Pourquoi, IDIR ?

Pourquoi cette pluie ? Pourquoi ces larmes ? Pourquoi ce deuil à présent ? Pourquoi justement maintenant ?

Autant de questions qu’on pose au moment de la perte d’un être cher ou d’une personnalité réconfortante. L’avantage des artistes, c’est que leur œuvre leur survit et leur mémoire entretient des accents, des mélodies, des causes qui sont familières à tous ceux qui, comme moi, ont grandi dans un quartier universel.

Idir est un trait d’union entre cette Algérie qui partage des années d’Histoire avec la France et l’ancienne métropole, pas toujours loyale. Idir nous rappelle le souvenir d’un voisin, d’un ami parfois qui ne mangeait pas toujours la même chose que nous mais qu’on reconnaissait comme un des nôtres parce qu’il habitait avec nous, que nous savions où il travaillait, que les femmes se retrouvaient et que les enfants rentraient tous les soirs de la même école. Après avoir voyagé, changé de régions, les chansons d’Idir nous rappelaient ces moments. Parfois, c’étaient aussi les années d’horreur et de peur qu’on ressentait avec nos voisins et amis et qu’Idir a si bien su traduire et en français pour que tous ceux qui ont oublié le tamazigh et ceux qui ne le pratiquent pas.

Tant de pluie tout à coup sur nos fronts
Sur nos champs,nos maisons
Un déluge ici l'orage en cette saison
Quelle en est la raison?

Est-ce un message est-ce un cri du ciel?
J'ai froid mon pays j'ai froid
As-tu perdu les rayons de ton soleil?
Pourquoi cette pluie pourquoi?

Bien sûr, ce matin, tout le monde écoute, pense à son succès mondial « A Vava Inouvah » mais j’avoue un faible pour cette chanson écrite par Fabien Marsaud (autrement dit Grand Corps Malade) qui a su, malgré leur différence de culture, si bien traduire les sentiments d’un père pour sa fille. Il y a des choses, comme ça, qui sont universelles.

Tu m'as dit au revoir d'un regard, avant de quitter la maison
Le bus t'emmène à la fac, où tu te construis un horizon.
Je suis resté immobile, j'ai pensé très fort à toi
Réalisant la joie immense de te voir vivre sous mon toit

Tout le monde est fier de toi, tu as toujours été une bonne élève
Mais a-t-on vu assez souvent un vrai sourire sur tes lèvres ?
Tout ça je me le demande, mais jamais en face de toi
Tu sais ma fille chez nous, il y a des choses qu'on ne dit pas

La voix douce d’Idir s’est tue. Elle apaisait quand il y avait tellement de tensions, tellement de douleurs, tellement de joies parfois exprimées brutalement. Idir va nous manquer.

Ça paraît futile de dire ça mais si les grands médias, dont Inter, par exemple, décidaient de consacrer une grande partie de leurs programmes à Idir, comme ils l’ont fait, à juste titre pour Johnny Halliday, il y a bien des choses qui iraient mieux. La vie n’est pas faite que de grandes envolées, de grandes politiques, de beaux discours mais aussi de ces petits rien qui illuminent le quotidien. Penser à la joie des Kabyles en entendant les mélodies, les accents de la langue de leurs ancêtres sur leur application préférée…

Idir "Lettre à ma fille" avec sa fille Nina au piano

https://www.youtube.com/watch?v=StKv8TBsTWc

Idir « Exil » avec Geoffrey Oryema

https://www.youtube.com/watch?v=NeBZt6GrAuY

Idir « Tizi Ouzou » en duo avec Maxime Le Forestier

https://www.youtube.com/watch?v=h0ad8Dop5GM

Idir « Pourquoi cette pluie »

https://www.youtube.com/watch?v=rgAJMneX8uU

Djurdjura

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2009/03/08/12876618.html

Idir et Tanina « Scarborough Fair »

https://www.youtube.com/watch?v=5POMNp8OVNQ

https://www.francetvinfo.fr/culture/musique/musique-du-monde/le-chanteur-idir-icone-de-la-musique-kabyle-est-mort-a-70-ans_3946277.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20200503-[lestitres-coldroite/titre7]

Comments

[la colere]

La chroniqueuse Sophia Aram, souvent épinglée dans ce blog s’est risquée à cet hommage tout en poésie à Idir :



https://www.franceinter.fr/emissions/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-04-mai-2020



Pourquoi cette pluie, pourquoi

Cette eau, ces nuages qui nous étonnent ?

Elle dit "cette pluie, tu vois

Ce sont des pleurs pour les yeux des hommes"

Idir est mort hier, il faut le laisser partir., 

Il reviendra vivant, à chaque souvenir, 

A chaque goutte de pluie dans le flot de nos vies.