Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la lanterne de diogène
25 décembre 2018

Livres, service militaire, chroniques - Réponses à Jérémy

Je suis ému et fasciné de voir combien un bon bouquin apporte de satisfaction aux autodidactes que je connais. Dès qu’ils ont un moment, ils s’emparent de l’objet, choisissent un emplacement où s’asseoir et reprennent leur lecture. Rien d’autre, alors ne compte plus. Moi qui ai tant de mal à en faire autant, malgré les apparences et ce qu’on pourrait croire. Je lis beaucoup mais surtout des articles dans les revues et, depuis que ça existe, sur l’Internet. Mouna Aguigui se prétendait vélo-didacte car il ne se déplaçait qu’à vélo.

Je fais partie de ces « chômeurs luxueux » dont tu parles ou plutôt, pas vraiment luxueux. Peut-être, en effet, est-ce la linguistique qui condamne à ce funeste destin. Ils ne sont pas si rares les diplômés au chômage, contrairement à ce qu’on entend partout, statistiques à l’appui. D’après des employeurs potentiels, il existe nombre d’intellectuels qui n’arrivent pas à faire valoir leurs compétences et qui sont à l’affût de boulot dans des librairies-papeteries, des galeries d’art, des remplacements de profs déprimés, d’employés dans des musées locaux et temporaires et autres emplois en catégorie C de la fonction publique territoriale, où ils côtoient des personnes qui n’ont que le permis de conduire mais qui passent rapidement B+ pour les récompenser d’avoir bien emmerdé les administrés croyant trouver dans le service public la réponse à leurs attentes légitimes. Les diplômés au chômage ont des diplômes qui soit n’intéressent personne ou dont aucun employeur n’a les moyens de s’adjoindre un collaborateur supplémentaire, soit des titulaires d’un diplôme généraliste à l’heure où l’on recherche la formation très spécialisée. D’un autre côté, la spécialisation à tout prix condamne à n’exercer qu’une seule tâche.

Je fais partie de ce qu’on commence à appeler la « lumpenintelligentsia ». Parfois, en entendant un sans-abri, on se rend compte qu’il a un bagage artistique ou intellectuel qui partout lui ferme les portes.

 

 

Quand on parle de brassage social et, notamment, pour évoquer l’ancien service militaire, on pense toujours aux petits bourgeois qui côtoyaient les fils de prolos voire la racaille. L’inverse était vraie et, perso, si j’ai pu côtoyer des manuels, il y avait aussi quelques sursitaires, avec déjà qq années d’études et dont la conversation était passionnante. Cependant, dans toutes les catégories, il y avait des cons parfaits dont la compagnie était insupportable, intellos ou manuels. Le pire, c’est quand l’un d’entre eux avait de l’influence sur les autres et pourrissait l’atmosphère du groupe. Gare à ceux qui ne suivaient pas !

IMG_0003 (2)

Le brassage n’allait pas forcément de soi. En fait, on se retrouvait avec ses semblables. Le tri se faisait rapidement, dès les deux ou trois premiers jours. Les titulaires d’un CAP se mettaient ensemble et ne se mélangeaient pas avec ceux qui avaient tout raté, qui savaient rien faire, qui comprenaient rien. Les bacheliers restaient plutôt entre eux et ceux qui avaient commencé des études avaient effectué le stage EOR et arboraient un petit galon intermittent qui leur ouvrait les portes du mess et allégeait quelque peu leur peine d’avoir à subir cette connerie de service militaire où l’on n’apprenait même pas le minimum pour défendre ses concitoyens. Les générations précédentes nous faisaient payer la chance que nous avions de ne pas avoir à faire la guerre en nous en imposant quelques contraintes. Bien peu étaient comme mon camarade Mémesne qui profitaient de la situation pour observer leurs semblables et essayer de comprendre la société car, il ne faut pas s’imaginer que l’armée était un monde à part. Dans un sens oui, mais ses membres représentaient justement la société telle qu’elle est et pas telle qu’elle devrait être. Sans le regard des voisins et des amis, de la famille, de la petite amie, l’homme montrait sa véritable nature, généralement égoïste au plus haut point, prêt à trahir pour avoir un petit avantage, mobilisant toute son énergie dans des stratégies de dissimulation et d’évitement. J’ai eu la chance de faire partie d’un contingent hétérogène, au contraire du contingent d’étudiants ou du contingent formé d’illettrés ou presque et, pas forcément le plus sympa. Ainsi, je buvais des bières avec des mecs vraiment bien, certains complexés de n’avoir pas réussi à l’école et d’autres attendant l’occasion de faire mieux. J’ai eu beaucoup de chance de me trouver dans ce groupe (= 12 hommes, équivalent d’une chambrée) solidaire malgré quelques inimitiés et surtout pas dupe quand un gradé tentait de faire porter la responsabilité d’une brimade sur le dos de l’un d’entre nous (souvent moi). J’ai eu la chance de renouer avec Philippe, à l’occasion d’un passage dans les Ardennes au moment de l’éclipse de 1999 et je pense toujours à Serge, Italien de la grande communauté de Villerupt, colosse au grand cœur dont l’autorité naturelle a souvent réglé des litiges. Il n’a jamais fait usage de sa force même quand il a été provoqué. Serge qui répétait qu’il n’avait pas réussi à l’école et que c’était pas pour réussir à l’armée mais qui ouvrait des yeux émerveillés quand l’un de nous lui a prêté un livre d’œuvres de Dalí. Et puis, Pasquale, engagé, et qui n’a jamais voulu dire pourquoi il se faisait chier mais on devinait un drame personnel et l’armée le brimait car elle ne veut pas qu’on profite d’elle. Un chef, sensible, qui noyait une rupture amoureuse dans l’alcool et que les autres méprisaient quand il donnait le spectacle de son éthylisme. Je l’ai côtoyé, parfois, à l’occasion d’un transport quelconque dans une autre caserne ou à la division, à l’autre bout de la ville. J’ai pu l’apprécier et, comme me disait Serge (dont la fonction lui avait permis de connaître tout le monde), « il pas con, tu sais ». Souvent, il y avait aussi un adjudant, justement, qui déplorait nombre de dysfonctionnements qu’il était obligé de palier sans aucun moyen autre que sa bonne volonté. Tant d’autres dont je découvrais l’intelligence, la sensibilité, à l’occasion d’une garde nocturne et triste autour d’une boisson chaude après avoir gelé, tout seul, pendant deux heures. Eux aussi montraient leur véritable personnalité loin des meneurs, des grandes gueules qui rendaient le service militaire encore plus pénible.

Mesnager2

Mémesne, enfin, déjà artiste, plus ou moins sans abri au moment de son incorporation (c’est d’ailleurs pour ça qu’il avait devancé son appel), dont les facéties avaient vaincu jusqu’à la connerie crasse de son adjudant qui répondait à la caricature habituellement liée à ce grade. Bof, j’avais affaire à nombre d’entre eux et la plupart étaient corrects. Ça fait partie des clichés erronés sur le service militaire : la camaraderie (je t’en fous), la connerie des adjudants (loin de là), le permis de conduire qu’on passait (très très peu le passaient sinon les auto-écoles auraient pu fermer), le sentiment d’appartenir à la même nation (au contraire, on détestait le drapeau et tout ce qu’il représentait). Mémesne, dont je parle quelques fois, est devenu un artiste côté après avoir galéré des années. Oui, ce sont ces portraits, ces gens d’âme auxquels je pense après la lecture de la réponse de Jérémy.

 

 

Les chroniqueurs des médias, j’en parle souvent car leur omniprésence médiatique n’a d’égale que leur fatuité, leur prétention sans limite. Pour résumer, ils découvrent un événement (soit que tout le connaît déjà mais qu’ils découvrent, soit qui n’a aucune importance mais qu’ils tiennent pour essentiel), nous disent ce qu’ils en ont compris et ce qu’il est convenable d’en penser faute de quoi, on serait le dernier des inhumains, à exclure in petto de la grande communauté humaine et à condamner au bannissement éternel sauf en faisant preuve de contrition et de repentance. La repentance est à la mode. En général, je les exècre pour leur capacité extraordinaire à enfoncer des portes ouvertes et à exiger applaudissements et reconnaissance. Si jamais ils peuvent se prévaloir d’un diplôme (minimum bac +3), la mesure est comble car leur dénigrement s’en trouve légitimé. Le pire, c’est que ça marche. http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/06/24/18408754.html

J’ai déjà développé l’affirmation selon laquelle, loin d’ébranler le système comme ils le prétendent en le critiquant, ils n’en sont que les bouffons indispensables à sa pérennité. Tant que l’acrimonie et la contestation se limitent à l’admiration des chroniqueurs, le système a de beaux jours devant lui. Et puis, l’on voit bien comment ils savent jusqu’où ne pas critiquer trop fort pour s’assurer la gratification de leur employeur.

 

À mon tour de souhaiter de belles fêtes à Jérémy et à tous ceux qui liront ces lignes

Publicité
Publicité
Commentaires
J
Le phénomène que tu décris (et déplores) tient à ce que les uns (les Américains) ont choisi de fabriquer du rêve tandis que les autres (nous), ont préféré se cantonner dans un réalisme peut-être moins séduisant. <br /> <br /> Comme exposé par ailleurs, dans les années 60-70, entre "Mannix", "Ma sorcière bien-aimée", "Star Trek", "Starsky et Hutch" et en face, "L'Homme du Picardie", Janique Aimée", le pesant "Maigret" et autres "5 dernières minutes", ceux de ma génération avaient vite fait de choisir. Les séries anglaises, remarquables au plan de l'écriture, de l'originalité des scénarios et de la psychologie des personnages, offraient également une alternative agréable aux mornes propositions franco-françaises. On en a retenu "Chapeau-melon et bottes de cuir", "Le Prisonnier", "Amicalement Vôtre", "Cosmos 1999", "Regan", "Taggart", certaines sont devenues des séries-culte qui ont traversé les générations. En dirait-on autant de "Aux frontières du possible", malgré la présence de l'excellent Pierre Vaneck, de "Madame le Juge", ou de "Le temps de vivre, le temps d'aimer" ? Tout juste aura t-on retenu "Belphégor"... C'est dommage car nous avions de bons auteurs, réalisateurs, acteurs, mais ces séries, à l'époque, plaisaient davantage aux anciens parce qu'elles leur parlait dans une langue qui n'était déjà plus la nôtre.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est en cela que d'après moi, la culture française s'est elle-même ringardisée à cette époque-charnière des années 70 où les courants musicaux étaient marqués par Woodstock et le renouveau de la soul américaine, tandis que nos maisons de disques fabriquaient des clones blondinets de Clo-Clo, lançaient de faux loubards et cherchaient désespérément qui pourrait succéder aux icônes vieillissantes de la chanson à texte, quitte à créer de toutes pièces de simili-chanteurs à simili-textes. Au plan cinématographique, ces années-là furent inoubliables. Nous n'avons jamais fait mieux depuis. En littérature, le Nouveau Roman a achevé de détourner les jeunes lectorats vers les auteurs anglo-saxons. <br /> <br /> N'oublions pas qu'à cette même époque, nous inventions le disco, déclinaison dansante de la soul music qui a marqué quelques générations et qui régulièrement resurgit. Cette fois, c'est nous qui avons exporté, via l'Allemagne où il s'est développé, un courant musical outre-Atlantique ! <br /> <br /> <br /> <br /> S'il est vrai que nous en savons plus parfois que les Américains eux-mêmes sur leur propre mode de vie, ceux-ci, une fois qu'ils ont goûté à notre gastronomie et à nos vins, ont du mal à revenir à leur cuisine artificielle... <br /> <br /> <br /> <br /> Je ne pense pas qu'ils aient cherché à nous coloniser de quelque façon que ce soit. Nous ne représentons jamais que les ressortissants d'une enclave pittoresque du Vieux Monde où l'on joue de l'accordéon et fabrique du pain qui, chez eux, est vendu à prix d'or, contrée que les moins cultivés des Américains situent quelque part eu Europe centrale. <br /> <br /> Je ne les vois pas en tout cas comme des méchants colonisateurs qui passent leur vie à reluquer des poursuites automobiles en descendant des hamburgers et de la bière sucrée. Je ne nie pas les travers de leurs sociétés, je retiens des Nord-Américains le renouveau, l'inventivité qu'ils ont apporté à la culture en général, et cette extraordinaire ouverture d'esprit, cet optimisme qui aux nôtres, font cruellement défaut.
Répondre
L
Je connais un peu les problèmes de l’édition car je n’ai jamais réussi à faire publier quoi que ce soit depuis 30 ans… <br /> <br /> et je sais que je suis loin d’être le seul. <br /> <br /> <br /> <br /> Un éditeur parisien, qui a débuté comme « alternatif » commence à être connu comme arnaqueur de tous les essayistes de France. <br /> <br /> <br /> <br /> Sur la chanson, je me rappelle juste que Pascale Clarck, connue pour avoir toujours raison et se croire l’arbitre des élégances et de la bien-pensance, s’étonnait que dans un film de Michael Moore, il ait choisi pour illustrer la séquence française, « L’Amour est bleu ». Si elle avait voyagé quelque peu ou, simplement, fréquenté des étrangers à Paris, elle aurais su que ce tube, oublié ici, incarne aux yeux du monde entier l’art de vivre à la française. <br /> <br /> <br /> <br /> D’un autre côté, ça prouve aussi que la culture française ne produit plus rien de bon ou du moins d’exceptionnel depuis au moins 40 ans. Les populations cultivées du monde entier connaissent des poèmes de Prévert, les chansons de Brel, de Piaf, d’Hardy, de Brassens mais ignorent tout ce qui s’est fait depuis 40 ans au moins et même le meilleur. Il est vrai que, en France même, dès la fin de ce que j’ai appelé « les années Chili », on a ringardisé la culture française. Les jeunes voulaient faire comme les anglo-américains et les capitalistes préféraient miser sur ce qui avait déjà marché ailleurs plutôt que de risquer l’innovation. <br /> <br /> <br /> <br /> Aujourd'hui, ça fait au moins la 3e génération qui est nourrie de culture étatsunienne et qui la connaît mieux que sa propre culture. Le téléspectateur moyen préfère les villas imitées de l’antiquité gréco-romaine plutôt que les hôtels particuliers et autres manoirs de la classe supérieure. Il connaît par cœur le système judiciaire étatsunien, spectaculaire avec ses engueulades et les « votre honneur » et ne sait rien, malgré le cours d’éducation civique, du système français. Si l’on montrait la police française en action comme les différentes polices des villes des É-U, ça provoquerait un tollé et l’on accuserait l’État de vouloir se faire mousser au moment où un fait-divers ternirait l’image de la police et de la justice. Et puis, sur le vieux continent, les routes sont d’anciens chemins muletiers élargis au gré des besoins et, donc, tout à fait inadaptées aux poursuites automobiles qui nécessitent des grands espaces.
Répondre
J
L'artiste de rue, rien ne t'empêche, Diogène, de créer ton propre groupe sur FB et de photographier ses oeuvres pour les mettre en ligne. Pourquoi pas une galerie sur Instagram, Pinterest ? Manier l'anglais est utile sur les réseaux sociaux et permet de toucher un public international. Mes pages FB sont exclusivement en anglais, ce qui me permet de diffuser ma musique et de la faire connaître aux Etats-Unis et ailleurs. <br /> <br /> <br /> <br /> Les artistes de talent à la retape, c'est de liasses dont ils ont besoin, pas d'un dossier de presse. Le problème est ailleurs. Il est pluriel. Il y a ceux qui produisent un art trop alternatif, trop décalé, trop solipse pour pouvoir rencontrer un public autre que d'habitués. Ceux qui pourraient rencontrer leur public par la qualité de ce qu'ils produisent, la capacité de leur art à parler à tout un chacun, mais qui évoluent dans un contexte stérile (province reculée, exclusion sociale, associatif) ou qui n'ont pas le talent de "savoir se vendre" ni les moyens matériels et logistiques que cela requiert. Ceux qui sont en conflit avec eux-mêmes - détail à prendre en compte, la créativité participant quelquefois d'une névrose. Ceux qui sont seuls, par nature, par choix, par fatalité. Ceux qui croient avoir du talent et qui n'en ont objectivement pas mais qui s'accrochent à ce qui est devenu une habitude. <br /> <br /> <br /> <br /> Ceux que j'ai connus, et j'en ai connus, et j'en côtoie encore, avaient pour point commun d'évoluer dans des contextes stériles tels que décrits plus haut, sans oser ou avoir les moyens de franchir le pas qui les séparait d'éventuels possibles. Autre chose : obligation est faite aux peintres et aux plasticiens, pour pouvoir intégrer un circuit commercial, d'adhérer à la Maison des Artistes, organisme relevant des Drac sensé assurer la protection des artistes et surtout veiller à ce que ce qui est produit sur notre territoire reste sur notre territoire. Verrou typiquement franco-français, synonyme de comptes à rendre et donc de flicage. De même que tout musicien et créateur de musique résidant physiquement sur notre territoire est tenu d'adhérer à la Sacem - même si ce qu'il produit se vend et se diffuse hors de nos frontières. Autre chose encore : si tu as la chance d'intéresser un galeriste, sache que c'est lui qui va poser ses conditions. A savoir que sur chaque vente, ce sera lui le gagnant, et toi l'artiste le dindon de la farce. Tu verras le galeriste arrondir son chiffre et tu auras, toi, le privilège d'avoir sur le dos les fonctionnaires de la culture, plus ceux du fisc en charge de vérifier que le stock de pains de terre dont tu t'es approvisionné, factures à l'appui, correspond bien à ce que tu as produit et vendu, au cas où tu vendrais au black (je tiens cela d'une amie céramiste). <br /> <br /> Tu vas vivre de ton art à partir du moment où tu t'es fait un nom et que tu es coté(e), sans forcément être une icône à bobos. Si vraiment ça marche, tu vas créer ta propre boutique d'expo-vente et disposer d'une clientèle régulière comme n'importe quel commerçant. C'est le bouche-à-oreille qui va t'amener de la clientèle, où que tu te trouves. A toi ensuite de gérer les fléaux du RSI, de l'Urssaf, la paperasse, la comptabilité, les rackets territoriaux. Mais quand tu pars de rien et que tu n'as pas de job régulier (la pratique d'un art fait tache sur un CV, en France, elle inquiète les recruteurs), même si tu as tous les talents du monde et un atelier, tu hésites à te lancer. Toute carrière implique des obstacles, la bureaucratie française ne te rate jamais et on n'aime pas dans ce pays l'initiative individuelle. Quand un créateur ouvre sa propre boutique, surtout si c'est dans un recoin hors des grands axes, ou il a du pognon à la base (même si son talent est discutable), il dispose des bons réseaux (Rotary, copinages, appuis locaux) et il prend des risques mesurés, ou c'est un héros... surtout s'il a du talent ! <br /> <br /> <br /> <br /> Les plus mal barrés sont les écrivains, les poètes. Des hordes de parasites s'improvisant éditeurs tapinent un peu partout sur le web et autour, à la recherche de textes à publier qu'ils publieront après passage en comités de lecture (composés d'enseignants bénévoles, ouaf !) mais sans disposer du moindre circuit de vente en librairies ni de promo - quand les textes sont effectivement imprimés, car certains se contentent de les mettre en ligne, ce que n'importe quel couillon est capable de faire gratuitement en créant un blog ! A la base il y a toujours une adhésion à une assos' (ben voyons!). Certaines revues ont un nom est ont été fondées à l'époque des fanzines. D'autres se créent comme elles se sabordent. La plupart vivotent, leur site est actualisé à la va-comme-je-te-pousse. Dans tous les cas, le lectorat est très, très clairsemé et les chances de passer à la vitesse supérieure, le "vrai" bouquin chez un "vrai" éditeur, sont égales à celles de faire partie du premier vol habité vers Mars. Amazon a saisi l'opportunité et propose de publier quiconque leur envoie ses tapuscrits, les bouquins sont imprimés au gré de la demande et vendus en ligne. Petite satisfaction narcissique qui n'aura que peu d'impact, à moins de réussir à toucher quelque directeur de collection de toute façon hostile à pareille pratique. Un bouquin qui n'a pas franchi l'étape d'un comité de lecture (qui compte plus de commerciaux que de littéraires) n'existe clairement pas. Et si l'on recourt à semblable stratagème, c'est qu'on a préalablement été rejeté par de vrais éditeurs, donc on est un tocard, point barre. <br /> <br /> <br /> <br /> C'est ainsi que l'art, en France, pétrifié dans son normativisme, figé dans sa politique de réseaux élitistes, momifié dans ses vieilles habitudes étatistes, sclérosé dans ses idéologies passibles de datation au Carbone 14, est en train de rater le coche de la mondialisation. On maintient ce statut des intermittents qui profite à une minorité de petits malins (et à l'antique Cégété) au détriment de la masse de ceux qui y sont assujétis ; on soumet les artistes à l'égide d'instances bureaucratiques sensées les materner pour mieux les fliquer ; on les contraint à adhérer à des Sociétés des Auteurs fondées au Quaternaire ; on continue à produire des chanteurs d'un disque dont la recommée n'excèdera pas nos frontières, de fabriquer à l'infini des reprises de reprises de reprises de vieilles scies de l'an Quarante ânonnées par des chanteurs vieillissants incapables de se retirer alors qu'ils ont franchi depuis belle lurette les bornes du ridicule ; on subventionne à tour de bras des séries télé, des nanards sous forme de téléfilms comme des films prétendus de cinéma (la différence ne saute pas toujours aux yeux) le tout inexportables à l'heure où Netflix produit à tour de bras séries, téléfilms et films de portée internationale. Productions certes standardisées mais qui ont le mérite de renouveler en continu une industrie et de fournir du travail à énormément de gens. <br /> <br /> <br /> <br /> Nous, on fonctionne encore comme dans les années 60. On se fait croire qu'on est pour l'éternité le phare de la culture rock parce qu'on a eu Johnny Hallyday, inconnu ailleurs qu'en France et en Belgique, on se gargarise du succès de "Plus belle la vie", quand les soap américains et sud-américains des années 80 continuent d'être diffusés et rediffusés sur toutes les chaînes de la planète, françaises comprises. On nous ressort régulièrement du formol Maxime le Fox-Terrier et Lavilliers et Cabrel qui font le même disque depuis trente ans, petite cure récréative de bons sentiments dont on cherchera en vain quelque trace en Italie, en Allemagne ou au Portugal... Et ce qui est troublant, vois-tu, c'est qu'aux Etats-Unis, lorsqu'il est question de cinéma français, les noms que l'on cite sont Truffaut, Delon, Ventura, Deneuve, Lelouch, Boisset, Chabrol, lorsqu'on parle de chanson française, ce sont Piaf et Aznavour que l'on cite, comme les connaisseurs font référence à la DS en évoquant les Citroën, à la 504 lorsqu'on prononce le nom de Peugeot. <br /> <br /> <br /> <br /> Les Tuche sont aussi inconnus, là-bas et ailleurs, que nos inénarrables et coûteuses Renault Twingo en plastique véritable...
Répondre
L
Qu’ajouter de plus à ce que dit Jérémy sur les rigueurs de l’administration ?<br /> <br /> Que dire quand elle me réclame, tous les ans, un justificatif de mes revenus pour conserver mon Livret d’Épargne Populaire ? Déjà qu’il faut de très faibles revenus pour en ouvrir un, que lorsqu’on peut, il est rare qu’on puisse mettre de l’argent de côté, alors vraiment l’administration a raison de traquer les abus potentiels et les sommes astronomiques qu’elle pourrait récupérer sur les LEP. <br /> <br /> <br /> <br /> Je note aussi le truc consistant à suivre les policiers municipaux pour découvrir l’art en train de se faire. J’ai vu, dans la rue, de nombreux artistes de grand talent mais qui n’ont pas la chance de connaître quelqu’un qui va préparer un dossier de presse.<br /> <br /> <br /> <br /> Sur FB, je n’ai pas réussi à convaincre l’administrateur d’une page consacrée à une rue de Paris et ses voisines de prendre des photos d’un long mur situé à 50 m de là où des artistes peignent depuis plus de 20 ans. <br /> <br /> <br /> <br /> Bien sûr, ceux qui tirent le diable par la queue, ceux qui mettent des gilets jaunes en ce moment, ne savent même pas qu’il y a des polémiques autour de l’exposition d’objets qu’on est prié de considérer comme de l’art et du meilleur. On peut quand même dénoncer la supercherie et la gabegie puisque tout ça se fait aux frais des contribuables. Je sais bien que pour chaque dépense publique, on peut contester le choix et en préférer un autre mais pour ces foutaises, il y a quand même de bonnes raisons. Bien sûr, ceux qui contestent le sac du parc de Versailles pour y mettre des tas de ferraille, pour y creuser des trous et les peindre (rendant une terre de bonne qualité car entretenue depuis plus de 300 ans inculte), ne vont pas aller au goulag mais plutôt se faire traiter de réacs ou même de fachos et ne pourront plus s’exprimer par la suite car définitivement bannis. <br /> <br /> <br /> <br /> Les mêmes qui en appellent à la tolérance, la liberté d’expression (surtout dans des pays lointains), l’ouverture d’esprit, ne supportent pas qu’on puisse exprimer une opinion divergente ou arriver à des conclusions qu’ils ne partagent pas. Je rappelle souvent que Mme Valaud-Belkacem, alors Ministre de l’Éducation Nat. avait traité de « pseudo intellectuels » les agrégés de philosophie (excusez du peu) qui avaient osé critiquer sa politique. Certes, les intellos en question ne vont pas s’arrêter là mais on leur reproche toujours d’avoir pris des positions qui ne relevaient pas du bien penser dont se réclame Mme Valaud et toute la mouvance à laquelle elle appartient et qui fait que le système scolaire français recule à chaque nouveau classement Pisa. <br /> <br /> <br /> <br /> Pour les expos, je te trouve bien sévère, Jérémy. Les queues ne sont pas le meilleur moment et, une fois dedans, quand on a du mal à approcher des œuvres, on ne peut que le déplorer. Je ne pense pas qu’on en tire une gloire en disant : « J’y étais ! ». Le fait d’y aller seul ou presque montre bien que peu de gens autour de soi seraient intéressés par le récit de la visite. Et quoi dire, d’ailleurs ? N’empêche, sur la quantité, on peut avoir la satisfaction d’avoir vu, parfois une fois dans sa vie, l’œuvre authentique. Souvent, on est étonné : plus petit ou plus grand qu’on imaginait, les couleurs un peu différentes etc. C’est vrai que, depuis qu’il y a l’Internet, on a accès à pratiquement tout. <br /> <br /> Cette année, j’ai entendu sur une radio commerciale qu’un réseau de cinémas propose une visite filmée d’une grande expo, sans personne devant les œuvres et avec un minimum d’explication. Ça aussi, c’est la plaie : ceux qui restent plantés devant les œuvres célèbres en écoutant le baratin dans les écouteurs. <br /> <br /> <br /> <br /> Lorsqu’un musée mêle l’exposition temporaire aux expositions permanentes, on peut avoir, en effet des surprises. C’est toujours un plaisir de découvrir des petits bijoux au milieu des pièces connues et de l’expo qui attire momentanément. Je trouve bien qu’il y ait un engouement, depuis un peu plus de trente ans, pour ces grandes expositions. Ça prouve qu’il y a davantage de gens qui cherchent la beauté et qui auront envie d’en voir une autre et encore une autre.
Répondre
L
Lumpenintelligentsia <br /> <br /> je ne suis pas germaniste, je n’entends point la langue de Goethe, malgré plusieurs tentatives mais je possède de ces essais quelques bribes. En allemand, les noms composés s’accolent et ne sont pas séparés par un tiret. Ainsi, on peu avoir des mots de plus de vingt lettres de façon courante.<br /> <br /> C’est le cas de ce mot calqué sur celui de Marx qui parlait de « lumpenproletariat » , le prolétariat en haillons. De nos jours, cette catégorie reprend de l’importance numérique (quoique exclue du numérique) et s’y ajoute les diplômés au chômage, parfois à la rue, qui forme cette nouvelle catégorie dont on refuse d’admettre l’existence.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Sur l’art contemporain, j’ai dénoncé à plusieurs reprises la supercherie de quelques personnalités <br /> <br /> Art contemporain, langue de bois et victimes <br /> <br /> Bravo Frédéric Pommier ou de l'art contemporain<br /> <br /> Aucu, aucune hésitation !<br /> <br /> Je vais pas encore jouer les vieux cons réacs en guerre contre l’imposture que représente nombre d’œuvres considérées comme de l’art. Je déplore juste qu’on n’a pas le droit de critiquer, et ça, c’est très grave. Le prêt-à-penser induit une police de la pensée de fait. La bien-pensance d’aujourd’hui, dérivée de la pensée unique en économie, n’a rien à envier aux tribunaux de l’inquisition. Souhaitons juste qu’on ne passe pas à l’étape des bûchers mais quand on entend des appels au meurtre de ceux qui ne pensent pas bien, on a toutes les raisons de le craindre. <br /> <br /> Ensuite, je rappelle que tout est dans le dossier de presse qui indique « la démarche de l’artiste » au nom de laquelle, on se doit de fermer sa gueule et d’encenser la production. C’est pour ça que la toile d’Omar Sy, pourtant dans le style de celles qu’il a vues et avec, en plus, la spontanéité de l’artiste qui s’ignore ne vaut rien. En revanche, la même, appuyée par un dossier de presse trouvera grâce aux yeux de la critique et des marchands. <br /> <br /> <br /> <br /> Le dossier de presse comprend nécessairement une biographie sélective, une bibliographie des œuvres précédentes, des articles de presse, des commentaires de professionnels reconnus. S’y ajoutent des anecdotes qui seront reprises par les journalistes qui donnent l’impression de bien connaître l’artiste en question. Bien sûr, il n’est pas nécessaire d’avoir lu le livre, vu les toiles, vu le film ou la pièce pour en parler. Si l’auteur est douteux, polémique, détestable, on s’appuiera simplement sur la première critique qui dénoncera un ou deux points et l’on emboîtera le pas en réduisant tout le travail à ces deux points. Cf. le livre de Rika Zaraï réduite aux bains de siège. <br /> <br /> <br /> <br /> C’est aussi pour ça que nombre d’artistes qui peignent sur les murs des villes ne trouvent aucune reconnaissance. Leurs noms sont inconnus. Personne d’influent ne va photographier, rechercher l’auteur et le présenter à la presse.
Répondre
la lanterne de diogène
Publicité
la lanterne de diogène
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 219 511
Newsletter
Publicité