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la lanterne de diogène
18 avril 2020

Quand le savant montre ses travaux, Sophia Aram regarde sa barbe. (réponse à Jérémy)

Nous convergeons, avec Jérémy, sur l’utilité des amuseurs. Je règle tout de suite la question de leur rémunération car elle revenait dans les chroniques de Didier Porte lorsqu’il officiait. Pour faire passer sa récrimination auprès des auditeurs qui s’offusquaient, M. Stéphane Bern, à l’époque animateur du « Fou du roy » (comme l’écrit Jérémy) disait que c’était une « private joke ». Sur Inter, les cachets ne doivent pas être mirobolants mais il faut considérer que c’est toujours mieux que rien pour des intervenants et autres chroniqueurs qui, sans cela, demeureraient confinés dans l’anonymat. La question que je me suis toujours posé, c’est de savoir où ils sont allés les chercher. Pourquoi, amène une réponse plus évidente. Le producteur espère sans doute que, l’amateurisme, la méconnaissance des codes des médias apporteront une spontanéité qui bousculera un peu les auditeurs. À plusieurs reprises, j’ai attiré l’attention sur cette espèce de concours de celui qui a la plus grosse, à savoir celui qui osera, celui qui poussera le bouchon le plus loin. Je cite souvent aussi la première chronique matinale de Stéphane Guillon qui, à un moment s’écrie : « Ah, j’ai dit bite, sur France-Inter à 7h 54. Que va-t-il se passer ? ». Comme bien sûr, à part les éclats de rires dans le studio, rien ne s’est passé, il en a rajouté à chaque fois jusqu’à ce qu’il comprenne que taper sur les ministres ou anciens ministres, taper sur l’invité du jour, était devenu banal sur « la radio de service public ». Il décide alors de s’en prendre à son employeur en insinuant que s’il se faisait recadrer, c’était sur ordre direct de l’Élysée. Il était évident qu’il était victime d’un complot hourdi contre lui en haut-lieu, ce qui lui donnait une importance que les autres chroniqueurs n’avaient pas. Qui se souvient de Stéphane Guillon ? Aujourd’hui, quelqu’un comme Jérémy, cultivé et bien informé, ignore jusqu’au nom de Sophia Aram et, sans doute, des autres chroniqueurs qui envahissent les ondes.

L’autre question est de savoir qui les embauche et leur utilité. Je crois pouvoir dire que tout a commencé avec Canal + quand il s’agissait de faire quelque chose de nouveau. « Nulle part ailleurs » devait innover et les interruption pour laisser la place à un chroniqueur a donné des idées aux autres. Est-ce que ces pitreries sont du goût du public ? Il faut croire que oui puisqu’elles perdurent et qu’on ne peut plus citer tous ceux qui ont, l’espace d’une saison ou moins, ponctué des émissions de divertissement ou d’information. En fait, le premier a probablement été M. Claude Villers dans son très original « Tribunal des flagrants délires » avec la chronique quotidienne de Pierre Desproges et quelques autres selon l’année ; jusqu’à ce que, comme Jacques Martin en son temps, il se dépare de Desproges visiblement insupportable et surtout pas fait pour travailler en équipe. On apprend qu’un Laurent Ruquier a fait ses armes, dans l’ombre du « Tribunal » et d’autres encore. Lorsqu’il a remplacé au pied levé les chansonniers vieillissants et prétentieux de « L’Oreille en coin – dimanche matin », il a fait appel à une pléthore d’humoristes chargés de nous distiller la bonne parole et de dézinguer l’invité, prié de courber l’échine et de sourire sous peine de passer pour un mauvais coucheur. Pourquoi les invités répondaient-ils alors à l’invitation ? Il y avait plusieurs cas de figure. La plupart ne connaissaient évidemment pas l’émission et pensaient vendre leur salade (bouquin, disque, spectacle) dans la bonne humeur. D’autres se disaient qu’il fallait en passer par là car, il y avait de moins en moins d’émission de promotion à la télévision. Pour d’autres enfin, c’était le seul endroit où l’on parlait encore d’eux. Rares ont été ceux qui, comme Gloria Lasso, ont répondu du tac au tac à un Didier Porte totalement déstabilisé. Où l’on entendait que le public présent n’attendait que ça – et sans doute depuis longtemps – pour signifier au pitre qu’ils ne l’appréciaient pas. Il se trouve que j’ai assisté quelques fois au « Fou du roi » et je puis dire qu’il était peu applaudi mais que les micros bien disposés donnaient l’illusion d’une salle entière qui ovationne l’intervenant. Tout le monde ne va pas au cirque dans l’espoir de voir le dompteur dévoré, même si ça existe aussi. Le public populaire et âgé qui assiste à ces émissions cherche d’abord à passer un bon moment et est plutôt « bon public ». Les scolaires qui s’y rendent pour voir comment se passe une émission en direct ne connaissent, en général, ni Inter, ni ses animateurs, ni les chroniqueurs, ni même la plupart des invités qui se succèdent au fil des jours. Encore un mot sur « le Fou du roi ». J’ai vu, une fois, un des chroniqueurs/commentateur présent sur le plateau dire une seul mot dans l’émission. Le type a été payé pour un mot dans une émission d’une heure et demi. Pour finir sur le sujet, je pose simplement la question : de tous les chroniqueurs qui sont passés chez les uns et les autres depuis 30 ans, peut-on en citer seulement dix sans faire d’effort de mémoire ?

D’une manière générale, j’ai souvent écrit ici que le modèle type de chronique sur Inter est le suivant : j’ai déniché une information (qui a échappé à tout le monde) ou plus simplement encore je commente ce que tout le monde commente depuis des jours. Voici ce que j’ai compris et voilà ce qu’il est convenable d’en penser. On a appelé ça, à un moment, la pensée unique. Notons aussi une dérive impulsée notamment par Guy Carlier consistant à donner des leçons de morale qui portent d’autant plus qu’on se dit qu’un humoriste qui traite un sujet grave fait preuve d’une grande sensibilité et sera d’autant plus crédible. C’est sur ce créneau que joue Sophia Aram.

 

raoult-coco-site-art-tonio

Ce qui m’intéressait dans sa dernière intervention, c’était sa prétention à évaluer les travaux d’une sommité du monde médical et à le mettre au niveau des marabouts de Barbès, à Paris, pour ceux qui connaissent les lieux. On savait la propension des Français à être sélectionneurs de l’équipe de France ou Premier Ministre en toute circonstance. Voici qu’ils ajoutent une nouvelle corde à leur arc : ils sont tous devenus épidémiologistes. Je souscris complètement à la remarque de Jérémy qui constate que « les résultats qu'il produit sur le traitement du Covid-19 sont sans cesse démentis, voire détournés par une bureaucratie (ARS) qui est une émanation du système en place ». Or, ce qui a propulsé le Pr Raoult sur le devant, c’est justement qu’il obtient des résultats mais qu’on refuse de les prendre en compte car il n’aurait pas respecté les protocoles imposés par ses confrères et ça, quelqu’un comme Sophia Aram, pur produit de l’université française bien formatée et de la bien-pensance ne peut le supporter. C’est typiquement ce type de démarche qui entretient le complotisme amplifié depuis plusieurs années par l’Internet et, maintenant, les réseaux sociaux. Chacun peut s’improviser journaliste et même philosophe, étant son propre employeur, aucun diplôme n’est exigé. L’animateur Guillaume Meurice qui intervient chez les Belges d’Inter a pu interroger un jour un type qui s’estimait fondé à donner son avis puisqu’il était ingénieur. Ingénieur dans quelle spécialité ? Généraliste, répond le badaud. Parlant de diplôme, je rappelle que, précisément, non seulement aucun diplôme n’est exigé mais aucun diplôme n’est reconnu par les chroniqueurs et les intervenants des réseaux sociaux. Le Pr Raoult n’est reconnu (ou vilipendé) que parce qu’il porte les cheveux longs à son âge et une barbe druidique selon Sophia Aram. On se souvient que l’Abbé-Pierre passait bien à la télévision pour des raisons similaires. En revanche, aucun n’a pu lui succéder, ni le Pr Jacquard ni, plus récemment, M. Augustin Legrand. Leur critique féroce du système n’intéresse pas les médias qui en sont le pur produit et la caisse de résonance. L’Abbé-Pierre, le Pr Reeves, le Pr Raoult intéressent les médias à cause de leurs barbes prophétiques et, malheureusement, c’est aussi ce qui fait qu’on les écoute. Pour le reste, ils peuvent bien raconter ce qu’ils veulent. Je sais bien qu’il est mal vu, en ce moment, de se référer à la Chine mais le proverbe s’applique bien ici : quand le savant indique la lune, le sot regarde l’index. Pour être complet, il faut aussi préciser que le Pr Raoult semble écouté par le Président Macron et c’est sans doute ce qui a provoqué la fureur de la petite chroniqueuse. Qu’un savant obtienne des résultats là où les autres pataugent et qu’il ait l’oreille du Président de la République est tout à fait insupportable à la bien-pensance.

 

https://charliehebdo.fr/2020/03/actualite/chloroquine-sauver-des-vies-ou-respecter-des-protocoles/

 

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Commentaires
J
Je ne suis pas non plus télé, même si j'ai grandi avec (mes parents en étaient inconditionnels). Au cours de ma vie j'ai eu de longues périodes sans, de rares périodes avec, quelques périodes malgré. Parce que bon, quand tu es avec quelqu'un à qui tu tiens et qui vit dans les clous, tu ne vas pas chercher à lui imposer tes vues. D'autant que je n'en ai pas, des vues, au sujet de la télé. Chacun en pense ce qu'il veut, c'est un besoin, une distraction, une nécessité, une présence, c'est ce qu'on veut et l'approche que j'en ai ne regarde que moi. On me branche sur telle série, telle émission, je vais y jeter un œil, il y a des programmes sur des télés étrangères (la RTS en particulier) qui m'intéressent, je vais les voir s'ils sont disponibles sur le web, et basta les pubs. <br /> <br /> <br /> <br /> Cela dit, je reconnais qu'à moins d'appartenir à la communauté Amish (peu présente sous nos latitudes), je n'aurais pas pu faire l'impasse sur la téloche si j'avais été père de famille. <br /> <br /> <br /> <br /> Je vois déjà les réactions en société, quand on me parle d'une émission passée la veille ou d'individus en principe ultra-connus - dont je n'ai que vaguement entendu parler, pour être étranger à l'univers où lesdites célébrités tiennent un rôle - et que je dis non, désolé, pas vu, connais pas, j'ai pas, j'ai plus la télé. La dernière que j'ai eue, et que j'ai donnée depuis, je l'avais récupérée pour une poignée d'euros de singe, sa diagonale était moindre que celle de mon écran d'ordi, et comme là où j'habite il n'y a pas d'antenne collective, j'avais dû relier le décodeur TNT à une antenne baladeuse et à chaque fois qu'on me signalait un truc à voir, ça prenait un quart d'heure et je finissais par tomber sur un tunnel de pubs. J'ai dû garder cet engin un an, c'est tout juste s'il a tourné l'équivalent de dix jours, pour visionner des émissions mal traduites de l'anglais où des types retapaient de vieilles américaines à l'intention de collectionneurs. Les tunnels de pubs m'apparaissaient interminables et omniprésents. Quand je passe chez une bonne amie à moi qui aime bien avoir la télé en fond sonore l'après-midi, j'ai l'impression qu'à part des jeux, de l'infox, des télé-réalités et Arte, la programmation télévisuelle est en ces temps presque entièrement consacrée à la pub. <br /> <br /> <br /> <br /> Ce mode de vie où la télé n'a pas de place, dont elle est absente, il est quand même largement incompris, pour ne pas dire vu comme marginal, et j'ai remarqué que les femmes y sont particulièrement sensibles, en ce que nombre d'entre elles semblent voir en la télé un repère domestique, quelque chose de rassurant, comme une présence certes souvent agaçante mais qui est une présence quand même, surtout à une époque où le silence fait si peur à beaucoup de gens.
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L
N’ayant plus de télévision depuis environ un quart de siècle, je ne connais presque aucune des références citées par Jérémy pas plus que je n’ai regardé les médicales d’Igor Barrère et Étienne Lalou en leur temps même si j’en ai, évidemment, entendu parler. En fait, la télévision aura été une parenthèse de quelques années dans ma vie. Je ne dis pas que ce média est néfaste car je sais qu’il y a quantité de bonnes émissions mais simplement, à part les premières années de curiosité, je n’y ai finalement trouvé que peu d’intérêt. J’observe, encore une fois, avec la remarque sur le « monsieur » que l’animateur donnait à son interlocuteur autrefois, que la télévision, depuis près de 40 ans, participe à cette démarche où tout le monde est au même niveau : ceux qui passent à la télévision, qu’ils soient savants, badauds, ministres, chanteurs, acteurs, journalistes, experts sont autant de personnages sur un écran et leurs compétences importent peu pour, visiblement, une majorité de téléspectateurs. Je dis presque 40 ans parce que, j’avais remarqué qu’avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, les journalistes appelaient les ministres par leurs prénoms et noms comme si, finalement, ils n’étaient que les spécialistes du sujet au Parti Socialiste, à qui il incombait provisoirement de prendre des décisions. Quand on entend dans la matinale d’information – pas plus tard que l’autre matin – le journaliste sommer le ministre de faire des réponses courtes, on se pose des questions. Bien sûr, je ne dis pas qu’il faut en revenir à le déférence envers les titrés mais de là au style actuel où le plus prestigieux des invités est interrompu pour un laisser la place à un chroniqueur ou pour mettre en valeur l’animateur, il y a de la marge. Je rappelle qu’est apparue, voici environ 30 ans, cette notion selon laquelle au bout de qq dizaines (je sais plus exactement) de secondes, l’auditeur s’ennuierait. À partir de là, on ne laisse plus l’invité développer son argumentation, l’obligeant à des raccourcis dont on ne retiendra qu’une formule simpliste qui sera, en revanche, abondamment commentée. C’était ce qui se passait (et dont nous avons déjà parlé) sur le plateau du soir sur Inter à la fin des années 1990 avec MM. Philippe Bertrand et Hervé Pauchon qui coupait systématiquement la parole de « mon invité » pour placer un vanne. C’était aussi ce qu’on voyait dans « Nulle part ailleurs » où l’intervention du pitre de service, la publicité, la pause musicale, la promotion interne (pour voir les émissions cryptées) faisaient que l’invité du soir parlait finalement assez peu. <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Je ne suis pas spécialement partisan de la cravate pour le présentateur. Je le suis davantage pour le ministre ou même le parlementaire. Je me dis qu’il faut choisir entre passer par les codes de la représentation ou rester dans un rôle de bateleur. On a reproché – et on le rappelle souvent – à un ministre en exercice son intervention en polo lors de la canicule de 2003 alors qu’il était sur son lieu de vacances. Je rappelle que quelqu’un comme Yves Mourousi ne manquait jamais une occasion de tomber la veste et d’arborer, selon les circonstances, la tenue de ses invités. On sait qu’il aimait particulièrement les habits militaires mais il portait aussi le survêtement quand il rendait visite à l’équipe de France. <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Pour la barbe, sans anticiper sur un prochain article, il convient, en effet, de distinguer plusieurs types. En Afrique, la barbe est synonyme de respect. Il faut un certain âge ou s’être distingué pour avoir, sinon le droit, du moins la légitimité pour la porter. Les missionnaires l’avaient bien compris. On remarque, ces dernières années, que les artistes vieillissants la portent volontiers. Je citerai feu Jean-Claude Brialy mais encore Bernard Lavilliers qu’on a connu glabre mais chevelu. Ils ne sont plus ni dans la séduction ni dans l’entretien d’une image. En clair, ils s’en fichent. En fait, c’est la barbe blanche qui change tout et qui la distingue de tous les dévoiements. C’est avec la barbe blanche que les sculpteurs grecs représentaient leurs philosophes et leurs dramaturges sans aucun souci de ressemblance, d’ailleurs. Seule comptait la barbe. Les illustrateurs d’Épinal ont pris l’habitude de représenter les druides, en effet, portant barbe blanche et cheveux longs. Uderzo a repris ce code car, je le répète, Astérix ne visait pas le réalisme mais la satire de la société contemporaine. Par un curieux détournement sur lequel je reviendrai, les archétypes de la série sont devenus la référence. Donc, plus encore que le prophète dans une société déchristianisée et déjudaïsée, c’est bien à la figure du druide Panoramix qu’on associe les trois personnages que j’ai cités. Le Pr Raoult, dernier apparu sur les écrans présente une similitude supplémentaire puisqu’il possède des connaissances en médecine – que Sophia Aram lui dénie du haut de ses compétences universelles et de son magistère de juge – comme les druides d’autrefois mais cependant limitées à des remèdes à base de gui puisque, tout le monde sait bien qu’ils passaient leurs journées perchées dans les arbres pour en couper. Cependant, ce qui lui vaut cette volée de bois vert, c’est notamment qu’on ne l’appelle pas autrement que par ses prénom et nom et qu’on ne s’adresse pas à lui en citant son titre parce que, finalement, il n’est intéressant que parce qu’il assure le spectacle. Ses propos intéressent moins que son allure.
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J
Le rapport au look que tu pointes à la fin de ton article, Diogène : nous en revenons à ces fameux archétypes chers à Carl Gustav Jung. <br /> <br /> <br /> <br /> Tu prends trois exemples de barbes de prophète qui renvoient aux mythes et légendes, aux épopées primitives et contemporaines, à la figure du libertaire post-hippie pour ce qui concerne Didier Raoult - figure dont participent sa Swatch vermillon et la déco un brin déjantée de son bureau, théâtre de ses interventions. <br /> <br /> <br /> <br /> On n'est plus dans le décorum austère des mandarins de la lointaine époque où Igor Barrère et Étienne Lalou leur donnaient du Monsieur avec une componction qui prêtait à sourire. Mais, on est quand même dans l'idée de mise en scène. Didier Raoult n'est pas obligé d'arborer sa blouse blanche lors de ses interventions. On sait désormais qui il est, où ça se passe, on imagine bien qu'il n'est pas seul devant une webcam lorsqu'il nous rend compte de ses travaux et qu'il aimerait bien de temps en temps accrocher sa blouse au portemanteau. Mais ce décorum, il donne du poids à ses interventions. C'est le savant. Il a la dégaine d'un poète de la beat generation comme en son temps, Rémy Chauvin arborait le faciès anguleux et le bouc d'un Abraham Lincoln, se distinguant de ses pairs en costume impeccable et nœud pap' bien ajusté, et de ses contemporains d'intellos qui promenaient de plateaux télé en salles de rédaction leurs dégaines de révolutionnaires, jeans fatigués, pataugas, petites lunettes et cheveux en bataille. Didier Raoult, son look a fait de lui, auprès du public, autant que ses prises de position, l'homme de la situation folle que l'on traverse. <br /> <br /> <br /> <br /> Un autre exemple, Yves Calvi, l'homme à la chemise ouverte. Il évoque à première vue le journaliste sur la brèche, qui s'est précipité de sa salle de rédac' au studio sans prendre le temps de mettre une cravate et d'endosser un blazer. Trop pris, trop occupé pour ça. L'urgence de l'actualité, l'obsession d'informer, de débattre. L'homme pressé qui va jusqu'à oublier de se raser tellement il est pressé. Hyperactif le mec. Dévoué au métier. <br /> <br /> Sauf que c'est que de la posture. <br /> <br /> Yves Calvi, c'est un type qui secoue du vent, comme tant de journaleux et de débatteurs de son acabit qui ne sont là que comme faire-valoir de ces éditocrates payés à placer leur homélie du jour. Je pense pour vous et je suis là pour vous dire quoi penser. Là, on n'a que faire du look. Il n'y a pas de look institutionnalisé d'éditocrate, chacun impose le sien. Duhamel donne dans le gros bourgeois satisfait du montant de ses rentes, Christophe Barbier dans le style dandy poudré, Jean-Michel Apathique cultive ses allures de vieux foetus, Franz-Olivier Giesbert son air de famille avec Jack Nicholson dans "Wolf". Etc. <br /> <br /> <br /> <br /> Comme toi, je ne suis pas certain que l'abbé Pierre aurait impressionné les foules s'il avait promené la bouille sympa mais banaloïde de Monseigneur Etchegarray. Cette barbe archétypale, d'ailleurs revenue à la mode avec le style hipster, Hubert Reeves, autre exemple illustrant ton propos, l'affiche depuis toujours au point de paraître immuable. Les gens de notre génération diront qu'ils ont toujours connu Hubert Reeves, que Hubert Reeves leur a toujours paru très vieux. Il donne l'impression d'avoir toujours été là. Peut-être en effet a t-il toujours été là. Le voyant, on ne peut pas ne pas songer à Galilée. Voyageur du Temps ? <br /> <br /> <br /> <br /> Mais cette barbe, pourrait-on nous objecter, elle est et était portée par des individus pas très recommandables ? Ben Laden (autre archétype, traité comme tel par les médias américains. Dans une culture où la dimension biblique a toute son importance, Ben Laden était vu comme la figure de l'antéchrist), les ayatollah iraniens, les tueurs en série Landru, Charles Manson, Fourniret. <br /> <br /> <br /> <br /> Elle peut être indissociable d'une culture, d'une religion, d'une époque donnée, tout dépend comment on la porte, en fait, et du moment de l'Histoire où on l'arbore. <br /> <br /> <br /> <br /> Stéphane Guillon, sur lequel tu reviens, sévissait sur les ondes à l'époque où cartonnait la série "Docteur House", dont le personnage-titre, incarné par le talentueux Hugh Laurie, pratiquait un humour cynique et se plaisait à provoquer méchamment ses partenaires et ses patients. Est-ce à dire que Stéphane Guillon cherchait à s'inscrire dans une mode promise à se démoder avec le retour de Hugh Laurie devant son piano (il est un musicien et chanteur de blues remarquable)? <br /> <br /> Le fait est qu'à ce jour, Stéphane Guillon cachetonne. Je l'ai aperçu tenant un petit rôle d'écrivaillon dans la série "Astrid et Raphaëlle", qu'une amie m'a recommandée (et qui est excellente), dont j'ai visionné la première saison sur YouTube. J'y ai vu, dans le même épisode, un certain Ariel Wizman, autre humoriste de l'époque révolue de "Nulle part ailleurs". Les deux empâtés. Le temps est assassin pour qui prétend faire rire ses contemporains à leurs dépens.
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