, une présence bien au-delà de sa zone d’influence historique.

 

C’est aussi à cette époque que je suivais dans L’Aurore, journal qui traînait à la maison, les infos sur les émissions de radio et où j’espérais voir la photo d’Yves Mourousi. La rubrique était tenue par Madeleine Loisel qui a, par la suite, dirigé un de ces petits magazines de télévision vendus dans les magasins populaires. Elle a quitté le bateau dès qu’Hersant a mis la main dessus. Madeleine Loisel est aussi celle qui a fait débuter Pierre Desproges dans ce quotidien. Ah, dès qu’on cite Desproges, ça change tout. Sans ça, elle aurait été une vague collaboratrice d’un journal de droite disparu.

 

Nous z’aussi nous écoutions la radio scolaire. Si je me souviens bien, c’était le mardi après-midi que l’instituteur sortait un poste de l’armoire fermée à clé et le branchait. Nous reprenions les chansons et apprenions les paroles. Il y avait aussi cette initiation à la musique classique. C’est comme ça que je connais l’histoire du « Casse-noisette » et de la « valse des flocons » et encore « La marche des rois » suivie de « la danse du cheval fou ». Très surpris de voir ce dernier morceau connu uniquement sous le titre générique de « farandole ». Ça, c’était de Bizet, bien sûr, mais pas sûr que ça m’ait marqué à l’époque. Comme visiblement, nous avons le même age, voici quelques titres de chansons apprises à l’époque : « Feu de bois », « La troïka » (de « Lieutenant Kijé ») , « la Truite », « Chloen », « Les marins de Groix ». Impensable aujourd’hui !

 

J’ai aussi écouté la radio avec un écouteur unique dans l’oreille, quand je faisais mon service militaire et montais la garde. Il aurait pas fallu que je me fasse choper car j’aurais eu droit au trou. Il y avait beaucoup de gardes en Allemagne et une proximité géographique avec RTL et Europe 1 et ma taille ne m’a pas permis de faire le stage de conducteur de char à Carpiane où j’aurais pu, enfin, écouter RMC.

 

Alors, c’est bien de rendre hommage aux voix chères qui se sont tues et de se dire que c’était mieux avant. Cette radio dépeinte dans ces deux articles était une radio à taille humaine qui apportait un peu de joie dans les foyers modestes. S’il y a toujours des foyers modestes, ce n’est plus la cible des radios, toutes commerciales aujourd’hui, qui cherchent à faire dépenser l’argent de ceux qui en ont. Et puis, les générations actives ne veulent plus se contenter de petites joie Mathieu Gallet a eu le mérite de comprendre qu’il faut une cohérence entre le contenu et le contenant. Impensable, aujourd'hui, de ne pas voir la tête de ceux qui parlent dans le poste. D’ailleurs, il y a moins de postes et donc l’attente est différente. Le petit écouteur relié au smartphone a remplacé les enceintes des tuners des années 1970 et 1980 qui avaient remplacé le petit transistor avec sa grosse pile carrée, Leclanché, Wonder ou Mazda. Autant de marques disparues ou reprises pour d’autres usages. L’humoriste Chris Esquerre, qui remplace au pied levé le faux mondain Beigbeder, a tout de suite exprimé son dédain pour la vidéo. Nous avons dit à plusieurs reprises qu’il n’y aucun intérêt à voir quelqu’un lire son petit papier, tête baissée, pendant 2 mn ou 3 mn avec des rires forcés en fond sonore. Le fait est que les animateurs de radio, qui interviennent tous à la TV par ailleurs, s’adressent aux auditeurs comme à des téléspectateurs. La technique a anéanti la magie de la radio et l’imagination qu’elle aiguise et fait marcher. La radio, comme les autres médias audiovisuels, s’adresse à des consommateurs qui font partie des 80 % d’une classe d’age à avoir obtenu le bac et maîtrisent les nouvelles technologies.

 

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Commentaires
J
OK ! admettons qu'Anne Gaillard, issue du sérail, ou bénéficiant des faveurs de celui-ci (ce qui revient au même), ait proposé un concept-témoin d'un monde en train de changer et qui n'allait plus cesser de changer, sous l'impulsion de Giscard et malgré lui (la crise économique et sociétale que nous connaissons, qui remonte en gros à 1975, avec la mouvance de 68 comme basse continue, phénomène plus profond que les évènements en eux-mêmes, allaient sacrément reformater un pays encore ivre des embruns des Trente glorieuses... ). <br /> <br /> <br /> <br /> Je te l'ai confessé par ailleurs Diogène, d'Anne Gaillard je garde un souvenir confus et par rebond, comme d'Annick Beauchamp et même de Ruggieri dont je suivais plus tard les émissions consacrées à la musique classique. Kathleen Evin ne m'a pas spécialement marqué. <br /> <br /> <br /> <br /> Sinon, quoi de neuf question concepts d'émissions ? Je ne suis plus assez auditeur et trop téléspectateur hyper-occasionnel pour en avoir une idée. J'ai des échos ici et là de concepts extrapolés d'autres archi-éprouvés, qui semblent tourner autour d'un animateur-vedette comme une dictature n'existe que tant que le dictateur n'est pas déboulonné (là je suis méchant !).<br /> <br /> <br /> <br /> Il me semble exister une espèce de culte de la personnalité autour d'individus tels que Laurent Ruquier et Cyril Hanouna, il me paraît que chaque chose qu'ils puissent dire ou faire ait la capacité de commander aux éléments. De même que des types comme Christophe Barbier et Michel Onfray me semblent exercer une fonction de gourous. Omniscients, ils ont leur idée sur toute chose et sont invités à la communiquer à leurs fidèles qui s'en nourrissent goulûment. Dotés d'ubiquité, ils peuvent en même temps se produire in-extenso devant les caméras et écrire des tonnes de bouquins. Chaque époque fabrique ses démiurges. Nos prédécesseurs ont eu Cohn-Bendit, qu'on entend encore s'exprimer comme un baba-cool sur les ondes de France-Culture, dans "L'Esprit Public", cette émission par ailleurs excellente dont son initiateur, Philippe Meyer, a été éjecté, probablement après certains propos qu'il a tenus à l'antenne au moment de l'affaire Fillon, mais disons qu'on a pu trouver un motif plus acceptable à son remplacement par la douce Emilie Aubry. Ainsi procède t-on dans notre pays des libertés (à géométrie variable, les libertés). <br /> <br /> Cohn-Bendit donc, gourou de 68 alors assimilé à quelque obscure idéologie de gauche radicale (trotskisme ? maoïsme ?) qui n'a jamais provoqué que les lendemains chantants de ceux qui s'en réclamaient, Cohn-Bendit converti depuis à un capitalisme qu'il prétend libertaire, négateur d'un passé de pédophile pour lequel il n'a jamais eu à répondre devant aucun juge, et qui jacasse à tue et à toi entre l'anachronique grand-messe diffusée par France-Culture et la chronique gastronomique hebdomadaire, Cohn-Bendit invitant les Gilets Jaunes à créer une liste aux z'Européennes, comme s'il n'avait pas compris que ce qui structure ce mouvement est un dégoût affirmé de la politique et des politiciens. Non, en fait, il n'en a rien compris. Il s'écoute jacasser à tue et à toi, en bon gourou qu'il serait temps de coller à la retraite. <br /> <br /> <br /> <br /> La "parité" observée dans les media : plus une mode je dirais, qu'une concession. La question ne devrait même jamais avoir eu à être posée, d'après moi, en ce qu'il existe des femmes et des hommes depuis plus longtemps que nous tenons sur deux pattes - la preuve en est que nous sommes là pour en parler ! <br /> <br /> <br /> <br /> Question connexe, qui continue à être posée, celle du rapport des personnalités publiques, élu(e)s, figures médiatiques, journalistes, à la représentativité du tissu social d'un pays métissé de longue date, où les Noirs ne sont pas apparus récemment dans un bidonville de Calais, où l'immigration nord-africaine date de bien avant la Guerre d'Algérie, où des Asiatiques étaient présents sur notre territoire bien avant qu'il existe des boat-peoples, diversité qui ne porte pas seulement sur l'origine exotique et la couleur de la peau mais sur l'héritage culturel que constitue un accent. Jean-Michel Apathique est (à ma connaissance) le seul à qui soit reconnu le droit de s'exprimer dans les media avec un accent. <br /> <br /> <br /> <br /> Ce que nombre de gens ne savent pas, lorsqu'ils se moquent de l'accent québécois, c'est que ce parler, plus qu'un accent, est la survivance de la langue française telle qu'elle était parlée au XVème siècle, du temps de Jacques Cartier, du moins dans la partie nord du pays. Dans le sud on s'exprimait en occitan et lorsqu'on le faisait en français, on roulait les "r" comme les vieux le font encore dans le Béarn. Nos rois issus des Bourbon maniaient un accent tonique et roulaient les "r", Napoléon s'exprimait avec un accent corse qui aujourd'hui ferait rigoler tous les pinzutti, le cinéma est totalement passé à côté de pareils détails, qui avaient pourtant leur importance. Notre langue a longtemps été parlée comme le font aujourd'hui les Québécois et les Américains de Louisiane, en éclipsant certaines syllables, avec des tournures de phrase et des expressions idiomatiques issues du vieux français. Le français aujourd'hui parlé, qui nous a été enseigné, est pour ainsi dire une langue dénaturée, coupée de ses racines linguistiques, culturelles. Il n'est qu'à voir l'accueil réservé par Méluche, il y a quelques semaines, aux questions d'une journaliste qui s'exprimait avec l'accent de Toulouse, pour mesurer à quel point nos élites, fussent-elles autoproclamées, sont ignorantes des réalités du terrain... <br /> <br /> <br /> <br /> Donc, un paysage médiatique décoloré ou à peine (Nagui et Rachid Ahrab ont longtemps servi de caution - de concession ? - de la "communauté" beur, Harry Roselmack était le "Noir de service" et le talentueux Omar Sy était cantonné à une rubriquette comique sur Canal, qui l'a heureusement lancé vers le destin à la Will Smith qu'il mérite amplement), qui s'exprime sans accent ou admis lorsqu'il s'agit d'une institution vivante faisant fonction de penseur-pour-les-autres, ou alors d'un exotisme érotisé (le mannequin d'origine brésilienne qui donne dans le "magnifaïque"), où seules certaines diversités sexuelles sont admises (sous la pression du lobby gay) quand les diversités de genre présumées assumées sont exhibées comme des attractions de foire (la "femme à barbe" de l'Eurovision). Peu de gros, à part Pierre Ménès, pas de "grosse" à ma connaissance, par contre beaucoup de visages de cadavres domestiqués aux bouches de tanches parmi les dames et demoiselles que je vois de temps en temps officier sur les télés d'infox-en-continu lorsqu'en visite chez des tiers, l'écran est allumé sur la mise en scène permanente des déchirements du siècle. <br /> <br /> <br /> <br /> De notre temps, Diogène, Claude-Jean Philippe et Michèle Cotta pouvaient se permettre d'arborer une denture noircie de nicotine. Aujourd'hui, d'aucuns saisiraient le médiateur de service pour protester du mauvais exemple donné aux d'jeuns.
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L
Il est vrai que, sur France-Inter, pas mal de grands noms sont issus de cooptations et de relations. Le résultat n’est pas forcément désastreux, au contraire. Anne Gaillard bénéficiait de cet appui mais elle a présenté un véritable projet innovant avec « Inter Femmes » qui se proposait de répondre aux questions des auditrices (et des auditeurs : « Bienvenue dans Inter Femmes, monsieur ! ») pendant une heure et demi avant de passer à l’antenne les questions les plus significatives. Le succès a été tel qu’au bout de deux ou trois saisons, elle a disposé d’une heure et seule aux commandes. En effet, la première saison, elle était cornaquée par le regretté Claude Chebel. C’était le début de la parole aux femmes et des émissions qu’on n’appelait pas encore « interactives » et encore moins « Inter-active ». Les femmes à la radio n’étaient pas nombreuses. Ariane Gil était catastrophique dans la matinale. Elle a poursuivi une carrière de productrice à la télévision jusqu’à sa retraite. Dans la rédaction, il y en avait quelques unes dont Sophie Dumoulin et, bien sûr, Annick Beauchamp, la talentueuse Madame Inter. <br /> <br /> Il a fallu attendre la présidence de M. Giscard d’Estaing pour que ça change. Il a ordonné que les femmes soient visibles ou audibles (on dit « écoutable » aujourd'hui) et, donc, ont été promues celles qui étaient déjà dans la place. Michel Cotta était consternante au service politique avant de bénéficier de bien meilleures promotions sous Mitterrand : PDG de Radio-France et présidente de la Ototo (Haute-Autorité de l’Audiovisuel). Il fallait aussi une émission animée par des femmes ? Eve Ruggieri, assistante de José Artur s’est vue confier les commandes, avec Liliane Bordoni, des « Panthères » : « Eve et Liliane avec vous jusqu’à 16 h ». Bon, ça cassait pas trois pattes à un canard mais ça se laissait écouter. Heureux temps où les animateurs et, donc, les animatrices, pouvaient tenir l’antenne pendant deux heures sans inviter personne et sans bavardage. Quatre ans plus tard, une campagne de promotion sans précédent pour la radio de l’État a mis en orbite Eve Ruggieri et elle a fait la carrière que nous savons. Personnellement, je n’ai jamais été conquis par ce qu’elle faisait, que ce soit les émissions ordinaires tournées vers le féminisme, les biographies de personnages historiques (« C’est une séductrice ! » ou « C’est un séducteur ! ») et encore moins la musique. Remplaçant Michel Drucker les après-midi à la télévision, les entrevues étaient consternantes et sa façon de présenter les concerts au ras des pâquerettes. Dans ce métier, il faut surtout avoir de l’aplomb. Les auditeurs (les humains en général) aiment avoir affaire à quelqu’un qui a de l’assurance même s’il n’y a pas grand-chose à proposer. Plus récemment, j’ai dénoncé plusieurs fois la permanence de Kathleen Évin, protégée elle aussi. Elle se fiche éperdument de ce qui se fait ailleurs sur sa chaîne. Elle parle. Elle s’entretient avec « mon invité ». « Nous nous retrouvons jeudi parce que demain, il n’y a pas d’émission ». Elle a toujours considéré que le micro est un dû et elle s’y accroche tel Elkabach. <br /> <br /> <br /> <br /> De nos jours, il est tout à fait inutile de distinguer les femmes dans les médias audiovisuels. Elles sont à égalité avec leurs homologues masculins et c’est très bien ainsi. Malgré tout, il faut quand même constater que quelques unes doivent leur place parce qu’il faut absolument afficher un semblant de parité. On a donc des animatrices à la voix éraillée par le tabac ou connaissant à peine leur sujet mais bon, il fallait leur faire de la place surtout dans un milieu misogyne. <br /> <br /> J’ai pu voir une vidéo passée sur France-Télévision après le sac (et pas le « saccage ») de l’Arc de Triomphe. Sur un ton ferme, n’appelant aucune réplique, inutilement dramatique, la reportrice fait état de la destruction d’une « Marianne », symbole de la République. Comme d’hab, tous les autres ont repris l’info (que j’ai entendue sur Inter et ailleurs). Inculture crasse qui fait prendre n’importe quelle figure féminine coiffée d’un bonnet (d’un bonnet comment au fait ? Phrygien ? Le savait-elle?) pour Marianne. Bien sûr, il s’agissait du « Départ des volontaires » autrement appelé « la Marseillaise », réplique en plâtre (pas de quoi en faire un drame) du groupe le plus célèbre de haut-relief de Rude. C’est aussi comme ça que s’écrit l’Histoire. Faut-il rappeler que, sous la colère et la mauvaise foi, Thierry Roland avait attribué la défaite des Verts de Saint-Étienne à des poteaux carrés. Encore aujourd'hui, c’est la vérité officielle.
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J
Comme je le souligne assez souvent dans nos échanges, Diogène, admettons que du temps a passé et qu'il continue de passer. Des tas de gens nous entourent, pour qui le nom d'Anne Gaillard a autant de sens que ceux de Léon Zitrone, Marcel Fort, Louis Bozon, Lucien Jeunesse, André Torrent. Ceux de notre génération (moi en tout cas), ne voyaient-il pas comme des fossiles vivants les Pierre Dumayet, Jacqueline Joubert et autres Jacques Chabannes ? Encore ceux-ci continuaient-ils à officier à l'écran du temps où je bavais ma Blédine sur une chaise surélevée équipée d'un boulier. D'où le souvenir que j'en garde, parce que la nature m'a doté d'une bonne mémoire. Mais depuis disons trente ans, le tempo s'est accéléré et le processus de fossilisation commence de plus en plus tôt. Pour un jeune de vingt ans, l'animateur Difool de Skyrock, transfuge de Fun Radio, est un survivant du Magdalénien. Je ne pense pas que ce soit bien ou mal, c'est ainsi, c'est comme ça, à nous de nous y faire. La mémoire qui est la nôtre est appelée à s'effacer pour qu'une autre lui succède, et ainsi de suite. Vois le peu d'échos qu'a suscité le décès de Bernardo Bertolucci, mort ces jours-ci à l'âge de 77 ans. Non pas à 98 ou 105 ans mais 77 ans. Ce qui de nos jours peut encore être considéré comme jeune. Ce qui nous le rend terriblement contemporain. Plus que John Ford et Mankiewicz, qui appartenaient comme Hitchcock à un monde révolu, voué à la muséification.<br /> <br /> <br /> <br /> Après on peut légitimement se demander si, indépendamment de ses qualités professionnelles, Anne Gaillard aurait disposé d'un micro si elle n'avait pas été l'épouse du directeur de cabinet d'Edgar Faure. Si elle avait été une "simple" fille d'ouvriers montée à Paris. Une "petite fille de français moyens". On sait la vieille propension des media français à recruter en vase clos, à manier la cooptation, système féodal ponctuellement dénoncé et toujours en vigueur. Dans nos campagnes, encore aujourd'hui, on veille à ce que le fiston qui héritera du patrimoine familial n'aille pas frayer avec une fille qui n'a pour elle que sa beauté et sa plastique (et le contraire). Persistance d'une culture ancestrale ou souci de ne pas dévier d'une ligne politique/économique/culturelle donnée ? lorsque ces pratiques s'appliquent aux media... La question reste ouverte. <br /> <br /> <br /> <br /> Pivot entre dans cette logique. Il fait partie pour moi des types qui, comme Jack Lang, Frédéric Mitterrand et leur digne héritier Stéphane Bern (que je vois promis à un avenir de ministre de la Culture sans avoir besoin d'une boule de cristal) ont rendu et rendent les pires services à la cause qu'ils prétendent défendre (et qu'ils sont grassement payés pour défendre). <br /> <br /> <br /> <br /> Le premier, bien nommé, s'est fait le chantre de ce dont il avait décrété que c'était de la littérature. Qui passait par Pivot était inévitablement écrivain, penseur, auteur. C'était souvent vrai mais pas toujours suffisant pour envisager une oeuvre, quelque chose qui marque son époque d'une empreinte indélébile. On continue à parler de Céline malgré les polémiques quand, talentueux ou pas, Nathalie Sarraute, Claude du même nom, Catherine Paysan, Benoite Groult, Louis Nucera ont sombré dans l'oubli et Laclavetine, Quignard ne sont connus que d'un public d'initiés créchant autour du XVIème arrondissement ou dans les bleds colonisés par les bobos du Luberon, de l'Ardèche et du Quercy. Mais ils publiaient et publient chez Galligrasseuil et consorts. <br /> <br /> <br /> <br /> Tu m'objecteras que s'il fallait considérer la littérature contemporaine à l'aune de ses écritures majeures, on n'aurait besoin que d'une émission littéraire par an où il serait question des mêmes plumes, toutes mortes et enterrées depuis des lustres. <br /> <br /> Le problème avec Pivot c'était que n'avaient droit de cité chez lui que ce qui était publié par les majors de l'édition. Et que ne sévissaient chez lui que les figures en vue. Qu'il a contribué ainsi que d'autres (PPDA notamment) à asseoir une politique culturelle franco-française centrée sur une poignée de figures absolument pas représentatives de ce qu'était la littérature, du temps d'Apostrophes et de sa revue Lire, et de la façon dont elle a évolué par la suite hors du cercle fermé des majors parisiennes de l'édition et de leur satellite arlésien Actes Sud. <br /> <br /> <br /> <br /> Tu étends cette logique à la culture au sens large et tu obtiens cette fameuse "exception culturelle" dont Djack Lang était le promoteur enthousiaste, "exception" qui ne concernait jamais qu'une toute petite élite élevée dans un même vivier pétant dans la soie. Une "culture" de réseau où il convenait que l'artiste fût dûment encarté, portât de préférence un nom ayant déjà servi, fût l'hôte régulier des media d'Etat et périphériques et de leurs producteurs assermentés et accessoirement, de la villa Médicis, qui fut longtemps aux mains d'un certain Frédéric Mitterrand. Une "culture" de "lieux" établis en province, mais dont étaient exclus les artistes et créateurs locaux ne sachant pas réseauter comme il le faut, les sans-nom tenus à l'écart de ces "lieux" qui étaient comme des nonciatures où les élus de l'"exception culturelle" venaient rencontrer un public facilement acquis au gré des innombrables promos radio-télévisuelles dont ils bénéficiaient. <br /> <br /> <br /> <br /> C'est ainsi qu'on bousille une culture et qu'on la livre sur un plateau d'argent aux sirènes de l'acculturation. Il se passait des choses chez des petits éditeurs de province et des revues artisanales pendant que Pivot survendait du Galligrasseuil, des ciné-clubs de MJC projetaient des courts-métrages non-subventionnés tandis qu'on faisait la promo des films de Leos Karax promis à l'oubli, des artistes ignorés des prélats de l'art contemporain exposaient leurs oeuvres dans des petites galeries et autres "non-lieux" de petites villes tandis qu'on emballait un pont parisien et assurait la promo de bûchettes peintes en noir et en blanc dans la cour du Louvre, le mouvement hip-hop traçait sa route dans des "posse" clandestins pendant que le top 50 fourguait sa daube. <br /> <br /> <br /> <br /> L'internet et les réseaux sociaux ont heureusement changé la donne, même si nos media franco-français continuent de fonctionner en vase clos. Les talents qui se produisent librement sur le Net, toutes disciplines confondues, n'auront peut-être jamais droit de cité dans les media franco-français, ils ne seront peut-être jamais admis parmi les figures de ce qu'il faut bien se résoudre à appeler "notre culture officielle", mais ils contribueront, par le mécanisme impitoyable de fossilisation décrit plus haut, à précipiter dans un salutaire oubli, et avant ça, dans les judicieuces marges du ringardisme, les élus de ce que fut "l'exception culturelle". Mais à quel prix ? Celui de l'acculturation. Les artistes qui émergent et émergeront du bouillon de culture numérique sont et seront internationaux. Bénéficient de la reconnaissance et des capitaux de pros résidant nulle part et partout. On aura Zaz encore pendant quelques années, qui anonnera de la "chanson française" dûment estampillée, et X, qui produit de l'électro depuis son bled paumé de Corrèze, qui sera produit par Y qui réside à Hong-Kong ou Dubai, et qui se produira à Amsterdam, Pekin, Mumbai, Oulambator, Baton-Rouge, Montreal et peut-être un jour à Paris, ironie du sort....
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L
Beaucoup de noms que je ne connais même pas et je me rends compte au long de cet échange que, finalement, je n’ai regardé la TV attentivement qu’une poignée d’années, au cours des années 1970. <br /> <br /> <br /> <br /> Nous évoquons Anne Gaillard mais qui d’autre s’en souvient. Elle a rejoint la cohorte de personnalités qui ne survivent qu’avec deux ou trois idées reçues qu’il est vain de combattre tant elles sont ancrées et ont obtenu de le statut de vérités absolues. J’en reviens toujours à Rabelais que j’ai encore la naïveté (à ce stade c’est de la bêtise) de citer dans des réunions publiques sous le regard consterné de mon auditoire. Entre ceux qui pensent (façon de parler) qu’il est absurde de le citer et ceux qui sont persuadés que je me trompe d’auteur, je fais l’unanimité contre moi. Ah si, une fois, Jean-Marie Pelt est venu à mon secours. Immense Jean-Marie Pelt, savant, sans prétention et humaniste à la façon d’un Rabelais, justement. Donc, Anne Gaillard garde l’image d’une hystérique (pour rester poli), complètement à la ramasse et, partant ridicule objet de moqueries légitimes. <br /> <br /> <br /> <br /> Comme disait Albert Camus, (je cite de mémoire), pour vivre en société, il faut accepter de s’entendre apprendre des choses qu’on sait déjà par des gens qui ne les savent pas. Hors sujet mais ça n’est pas grave (et je fais ce que je veux sur mon blog), l’Afrique. Après mon premier voyage en Afrique de l’ouest, chaque fois que je racontais ce que j’ai vu, vécu, les témoignages rapportés etc., on me disait que c’était n’importe quoi et que les Africains meurent de faim et qu’il n’y a rien d’autre à ajouter. <br /> <br /> <br /> <br /> J’ai dû voir une fois les émissions de Bouvard le samedi soir. En revanche, j’écoutais (quand il n’y avait pas école) son « RTL non-stop » l’après-midi qui était une émission de variétés plutôt variée et, un peu plus tard, son émission de variétés le vendredi en soirée, la première saison d’Antenne 2. C’est au cours de cette même première saison qu’a débuté « Apostrophes » et quantité d’émissions instructives qui commençaient à 21h 30… Heureuse époque où l’on pouvait se cultiver à une heure raisonnable ; et c’était comme ça sur les deux autre chaînes. On reconnaît aujourd'hui qu’Apostrophes n’était pas si regardée que ça mais il ne faut pas non plus foncer dans le cliché désormais présenté comme vérité absolue selon lequel l’émission était confidentielle. Il suffisait de se trouver dans une libraire (ça existait encore) un samedi, pour entendre des clients réclamer le livre de « vous savez bien, celui qui était à Apostrophes hier soir et qui avait une tête comme ça ». On avait là un embryon de culture à la portée de presque tous. En tout cas, on en parlait au lycée…<br /> <br /> Par la suite, j’ai aussi décroché d’Apostrophes et n’ai pas vu la prestation de Bukowski. C’était devenu un show où Bernard Pivot faisait son numéro. Surtout, je détestais son obsession à faire avouer aux auteurs que tel personnage de leur bouquin, c’était eux. Quelle importance ? Je me souviens de ces invités et de lui même, jambes croisées, chaussettes largement apparentes (caricaturées par Pétillon et par tant d’autres) avec ses lunettes de lecture sur le bout du nez, assumant le ridicule pour la cause littéraire et sûr de sa notoriété. Dans le bouquin de l’écrivain interrogé, il y avait des petits bouts de papier qui correspondait aux pages qu’il citait. Passées les premières saisons, c’étaient toujours des citation graveleuses. Est-ce que c’était ça qui faisait vendre ? Toujours est-il qu’il faisait vendre des livres mais pas forcément aimer la littérature. <br /> <br /> <br /> <br /> Je regrette la disparition de ces émissions de vulgarisation sur les chaînes généralistes. Maintenant, chaque communauté, chaque tranche d’age, chaque niveau d’instruction a sa chaîne, au moins une. Surtout, je déplore que, au contraire de ce qui existe un peu partout dans le monde et notamment en Europe, il n’y ait quasiment jamais eu d’émission de vulgarisation scientifique. On en avait confié une à Laurent Broomhead mais le grand public a horreur des personnes qui sont visiblement supérieures à la moyenne. Il était érudit et il ne pouvait pas le cacher. Ça agaçait. <br /> <br /> <br /> <br /> J’ai aussi le problème de l’abonnement à l’Internet. Non, je ne veux pas l’option TV ! Je regarde le foot quand il y a la Coupe du Monde et je le revendique. Le reste du temps, ça ne me passionne pas mais je ne méprise pas non plus ceux qui sont fans. Les FAI se battent pour avoir l’exclusivité des championnats étrangers, oui, bon… Dans ce blog, j’ai évoqué l’heureuse époque où les matches étaient retransmis en Eurovision. Autrement dit, il y avait une coopération entre les chaînes des différents pays pour offrir les images d’événements lointains. Cette notion de coopération est farouchement combattue par l’UE qui ne jure que par « la concurrence libre et non-faussée ». C’est comme ça que celui qui plante ses caméras dans un stade revend très cher ses images et que les passionnés doivent raquer pour voir des buts. Et à chaque fois, on monte d’un cran : nom commercial accolé au nom du championnat, nom commercial accolé au nom du stade, publicité incrustée sur l’écran pendant la partie, publicité à chaque apport technique (ralenti, mesures, vitesse de la balle, possession du ballon etc.). Triste de constater que, comme Rabelais indissociable des beuveries, l’Eurovision n’est plus qu’un concours de ce qui se fait de pire dans la chanson. <br /> <br /> L’Eurovision, c’était l’Europe qu’on aimait, celle qui nous faisait découvrir que nos voisins étaient nos semblables et qu’il n’y avait aucune raison de ne pas être en paix avec eux. L’Eurovision a plus fait pour l’unité européenne et l’amitié entre les peuples que la CEE, devenue UE pour le plus grand malheur de ses membres. Aujourd'hui, le mot même provoque le dégoût et le rejet.
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J
Comme quoi, malgré elle, Anne Gaillard avait trouvé la recette infaillible de l'audimat ! La preuve, on en parle encore après toutes ces années. Le concept a été pas mal imité. Des débats tournant à l'affrontement, il y en a eu dans les formats que je fréquentais à ces lointaines époques qui, mouvance de 68 oblige, se prêtaient aux joutes oratoires où le ton montait jusqu'à la sortie d'un des challengers, quand l'émission n'était pas carrément interrompue. Notamment chez Polac, où je me disais que si j'avais été le producteur de l'émission, j'aurais fait installer un ring sur le plateau. J'ai très vite lâché ce "Droit de réponse" en forme de dialogue de gueulards (pour le peu que j'en aie vu). A contrario, je ne ratais jamais les soirées de Bouvard, "Samedi soir", "Le dessus du panier" dont je prisais les décadentes confrontations de dandies excentriques, Dali (une de mes idoles), Sapritch, Chazot, Fernand Legros... Sur un autre registre, "L'avenir du futur" de Robert Clarke était de mes rendez-vous favoris, comme le "Grand Echiquier" évoqué par ailleurs et "Musiques au coeur" d'Eve Ruggieri, malgré le maniérisme crispant de cette dernière. "Les Dossiers de l'Ecran" étaient, selon le sujet, ma permission de onze heures quand j'étais écolier, puis collégien. <br /> <br /> D'"Apostrophes", émission chiantissime qu'il était de bon ton de prétendre avoir suivie (alors qu'ainsi que toute émission littéraire, à force de plans-séquence interminables sur le nombril d'un n'écrivain dûment agréé par la nébuleuse éditoriale parisienne, elle semblait surtout viser à dégoûter de la lecture...) je garde le seul souvenir du passage de Bukowski ( https://vimeo.com/112695637 ), son petit numéro de poète maudit importé de la riante Californie, concession qu'il avait faite à reculons à son éditeur français, lui qui ne tenait pas notre pays dans sa plus haute estime. L'histoire du canif que Hank aurait brandi en coulisses, colportée par on ne sait qui, démentie par Linda Lee sa compagne, qui était loin d'être une allumée, a meublé quelques colonnes bien pensantes le temps de passer à autre chose. <br /> <br /> Il y a eu aussi la fameuse prise de têtes entre Béart et Gainsbourg période Gainsbarre ( https://www.dailymotion.com/video/x1qwr03#tab_embed ), ce type qu'on a trop vite qualifié de génie, qui pompait ses mélodies chez les classiques et qui doit à d'autres les orchestrations de ses standards ( https://www.telerama.fr/musique/l-art-d-etre-gainsbourg,34766.php ... reconnaissons-lui tout de même un remarquable talent d'écriture), Gainsbarre, auquel s'identifiaient certains clodos de l'époque, affrontant l'angélique Béart au long d'un débat sans issue. <br /> <br /> <br /> <br /> Tu évoques les Dimanches-Martin... concept repris ensuite par Drucker, qu'un certain Delarue raillait sur le mode "une idée neuve tous les dix ans". Surtout lui ! qui toute sa carrière a décliné le même concept. <br /> <br /> Avant ou après la rengaine de "La lorgnette", Martin avait lancé d'autres tubes inoubliables : "La pêche aux moules" ( https://youtu.be/pMYd-Ax3xZc ) et "Mademoiselle Angèle" que, tu t'en souviens peut-être, il avait réussi à convaincre Anthony Quinn soi-même de se prêter au jeu d'en réciter les paroles lors d'une fausse interview ( https://youtu.be/kXnhs6aYCOo ). <br /> <br /> Il y avait des bonnes idées, pas toujours mais quelquefois ( https://youtu.be/Iczrsh0rB2o ), on se marrait bien sous le niveau de la ceinture mais quand on aime se marrer, comme on dit, peu importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse. Même si on percevait des tensions en arrière-plan, tensions qui devenaient quelquefois palpables, jusqu'au schisme qui a conduit Piem, Bonte et un autre à rompre avec le gourou pour se produire à la même heure sur FR3 ( la soupière...) en reprenant le concept satirique... sans succès durable. <br /> <br /> Pour ceux de ma génération, marquée par les séries américaines glamour, la parenthèse martinesque était un mal nécessaire avant d'accéder à la félicité des "Drôles de dames". Ensuite, c'était l'exil vers le monde réel, un café, des filles, un flipper, un juke-box dûment squatté où les standards de la soul, de la pop et du rock de l'époque tournaient en boucle. Suivre ce guignol ventru tout le dimanche et reprendre le licol le soir après les actus et le tunnel de pubes de rigueur, autant nous demander, à mes potes et à moi, tous autant boutonneux et fâchés avec les élites du siècle, de nous taper le répertoire de Mireille Mathieu. <br /> <br /> Le pire c'est que dix ans plus loin, Jacques Martin était encore là. Même heure, même adresse, comme disait Claude Villers. <br /> <br /> <br /> <br /> En 1987, Claude Chabrol avait dépeint l'univers d'un personnage dont le remarquable Philippe Noiret, qui en était l'interprète, n'a pas caché qu'il lui avait été probablement inspiré par le susnommé. <br /> <br /> https://youtu.be/wlSV9yJX7RE<br /> <br /> https://youtu.be/ikMNhH07Cvw<br /> <br /> <br /> <br /> Par contre, aucun souvenir des dimanches sous Guy Lux et Foucault... Lequel a trouvé ensuite son créneau dans le concept facile (et archi éculé) du one-man-show-promo-variétoche où ont excellé les Guy Lux et Drucker déjà cités, les Maritie et Gilbert Carpentier puis à leur suite les Patrick Sébastien, Dechavanne, Sabatier et autres Risoli. Comme ce n'est pas du tout ma tasse de thé et que par conséquent, je ne connais pas le sujet, je te passe le relais. <br /> <br /> <br /> <br /> La télé, je m'en suis débarrassé dans le courant des années 90 pour n'en récupérer une que ces derniers temps, format A3 amplement suffisant, que j'allume quand j'y pense, jamais très longtemps. J'ai eu un mal fou à convaincre le commercial de mon FAI que d'une, je n'avais pas (alors) la télé, de deux, que je n'avais que faire d'un bouquet d'un millier de chaînes dont le dixième de franco-anglo-italophones (les seules langues que je comprenne et pratique à l'occasion, chaînes dont je peux visionner certains programmes sur internet), de trois, que non, je me fous d'avoir l'exclu de matches de foot et de challenges sportifs qui m'indiffèrent, de quatre, qu'une journée comportant vingt-quatre heures et pas plus, dont j'emploie les deux tiers à autre chose qu'à rester collé devant un écran (par exemple cuisiner, faire des courses, jardiner, bouquiner, me balader, faire de la musique, m'occuper de mes chats, dormir, draguer, etc...), je n'avais besoin que d'une box, le net étant mon outil de travail. Comme je vis éloigné des préoccupations familiales (je vis en vieux garçon), ce que je connais de la télé actuelle tient surtout aux échos rapportés par celles et ceux qui, dans mon entourage, en sont plus assidus. C'est vrai qu'échappant ainsi au lavage de cerveau collectif, tu passes vite pour un extra-terrestre, du seul fait déjà que tu as pris la vieille habitude de penser par toi-même. Parallèlement s'instaure une barrière linguistique. On me parle de "The Voice", je pense à Sinatra. On me cite des noms dont je ne sais s'ils se rapportent à des animateurs, des journalistes ou des footeux. J'ai découvert il y a peu de temps (et j'aurais pu très agréablement me passer de cette découverte) qui étaient Zemmour et Nauleau. Et j'ai été sidéré d'apercevoir Elkabbach sur un plateau, lors d'un zapping qui doit remonter à la semaine passée ou à peine plus. Elkabbach que très honnêtement je croyais mort depuis des années. Comme j'ai du mal à croire que Duhamel sévisse encore à l'antenne, de même que Jean-Michel Apathique dont il me semble bien que j'entendais déjà ses homélies du temps où j'écumais les pharmaciens pour soigner un acné tenace.
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la lanterne de diogène
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