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la lanterne de diogène
2 avril 2019

La réalité par le jaune (réponse à Jérémy)

Et dire que j’ai supprimé un paragraphe pour ne pas être trop long. Au départ, je voulais juste réagir à cette référence aux historiques Cahiers de doléances pour dénoncer les rapprochements tirés par les cheveux. L’Histoire, la mémoire, le « devoir d’Histoire » comme disait un Résistant que j’ai connu, n’ont d’intérêt que pour éviter de recommencer les erreurs. Or, les erreurs sont recommencée sempiternellement. Il n’est pas un historie, pas un humble professeur d’Histoire qui ne dit, quasiment en permanence lorsqu’il évoque un fait historique : « ça vous rappelle pas quelque chose? ». L’humanité est un éternel recommencement et, partout, les humains se comportent à peu près pareil.

 

Ensuite, après 40 ans d’élections au Parlement Européen, force est de constater que ça n’intéresse toujours qu’une minorité, celle qui est conscientisée et politisée tandis que les autres s’en fichent. En fait, plus l’élu est éloigné, moins l’électeur se sent concerné, à l’exception notoire du Président de la République, et encore, puisqu’il y a chaque fois plus d’abstention. On en arrive à une mobilisation à l’Américaine. Les flonflons et la débauche de pognon des campagnes des deux principaux partis nous font croire, de ce côté-ci de l’Atlantique, que c’est un vrai scrutin populaire quand très peu se déplacent. Trump élu avec 25 % du corps éléctoral. C’est justement pour tenter de mobiliser qu’on a recours à ces campagnes dispendieuses. Fermons la parenthèse. Les Français votent donc pour leur Président dans la mesure où c’est une résurgence de la monarchie que les Français adorent finalement. Il suffit de voir l’intérêt pour les frasques de la famille de Monaco pour s’en convaincre ainsi que les fastes de la pompe royale anglaise. Sinon, ils sont attachés au chef du village, appelé « maire » en langage moderne. Le reste leur paraît lointain et, pour tout dire inaccessible ou appartenant à un monde dont ils ne connaissent ni les codes ni, surtout, l’utilité. Dans la vidéo de l’émission « On n'est pas couché » du 30 mars 2019 (avec François Ruffin et Gilles Perret comme invités), on entend une gilets-jaune avouer et même revendiquer son ignorance de la politique. Alors qu’on parle d’eux très souvent, elle ne connaissait les noms ni de M. Ruffin, ni de son mouvement « France Insoumise ». Elle ne peut citer que trois noms : Macron, Le Pen, Mélenchon. Déjà oubliés Hollande, Juppé, Sarkozy. Originaire de l’Ardèche, elle ne connaît ni le nom de son député, ni celui du voisin Wauquiez, pourtant omniprésent dans la presse locale. En revanche, elle est assez habile pour ne pas répondre aux questions posées et amener le débat sur le terrain qui l’arrange, ce qui tranche avec le récit de son enfance malheureuse. Il faut un certain entraînement pour pratiquer l’esquive et ça ne s’apprend pas sur les ronds-points. Ajoutons aussi son embarras quand on lui a demandé pour qui elle avait voté en 2017, ce qui, face à M. Ruffin, en disait long. Quant au gilet-jaune masculin, visiblement moins habile, il ne peut que répéter son seul souhait politique, voir la démission de M. Macron et son remplacement par le peuple. Malgré les tentatives de recadrage de la part de M. Ruquier, il n’en démordait pas. Par conséquent, si après mes réserves sur l’origine de ce mouvement, j’ai toujours affirmé qu’il faut entendre la colère, d’où qu’elle vienne (y compris de policiers en uniformes) et même maladroitement exprimée, je dois bien constater que ce que j’écrivais au début, à savoir que les gilets-jaunes forment un groupe qui ne s’informe pas, qui n’est pas tourné vers les autres, qui n’est pas politisé et qui en appelle à des mesures simplistes se trouve confirmé au fil des semaines. Après le soi-disant Grand-Débat, il n’en ressort que des propos de cour de récréation. L’enfant a du mal à avoir une vision collective mais plutôt égocentrée. C’est normal. Il faut du temps et de l’éducation pour avoir une vision globale et une ouverture d’esprit qui manque dans ce mouvement. Si l’on doit écouter la colère car elle reflète un malaise profond d’une société exploitée, le fait est que l’ensemble des individualismes ne débouche pas sur un altruisme dont manque la dite société. Le refus de se doter de simples porte-paroles, sous couvert de recherche de pureté, traduit plutôt l’incapacité à déboucher sur du concret et peut-être même la peur d’avoir à prendre des décisions.

Déjà, il faudrait s’en prendre aux racines du mal et de l’exploitation. L’action des gilets-jaunes a au moins cette vertu qui consiste à mettre en lumière la réalité et pas l’image de la réalité telle que véhiculée par les partis politiques et les médias. Cette réalité quelle est-elle ? Si je prends mon cas particulier, en 2017, j’ai touché un salaire net de moins de 1500 € pendant 6 mois et j’ai payé des impôts là-dessus. Or, on nous dit que près de la moitié des Français ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu. En clair, ça veut dire que près de la moitié de la population touche des clopinettes. Près de la moitié de la population française touche des minima sociaux, des pensions très basses, des salaires autour du Smic ou moins s’il s’agit de travail partiel. Jérémy pointe le silence sur la spéculation immobilière qui conditionne tout. Le nombre toujours en augmentation de personnes à la rue ne peut plus être dissimulé par des descentes de polices. Le nombre de personnes qui vont s’approvisionner aux Restos du Cœur et dans les autres œuvres charitables, s’il est plus discret, explose. Environ 30 % de la population renonce à se soigner. Le jeu de la spéculation tout court et la financiarisation de l’économie accaparent les médias qui en dépendent mais le dénoncent pas.

Arletty vérité 1

La réalité saute aux yeux désormais mais ne s’attaque pas à la racine du mal qu’est la grande finance et le patronat, totalement absents des revendications des gilets-jaunes qui se focalisent sur le référendum, les indemnités des élus et la démission du Président de la République. Faut-il s’en étonner puisque nombre de petits patrons en font partie ? Les gilets-jaunes parlent peu du chômage des séniors alors même qu’ils sont nombreux aux ronds-points. L’assisté, c’est toujours l’autre et on touche là les limites du mouvement. La soi-disant fraternité autour du café ne doit pas faire oublier les démarches excluantes. De même, la convivialité autour de la machine à café n’empêche pas les rivalités internes.

Je me permets aussi de rappeler que ce mouvement atypique qui dure depuis 20 semaines n’a donné lieu à aucune journée de grève. Quand même, ce mouvement dure depuis 20 semaines et n’est pas près de s’arrêter. C’est tout à fait remarquable même si l’habitude s’est installée et que c’est devenu presque un divertissement, un feuilleton mais que, comme ses prédécesseurs, ce pouvoir ne tient aucun compte des manifestations de rues.

On va nous produire une synthèse qui reprendra ce qu’on sait déjà. Après, la France partira en vacances et à la rentrée, on aura un saupoudrage pour faire croire qu’on a écouté le peuple mais un probable renforcement de la politique favorable aux monopoles et à quelques intérêts particuliers. On nous prépare déjà au recul de l’âge de la retraite et à une journée travaillée pour financer la dépendance alors que ce ne sont pas des revendications exprimées. Tout au plus, après les Européennes, dans le cas où la liste soutenue par le Président de la République (une première car tout à fait contraire à la lettre et à l’esprit de la Constitution encore en vigueur que je sache) se plante, aurons-nous droit à une allocution présidentielle pour dire que le message a été entendu mais pour n’en rien faire, soyons-en sûrs. La gauche était spécialiste de ce genre et notamment M. Jospin : « le message a été entendu ». Après tout, il existe une part non négligeable de la population qui considère que M. Macron est de gauche.

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Commentaires
J
Paiements en ligne, prélèvements, dématérialisation de tout ou presque, ce système peut fonctionner quand tu rentres dans le schéma middle-class connectée vivant en milieu urbain, salaires calculés en kilo-euros à l'année, ameublement Ikéa, la télé géante allumée tout le temps, bataillon de crédits à la conso, projets, portefeuille d'actions pour financer sa future retraite. C'est sur la base de cette constante que le macronisme était supposé fonctionner, non sur celle des variables que le macronisme n'a pas tardé de croiser sur sa route comme autant d'écueils. <br /> <br /> <br /> <br /> Le petit Macron habitait un monde merveilleux idéalisé par ses soins, sorte de Sim City sans prolos, sans cités, sans vieux, sans Arabes, sans ruralité, habité de Barbies et de Ken propres sur eux et dans leur tête au compte en banque inépuisable, à l'image de ce que la propag' britannique voulait montrer des winners du thatchérisme dans les années 90. Générations malléables formatées à la doxa néolibérale dont Canal exhibait vers la même époque les prototypes très parisiens dans ses reportages, ça bosse dans les media, l'édition, la production, la mode, ça monte des business, des vies qui bougent tout le temps, des métiers qui n'en sont pas mais qui rapportent énormément de thune en prenant des risques (à condition d'avoir de la thune à la base) et en râlant sur les charges à payer à ces antiquités que sont l'Urssaf et le RSI qui tant nous éloignent des principes de compétitivité, en râlant sur ces fonctionnaires qui eux ne prennent pas de risques, sur ces assistés qui coûtent cher à la Société et qu'il serait temps de remettre au taf. Un style de vie libéral-libertaire se présentant comme marginal au sens positif, éternellement post-ado et affichant des manières cool dont les modèles étaient Richard Branson, Bill Gates, Jerry Yang et David Filo (fondateurs de Yahoo), Xavier Niel chez nous (qui avant Free sévissait dans le monde interlope des téléphones roses sur le terrain d'un Berlusconi). Jean-Luc Delarue, le tandem Doc & Difool sur Fun Radio, Jean-Jacques Bourdin, déjà lui, Sophie de Menthon qui comptait parmi ses invitées abonnées, étaient en quelque sorte les gourous de ce nouveau monde centré sur le chiffre et l'hyperactivité axée sur le chiffre. <br /> <br /> <br /> <br /> Voilà dans quoi ont grandi le gars Macron et ceux de sa génération. Voilà sur quoi Macron a fondé sa politique. Un nouveau monde pas si nouveau que ça puisqu'on a quand même commencé à vouloir nous le fourguer au milieu des années 80. Pas besoin de disposer de la science d'un Jean-Michel Apathique ou de la sagesse philosophique d'un Michel Lenflé pour pressentir que ce qui se passe en ce moment avec les GJ s'explique en grande partie par l'effet boomerang de toutes les régressions sociales, et au niveau de la qualité de la vie et des libertés, que ce Nouveau Monde devenu une machine infernale a infligé aux franges de la population qui non seulement ne correspondent pas au schéma idéal succinctement décrit plus haut, mais ont subi ce schéma au travers de rencontres problématiques avec des DRH, des petits chefs cost-killers, des cadres tyranniques, des patrons pourvoyeurs d'emplois jetables, des proprios spéculateurs, ceux-là correspondant au schéma précité. Et de monologues téléphoniques à base de touches 1, 2,3, étoile pour revenir au menu.<br /> <br /> <br /> <br /> Bref, la lutte des classes 2.0. <br /> <br /> Qui reste quand même dans la tradition franco-française de la manif, à cela près qu'elle congédie ceux dont la lutte les classes étaient en principe le fonds de commerce, et qui ont préféré orienter leur lutte vers certaines classes plutôt que d'autres. L'addition est lourde pour les syndicats dits majoritaires (CGT, CFDT, FO) et les partis dits de gauche. Trop tard pour rattraper la sauce, et on n'imagine pas le fâlot Hamon et le bobo Glucksmann aller tapiner dans les cités et ce qui reste de nos usines pour tenter de gratter trois voix. Quant à Méluche et même Ruffin, que savent-ils des conditions de vie du sans-logis, du RSAste moyen, du chômedu harcelé par Pôle Emploi, du précaire qui compte ses pièces jaunes au fond du bled paumé où il a pu accéder à un loyer dans ses cordes, du prolétaire qui va devoir renoncer à sa voiture faute de pouvoir en changer, de la nana qui risque d'accoucher n'importe où, la maternité la plus proche étant à 50 kilomètres? Auprès de ces gens-là, les beaux discours d'un Insoumis sont inaudibles et même pas écoutés, parce que ce genre de situation requiert des solutions immédiates, et c'est précisément ce hiatus qui, en leur temps, ont coulé la gauche et l'extrême-gauche, et c'est le silence des syndicats dits majoritaires à l'endroit des précaires, leurs prises de position favorables à propos de ces emplois dits "aidés" qui n'ont fait que perpétuer des situations d'exclusion chez celles et ceux qui en "bénéficiaient", qui ont contribué à les décrédibiliser. <br /> <br /> <br /> <br /> Cela, on ne le répètera jamais assez. Et je ne crois pas qu'il puisse y avoir de mouvement social qui aboutisse à une véritable refondation de la Société, ce qui à l'heure actuelle reste une utopie, sans la prise en compte de ces situations de détresse, aux marginalisations qui en résultent, aux désaffiliations à quoi elles peuvent parfois conduire.
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L
Tu rejoins, Jérémy, nombre de mes préoccupations et notamment celles qui m’ont conduit à créer ce blog, destiné, à l’origine, à mes amis et notamment les plus jeunes, alors étudiants, qui me balançaient ce qu’ils venaient d’apprendre et qui n’avait qu’un lointain rapport avec ce que j’avais vécu.<br /> <br /> <br /> <br /> L’exemple du Brésil est bien choisi. Quand on observe, en France, que la loi est de moins en moins appliquée à mesure qu’on s’éloigne de Paris, on imagine sans peine ce qui se passe dans des pays immenses et, forcément, incontrôlables. Encore aujourd'hui, des territoires immenses échappent au contrôle de l’État et sont sous la coupe de potentats locaux, pour employer un euphémisme. Ne parlons pas du pouvoir exercé par les présidents de certains États fédérés qui entrent en conflit ouvert avec l’État fédéral, en général plus soucieux de l’intérêt commun et notamment celui des indigènes. Or, en effet, chaque fois que les médias français parlent du Brésil, ils oublient le caractère fédéral du pays qui n’est pas anecdotique. Par conséquent, la vie dans les régions les plus éloignées de la côte passe sans souci du jeu politique des grandes métropoles. <br /> <br /> Sur les favelas, nous n’avons aussi que la vision des médias, toujours à la recherche du sensationnel. Si la délinquance et le crime sont bien le lot de beaucoup d’entre elles, il ne faut pas oublier que la plupart ne sont que des bidonvilles sans intérêt pour le crime organisé ou, plus souvent encore, des maisons construites sans permis mais qui se sont solidifiées en fonction des revenus de leurs habitants. Beaucoup de ces maisons sont en dur, ont l’électricité, parfois l’eau (plus rarement) et n’ont généralement pas d’évacuation. On est loin du portrait mi-choqué, mi-poétique qu’on en dresse en France. À noter que les Français sont les seuls touristes qui demandent à visiter les favelas, nourris qu’ils sont par tout le folklore qu’ils ont appris ici et qui a peu à voir avec la réalité. Alors, quand on connaît un peu la réalité des choses et qu’on voit comment elle est rendue par les journalistes, on peut se poser des questions sur tout ce qu’on ne connaît pas.<br /> <br /> <br /> <br /> L’Histoire est racontée par les vainqueurs, dit-on, mais pas seulement. On a toujours tendance à regarder les événements qui nous sont présentés à travers nos connaissances actuelles et les valeurs dominantes du moment. Il est très difficile de se mettre à la place du chroniqueur de l’époque qui écrit pour un public déterminé et lui livre ce qu’il a envie de lire. À partir de là, on doute de tout et ce n’est pas bon non plus. Aussi, je propose d’avoir une démarche humble à propos des découvertes scientifiques et historiques. Récemment, j’ai eu une discussion sur l’Égypte ancienne. Nous sommes convenus que personne ne sait encore comment ont été construites les fameuses grandes pyramides et, j’ajouterais, ni à quoi elles servaient. On a longtemps prétendu qu’on avait construit une rampe tout autour de la pyramide jusqu’à ce que quelqu’un objecte qu’on ne peut pas prendre un angle à 90° avec un tel volume… De même, on ne sait pas d’où vient leur soudaine connaissance et pourquoi n’était-elle pas davantage répandue. J’évoquais, il y a peu, la certitude sur le peuplement de l’Amérique par des mongoloïdes qui ont traversé le détroit de Béring. Si génétiquement les indigènes des deux continents présentent des points communs, de plus en plus de voix s’élèvent pour remettre en cause l’exode. Pourquoi se déplacer vers des terres froides, incultes et hostiles sans savoir ce qu’on va trouver ? Les aborigènes qui vivent au fin fond de l’Amazonie sont très improbablement les descendants d’éventuels mongoloïdes attirés par l’enfer vert après que leurs ancêtres ont affronté les glaces et l’océan. Ces mêmes aborigènes sont plus que jamais menacés après quelques rares années de relatif répit. On revient au Brésil.<br /> <br /> <br /> <br /> Sur le Grand-Débat – à l’origine de nos échanges – personne ne pouvait sérieusement en attendre une révolution susceptible d’accompagner la révolution technologique et démographique que nous connaissons ou, devrais-je dire, que nous subissons. De là à avoir ce que nous aurons, il y a un monde. En fait, le Gouvernement va puiser dans ce qui ressort le plus souvent pour justifier ses choix économiques. Oh, « choix » est encore un grand mot pour dire qu’il faut « faire des économies ». Le questionnaire auquel nous avons été invités à répondre est entièrement orienté vers cet objectif : quels impôts voulez-vous supprimer ? Compte-tenu que les services publics coûtent trop cher, voulez-vous rogner sur votre santé, votre éducation, votre sécurité ? Et tout est à l’avenant.<br /> <br /> <br /> <br /> Ça rappelle furieusement les pratiques du PCF d’autrefois. On ne retenait que les motions majoritaires et l’on se prononçait sur elles. D’où les scores d’approbation caricaturaux qu’on connaissait. Il faut croire que la recette avait des avantages puisqu’elle est reprise.<br /> <br /> <br /> <br /> Le Gouvernement a tort de jouer là-dessus et de compter sur le rejet de l’impôt qui est ancré en France depuis des siècles et entretenu par le souvenir de cours d’Histoire (on y revient) et des dépenses somptuaires du Roi-Soleil. Il joue aussi sur la résignation qui domine depuis un quart de siècle mais des forces se sont libérées et nul ne peut prévoir ce qui va se passer. Si l’on a globalement gobé les soi-disant 10 milliards « donnés aux gilets-jaunes » (il s’agit en fait du coût des mesures prises et pas de la somme allouée pour les financer), tout le monde ne se laissera pas abuser par la suppression de quelques impôts qui marqueront la suppression de nouveaux relais de services publics. <br /> <br /> <br /> <br /> À l’occasion du premier débat de la campagne pour les européennes, on a appris que 40 % des maternités ont fermé au cours des 20 dernières années et qu’on se penche sur des aménagements à prévoir pour les accouchements en cours de route qui se sont multipliés. https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/une-aire-d-accouchement-d-urgence-inauguree-apres-la-fermeture-de-la-maternite-du-blanc-1554143845<br /> <br /> <br /> <br /> De nombreux bureaux de poste sont menacés en zone rurale et en banlieue après les premiers regroupements d’il y a une dizaine d’années mais on peut suivre en temps réel le cheminement d’un colis via une application sur smartphone (j’en n’ai pas). On s’en fout ! On veut qu’il arrive dans les meilleurs délais. Idem pour une lettre. Avant, on pouvait être sûr qu’elle arriverait le lendemain. Maintenant, à Dieu va, et il y a 3 sortes de timbres pour justifier les délais. C’est au nom de l’écologie qu’on justifie les délais. Les Finances publique n’arrêtent pas de fermer des bureaux et prend des mesures pour obliger les contribuables à payer en ligne. Comment faire en cas de réclamation ? Tapez 1 puis 2 puis * pour revenir au menu principal et ça recommence. Même si ça n’a pas toujours à voir, c’est la France qui en a marre de taper 1 puis 2 puis * pour revenir au menu principal qui soutient les gilets-jaunes.
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J
Je vais te fournir un élément de réponse me concernant, et me concernant moi seul. Ce n'est pas que je me fiche de savoir ce qui se passe dans les territoires occupés, au Brésil, en Papouasie ou au Kamtchatka, c'est que d'une, ce qui en est dit ne reflète qu'une toute petite partie de la réalité, et de deux, je n'ai pas de prise sur ce qui se passe là-bas. A quoi bon m'encombrer l'esprit de commentaires et de savantes expertises d'individus eux-mêmes absents du théâtre des opérations, là où ceux qui sont sur place sont seuls à même de cerner la nature des évènements et d'y prendre part d'une manière ou d'une autre ? <br /> <br /> On va pérorer à l'infini sur Bolsonaro, on va convoquer des géopoliticiens, des politologues, nous expliquer que l'élection de Bolsonaro est le produit d'années de corruption d'un pouvoir de gauche qui n'a rien résolu de la misère des favelas, etc. Sauf que le Brésil ne se résume pas aux favelas, que c'est un pays immense, pluriethnique, où l'on parle plusieurs langues (dont le français et l'italien), où coexistent plusieurs types de sociétés humaines. Qu'il se trouve dans des régions reculées du territoire des Brésiliens qui se fichent comme d'une guigne de ce qui se passe à Rio de Janeiro ou à Sao Paulo, mégapoles où ils ne mettront jamais les pieds. Ce qu'on nous dira du Brésil de Bolsonaro va concerner un dixième des cariocas, l'élite financière qui a tout à gagner à voir un leader autocrate au pouvoir. Les autres continueront de vaquer à leurs petites affaires, de survivre de leurs petits commerces, de monter des trafics de stups, de pièces détachées de voitures volées, de pratiquer le bootlegging, de traiter avec les mafias de l'immobilier, de gérer leur cheptel de filles et de transsexuelles destinés au tourisme sexuel, d'exploiter des ouvriers entassés dans les favelas où les gosses s'en font fouiller les monceaux d'ordures avoisinants pour y grappiller quelque chose à manger. Ce qu'on m'expliquera du Brésil de Bolsonaro ne m'offrira, à moi, aucune clé de compréhension globale, et quand bien même, je n'ai pas de prise pour changer quoi que ce soit à la vie d'un peuple dont je sais seulement que la majeure partie survit dans un état de misère révoltant. <br /> <br /> <br /> <br /> C'est quand tu te trouves au cœur d'un évènement que tu en saisis la substance. Ce qui en est dit ensuite, au titre de l'information, est forcément biaisé. Celui qui va commenter les faits sur les bases d'images prises par d'autres n'était pas sur les lieux au moment où ils se sont produits. Ce qui sera écrit sera encore différent de ce qui aura été dit, car entre temps, l'idéologie a pris le relais. Selon les lignes éditoriales, l'Africain qui a escaladé un immeuble pour sauver un gosse est vu comme un héros, il faut lui décerner une récompense. Ou, c'est un clandestin qui cherche à s'allier l'estime des autorités du pays où il s'est introduit illégalement, et il convient d'appliquer la loi. La part des faits, et celle du fantasme. Les faits, et ce qui en est dit puis écrit de façon partisane à l'intention du public visé. <br /> <br /> Tu transposes sur les Gilets-Jaunes, où les faits se déclinent de la façon la plus désordonnée qui soit depuis bientôt vingt-et-une semaines, et tu saisis l'ampleur de la confusion qui peut s'emparer des esprits. Entre le discours officiel et celui des commentateurs agréés en charge de le répercuter et de le conforter, les images en direct fournies par la chaîne russe RT, celles des chaînes d'infox en continu appartenant à des multinationales, celles du "service public" placé sous l'autorité de l’État, celles diffusées sur YT, prises par des particuliers depuis leur smartphone, et ce qu'il en est en réalité des défilés hebdomadaires, ce qui s'y dit, ce qui y est revendiqué, les éclats des uns, les destructions orchestrées par d'autres, la violence tangible exercée par les forces de l'ordre sur ceux des manifestants dont ils ne risquent guère de riposte, que veux-tu retirer de ce flot d'informations qui puisse être pensé, réfléchi, synthétisé avec recul ? <br /> <br /> <br /> <br /> Passons à l'absence d'audace, d'idées neuves que tu as relevée dans ce mouvement, et les récents mouvements populaires. Personne ne semble remettre le système en cause, émettre des idées clairement révolutionnaires. <br /> <br /> A cela, peut être deux raisons, et j'avais survolé la chose dans ma précédente intervention. Les GJ comme les jeunes des quartiers savent pertinemment dans quel pays ils vivent. Un pays où n'est même pas envisageable ce qu'il serait peut-être possible de mettre en place hors de nos frontières. Un pays pas si libre que le prétendent ceux qui le dirigent. Un pays où il serait vain, par exemple, d'émettre l'idée d'un mandat électif unique et non-renouvelable à quelque niveau de l'exécutif qu'il se situe. Maire, député, président le temps d'un mandat et on passe à autre chose. Sachant qui vote les lois et les avantages que l'on peut retirer d'un mandat, aucun polytocard ne suivrait. Autre exemple, instaurer un système d'habitat rémunéré pour redynamiser le monde rural et y maintenir classes et services publics. On serait payé à habiter les campagnes désertées et à y travailler la terre ou y exercer une activité de son choix, commerciale, artisanale, artistique. Et là on t'objecterait que cela enfreindrait les codes sacro-sanctifiés de la propriété privée, quand bien même il s'agirait de bâtisses laissées vides faute de trouver preneur et de terres abandonnées à la jachère depuis des lustres, et il se trouverait un technocrate européiste pour dire que cela enfreint telle ou telle directive. <br /> <br /> <br /> <br /> L'audace peut certes exister dans certains esprits, mais la marge de manœuvre qui lui est laissée par l'un des États les plus rigides qui soient, assujetti à une UE dont l'unique objectif est de favoriser les profits des multinationales, renvoie cette audace à des utopies irréalisables, des vues de l'esprit, du temps que l'on préfèrera consacrer à revendiquer le droit de pouvoir se payer toujours plus de hochets fabriqués pour pas cher dans l'usine planétaire chinoise, et vendus nettement plus cher par des intermédiaires soucieux d'une marge juteuse et de distribuer des dividendes aussi juteuses à leurs actionnaires. L'utopie versus Amazon. Amazon, tu cliques, un coup de carte bleue, on te livre le lendemain au plus tard, et si tu as un restant d'idéal, tu te colles des œillères pour ne pas voir ce qui se passe dans les hangars-relais en termes de conditions de travail, de contrats jetables et de salaires minables. Ni ce qui se passe dans les usines chinoises, dont d'ailleurs on ne te dira rien. Et puis la Chine, c'est loin. <br /> <br /> L'audace dans une optique de mode de vie alternatif existe déjà "dans les clous" de ce qu'on appelle le monde associatif, il y a aussi l'expérience des SEL, ça reste limité à certains domaines très marginaux dûment encadrés par la bureaucratie et concerne peu de monde en définitive. On va récupérer ici du matos informatique pour le retaper et le revendre bon marché, ailleurs des mobylettes pour permettre aux chômeurs de rester mobiles, on va employer pour cela des gens en CDD à temps partiel dont ça ne changera pas la vie à la fin de leur contrat, recourir à des bénévoles qui seront recrutés parmi les bras cassés du coin, jusqu’à ce qu'ils trouvent autre chose, qu'ils en aient marre, qu'ils se barrent survivre ailleurs... <br /> <br /> On se souvient de la proposition de certains, il y a deux hivers, de construire des micro-pavillons à l'intention des SDF sur des terrains communaux... Tollé des riverains, silence frileux des mairies soucieuses de ne pas sauter aux élections suivantes... <br /> <br /> <br /> <br /> Ainsi en est-il de LA République....
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L
Je ne suis pas aussi optimiste sur ceux qui ne s’informent pas. Je me souviens, autrefois, sur les bancs du lycée, il y en avait qui regardaient « Les Jeux de 20 h » et ignoraient, effectivement, qui présentaient les 2 JT qu’il y avait alors. Certains se faisaient une gloire de ne pas participer à ces débats d’adultes somme toute barbants. Bien sûr, ça voulait dire surtout que leurs parents s’en fichaient aussi. Pourtant, à l’époque, la majorité d’entre nous se réunissaient en petits groupes, lors des récrés, pour fumer et commenter l’actualité, surtout à l’approche d’élections. Certains allaient voter, d’autres pas. Ça ne nous empêchait pas de nous intéresser aux divertissements, notamment au cinéma, au foot et à la drague. Comme quoi, c’est compatible mais ça paraît impensable auj. Quels lycéens passent leurs récrés à commenter Barthes ?<br /> <br /> <br /> <br /> Je veux dire par là qu’il y a toujours une frange de la population qui ne s’informe pas parce que rien d’autre que ce qui leur est strictement utile ne les intéresse. Y en a qui font grève ? Ce sont des emmerdeurs et puis c’est tout. Y en a qui vont voter ? C’est pas pour moi : tous les mêmes, tous pourris, ils veulent que not’fric (le mien surtout) ! Ceux qui refusent la télévision, les débats télévisés, les infos en continu, les réseaux sociaux, s’inscrivent dans une démarche de préservation de leur intégrité. Ce ne sont pas les moins informés pour autant mais ils choisissent leurs sources et, en général, elles sont bonnes. Maintenant, il est vrai que l’Internet est devenu un gigantesque café du commerce où les propos de bistrots côtoient les meilleures études. Beaucoup se croient intelligents en relayant des bobards, en dénonçant des complots imaginaires pour peu qu’ils aillent dans le sens de leurs délires obsessionnels. Cette démarche a toujours existé mais elle restait à la marge en raison du peu de moyens dont on disposait avant l’Internet. Aujourd'hui, la chasse est ouverte et on a vu récemment comment on a attaqué des bidonvilles de Roms dans un département touché par des problèmes sociaux en tout genre. À une époque où tout le monde possède un minimum d’instruction et même plus, pour sortir du lot, le plus facile est de débusquer une information que personne ne connaît et de la présenter de manière à se mettre en valeur : moi je sais et pas vous, donc vous n’êtes pas crédible. Peu importe si l’info a un rapport avec le sujet traité d’ailleurs. Ça rejoint alors ce que j’ai appelé le PIP, le Point d’Incompétence Paradoxal, quand dans la conversation, le + ignorant balance une info de ce genre pour mettre en difficulté celui qui maîtrise le sujet afin de reprendre le dessus. Comme je l’ai écrit, il y a qq années, la brève de comptoir a plus d’impact que le meilleur argument.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Ensuite, au début des années 1990, j’entendais souvent dire : « ça va péter ! ». Au début, j’approuvais puis, je répondais qu’on le disait déjà l’année d’avant. On surenchérissait alors : « Oui mais cette fois, les gens n’en peuvent plus ». Il faut croire que si puisque, à l’exception de la grève des cheminots de 1995, rejointe par des grandes entreprises, il ne s’est rien passé. Il y a eu les années Jospin qui ont été presque euphoriques. Un correspondant d’un journal anglais, arrivé en France à cette époque a pu dire que tout réussissait à la France et qu’il était évident qu’elle gagnerait la Coupe du Monde. On sait comment ça s’est terminé mais, là encore, point de soulèvement populaire. C’est pour ça que, lorsque j’ai créé ce blog, j’ai consacré un tag à la résignation et un autre à la diversion, pensant que nombre d’événements montés en épingle avaient pour but de nous éloigner des réalités les plus criantes. Surtout, ce qui m’a inquiété, c’est ce que Marianne a appelé « la pensée unique » qui s’appuie pour beaucoup sur les premiers cités dans ce commentaire, à savoir les moins informés ou pas informés du tout. J’en veux pour preuve ceux qui ne vont pas voter et qui se justifient en disant qu’ils sont tous pareils, mais, en fait ne visent que deux ou trois candidats ou formations. Dans ces cas-là, ils précisent : « Je vais quand même pas voter pour Untel ». Tout de même, à chaque élection, il y a un choix varié mais on vote toujours pour les mêmes et l’on s’étonne que rien ne change. Avec M. Macron, on a pu caresser l’espoir qu’en renouvelant le personnel politique, beaucoup de choses changeraient. Finalement, ce qui change, c’est l’inflexibilité de technocrates qui appliquent des théories anciennes mais curieusement jamais appliquées. On pourrait se demander pourquoi et l’on ne tarderait pas à comprendre qu’elles relèvent de la superstition. <br /> <br /> <br /> <br /> Dans un commentaire précédent, tu remarquais que « C'est dans ces périmètres excentrés que l’on risque de trouver de l'audace». Cette audace qui manque pour accompagner un bouleversement social et technologique tel qu’on n’en a jamais vu, tant par l’ampleur que par le nombre de personnes impactées. À l’heure où un simple combiné téléphonique permet d’obtenir facilement n’importe quelle réponse (de l’horaire du bus qu’on attend à la position des étoiles, en passant par le titre du morceau de musique qu’on entend en passant devant une boutique, ainsi que sa correspondance et tant d’autres applications), à l’heure où des machines commencent à écrire des compte-rendus et bientôt des romans, à l’heure où la population mondiale frôle les 8 milliards, les dirigeants du monde entier ne proposent que des recettes pour ne pas franchir le pas et rester dans la configuration de l’après-guerre. On comprend qu’il s’agit de défendre des intérêts particuliers mais ceux qui n’ont pas les mêmes intérêts devraient réagir. Or, les GJ ne remettent pas non plus le système en cause, pas plus que les révoltes des banlieues autrefois. Ces mouvements populaires ne visent qu’à demander une meilleure intégration dans ce système injuste qui les maintien à l’écart tout en leur imposant des vitrines indécentes qui fonctionnent comme autant de supplices de Tantale. <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Les GJ occupaient à l’origine, certes des carrefours mais des carrefours rendus plus souples, plus abordables par leur mise en ronds-points. Symboliquement, c’est peut-être ça aussi qui rend leur mouvement plus rond et moins agressif. Cependant, l’absence de grève ne s’explique pas que par la mise à l’écart des syndicats. Normalement, ces gens devraient être au travail et n’y sont point. Ça devraient engendrer des journées de travail perdues or, il n’y en a pas. Également, je voudrais apporter une nuance à l’absence de marche sur Bercy. J’ai, personnellement, vu des gilets-jaunes aux terrasses des cafés proches de Bercy en fin de journée. J’en déduis qu’il devait y avoir un rassemblement dans la journée. En revanche, je n’ai pas entendu dire que des manifestants se trouvaient dans le quartier d’affaires de La Défense. Pourtant, l’esplanade est très grande, dans le prolongement des Champs-Élysées avec, entre les deux, la ville la plus riche de France, à savoir Neuilly-sur-Seine. Curieusement, ces deux symboles sont épargnés par le mouvement et j’ai du mal à croire que c’est seulement l’ignorance dont je parlais au début de ce commentaire qui les préserve. Il y a quelques années, le mouvement « Occupy La Défense », dans les sillage des « Indignés », avait choisi ce lieu où se prennent les grandes décisions. Il avait été réprimé implacablement dans l’indifférence générale, à commencer par celle des petits salariés de ce quartier d’affaires qui craignaient pour leur emploi, sachant mieux que quiconque comment il est facile de le perdre. <br /> <br /> <br /> <br /> De sorte que, si l’on peut raisonnablement prédire que le soi-disant « grand débat » ne débouchera sur rien à part de la poudre aux yeux, on ne peut prévoir l’évolution de ce mouvement décousu qui dure et durera au moins jusqu’aux vacances d’été. Ça devrait faire réfléchir. La maladresse de ce mouvement ne doit pas faire oublier le malaise profond qu’il révèle et que des mesures pour maintenir un système inadapté ne fera que nourrir.
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J
On peut comprendre que certains se tiennent éloignés de la jungle politicienne et des media qui en sont les porte-paroles. On conçoit que lesdits media iront inviter un certain type de GJ conforme à l'image qu'ils souhaitent donner au mouvement, selon les directives de leur rédaction. En amont il y a des annonceurs à ne pas mécontenter, d'autres à convaincre, le cahier des charges des éminences grises de la propagandstaffel dont il s'agit de ne pas écorner une seule page. Devant il y a la masse informe des téléspectateurs, dont on ne sait pas grand chose quant à leur comportement devant l'écran. Comment passe l'info(x), passe t-elle seulement ? On écoute ? On regarde ? C'est un fond sonore ? On fait quoi en même temps ? On chatte sur son ordi ? On cuisine ? On discute entre soi ? On s'envoie des SMS sur son smartphone ? On zappe à quel moment ? Sont-ce des images qui bougent dans le poste comme dans le réfectoire une maison de retraite ? <br /> <br /> Et puis il y a les mécréants. Celles et ceux qui sèchent les grand messes et ne connaissent même pas l'heure des vêpres. Occupent leur existence à autre chose qu'à l'écoute de ces palabres qu'ils savent vaines. Celles et ceux qui seraient bien en peine de dire, si on les interrogeait à ce propos dans la rue, qui présente le "20 heures" sur telle chaîne, qui étaient les invités de "C dans l'air", "C à vous" et autres réservoirs à palabres. Qui n'allument jamais leur télé sur une chaîne d'infox en continu. Qui n'allument pas souvent leur télé. Qui n'ont pas la télé. <br /> <br /> C'est du côté des mécréants qu'il faut chercher les authentiques dissidents. Certains ont poussé la mécréance jusqu'à la désaffiliation, phénomène de retrait, d'exil social, décrit par le sociologue Robert Castel (https://www.persee.fr/doc/caf_1149-1590_1994_num_38_1_1668), cursus relevant qui d'une fatalité, d'un basculement vers la marge, qui d'un choix délibéré.<br /> <br /> Phénomène qui reste cependant assez marginal. Quant à la mécréance, elle peut s'étendre de la fermeture aux media, éviction de la télé, à l'abstention dans l'absolu, sous-entendu non-inscription sur les listes électorales, via quelques nuances (lecture de media d'info parallèle, presse présentée comme subversive, adhésion aux théories du complot, etc). <br /> <br /> <br /> <br /> Je reste sur l'idée des provocations de Macron comme phénomène déclencheur de ce mouvement hors-normes, tout en continuant à m'interroger sur le pourquoi il ne s'est pas enclenché plus tôt, par exemple dans la mouvance du mouvement syndical de 1995 ou plus tôt encore, à la fin des années 80. Il y a l'explication des réseaux sociaux, bien sûr, sur laquelle je ne me prononcerai pas, étant très peu présent sur ceux-ci et ne suivant pas l'actualité des groupes concernés. Je me souviens des quelques tentatives de déboulonner Sarko, qui n'avaient pas abouti. Il y a eu aussi au début des années 2000 un courant en faveur de la décroissance qui parallèlement, dénonçait les faux-semblants politiciens, le joug européen, les trains de vie pharaonique de la classe politique et son impunité, courant présent sur des blogs très suivis mais qui s'est peu à peu effiloché pour disparaître. <br /> <br /> Ce qui est certain c'est qu'au sein de l'opinion "en général", le feu couvait depuis de nombreuses années, ciblant une classe politique dont on pourrait dire, avec le recul, qu'elle n'a rien vu venir. Les taux d'abstention, de votes blancs et nuls sont évocateurs de ce rejet et des politiciens et des institutions dites républicaines. Il s'est élevé quelque voix pour remettre en cause le principe même du suffrage universel (http://www.mezetulle.fr/faut-finir-suffrage-universel/). Le questionnement paraît légitime au vu des catastrophes politiques que furent les présidences Chirac, Sarkozy, Hollande, et du désastre auquel on assiste sous Macron, dont on rappellera l'élection par défaut. Au vu de la cruelle absence d'alternative construite à ce que les intellectuels continuent de nommer la Pensée unique, absence qui en soi met en échec la notion même de démocratie, en ce que celles et ceux qui s'opposent à cette Pensée unique, et ils sont nombreux, ne sont pas représentés. <br /> <br /> <br /> <br /> Les Gilets Jaunes occupaient à l'origine des carrefours. Ce qui est assez intéressant, au plan symbolique. Le carrefour, c'est le choix posé entre des directions qui vont à l'opposé. C'est exactement là que se situe la nature de leur mouvement. Loin de disqualifier ce mouvement, et en se gardant de l'image que l'Officialité Étatique, au travers des media, souhaite en donner, je crois que les GJ convoquent au travers de leurs revendications diffuses, protéiformes, délirantes parfois, une mise en abîme de ce que le système a produit, dans son ensemble, depuis un demi-siècle - parmi lesquelles tant de monstruosités. <br /> <br /> <br /> <br /> J'essaie de voir au-delà des marches hebdomadaires dans Paris, des contradictions, des faux défis lancés à une autorité en place qui se sait affaiblie, ses oppositions qui n'ont toujours pas compris qu'elles ne retireront rien de ce mouvement, des syndicats qui s'en savent exclus (d'où l'absence de mouvements de grève), et des paradoxes qui structurent ce mouvement (l'utilisation des réseaux sociaux, émanation des GAFA ! et cette masse individualiste qui n'est propre qu'à façonner un collectif que le samedi...! )... <br /> <br /> <br /> <br /> Mais pas plus que toi, je ne pressens où il nous mènera. Les Zadistes ont ceci d'intéressant qu'ils proposent des expériences de terrain, de modes de vie alternatifs. Pas les GJ, qui en restent à la revendication de surface. Sans trop toucher à ce qui fâche. L'emploi précaire. Les salaires minables. Les populations à la rue. Le marché juteux des formations qualifiantes. L'impunité des politiciens. La justice de classes. Le coût monstrueux pour la collectivité de partis politiques de moins en moins représentatifs. Le piston, autre institution bien de chez nous, avec le débat permanent qui n'aboutit à rien. Les privilèges féodaux des proprios. Le Dieu Immo, devant quoi se prosternent nos beaufs quitte à y sacrifier trente années de leur vie pour avoir le droit de se prévaloir du statut de propriétaire (ah ! l'héritage paysan !). <br /> <br /> <br /> <br /> Au fait, les a t-on vus marcher sur Bercy, forteresse qui est à l’État français, en tant que symbole, ce que le Pentagone est aux États-Unis ?
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la lanterne de diogène
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