Barre-toi !

Le meilleur économiste de France s’en est allé. Comme toujours on a droit aux hommages les plus appuyés. Pour lui et pour d’autres, je devrais créer une rubrique « Laideur » puisque j’en ai fait une pour la « Beauté ». Rappelons que c’est Barre, à travers son manuel d’économie politique qui a popularisé les idées libéralistes de l’Ecole de Chicago de Milton Friedman en France et qu’il s’est efforcé de les mettre en œuvre. C’est lui qui, le premier a culpabilisé les chômeurs qui, d’après ses fumeuses idées, sont responsables de leur sort puisque l’économie sans intervention de l’Etat assure un travail à chacun. Rappelons qu’il a dit : « les chômeurs n’ont qu’à créer leurs entreprises ! » et que devant son incapacité à régler le problème du chômage, il avait annoncé que, de toutes façons, par la démographie, il se résorberait mécaniquement en 1984… Après l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, il tenait une rubrique dans un hebdomadaire où, devant les résultats de ses successeurs, il mettait en avant, souvent, l’écart qui se creusait entre l’Allemagne et la France. Quand il est arrivé à Matignon, l’inflation était en dessous de 10%. Alors qu’il avait été appelé pour lutter contre, elle était de 14% à son départ cinq ans plus tard. Six mois de gouvernement Mauroy ont suffi pour inverser la tendance et durablement et malgré une spéculation contre le franc menée par le patronat et quelques gouvernements étrangers. Enfin, et c’est peut-être le plus grave, c’est lui qui a répandu l’idée selon laquelle les services publics commerciaux devaient être rentables et que l’Etat ne devait plus combler leur déficit. C’est cette logique qui a conduit à baisser les effectifs, à réduire les services vendus aux usagers, à économiser et rogner sur tout. Le scandale du sang contaminé a sans douté été le plus douloureux de tous ceux qui relevaient de cette logique. Cependant, aucun gouvernement n’a inversé cette tendance insensée et que l’actuel entend enfoncer le clou définitivement. Comme maire de Lyon, il a poussé sa logique libéraliste jusqu’à faire payer un tronçon du périphérique routier montrant son entêtement en tout. Philippe Tesson qui en avait fait sa tête de Turc favorite dans l’ancien « Quotidien de Paris » (excellent journal au demeurant), dénonçait régulièrement sa fatuité et son ego surdimensionné. Il était également hypocrite, se faisant passer pour inexpérimenté en politique alors qu’il était habile tacticien et savait très bien manœuvrer par en dessous. Sous la première « cohabitation » de 1986, il ne manquait pas une occasion de savonner la planche du gouvernement Chirac qui le lui a bien fait payer, notamment pendant la présidentielle de 1988 en faisant discréditer sa personne et sa campagne dans les médias audiovisuels qu’il contrôlait tous, publics et privés. Bien qu’inévitables, les hommages qui lui sont rendus sont particulièrement indécents. Fermez le ban !