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la lanterne de diogène
11 janvier 2012

Boléro

 

Un vrai moment d'émotion, ce matin-là, dans la gare centrale de Copenhague.
http://www.flixxy.com/symphony-flash-mob-copenhagen-central-station.htm


Des musiciens arrivent, les uns après les autres et interprètent le fameux « Boléro » de Ravel. D'habitude, ce morceau me casse les oreilles. Quand on l'a entendu une fois, ça suffit pour la vie, d'autant qu'on nous l'impose de temps en temps comme les guêpes et autres moustiques qui reviennent chaque été.

Cette fois, le lieu, le public, changent les données. D'abord, la caisse claire qui retentit légèrement et semble appeler tous les autres qui rappliquent illico. Et puis, ils arrivent , se joignent à eux, vêtus comme les passants qui passent dans cette gare de voyageurs, habités par des rêves ou des obligations d'aller quelque part.

En regardant les sourires des uns et des autres, en lisant l'émotion dans leurs yeux, la surprise d'être surpris en flagrant délit d'émotion, on se dit que l'humain est peu de chose qui peut être saisi par de simples note enchaînées en cadence et répétées par leurs semblables, pas tout à fait semblables puisqu'ils peuvent extraire des sons de matières inertes. La musique, la beauté en général parviennent à submerger nos petites existences bourrées de problèmes, de préoccupations, de responsabilités.

En écrivant ces lignes, j'ai envie de crier à la suite du grand Léo Ferré :

« Dans la rue, la musique ! Dans la rue ! »

parlant de Léo Ferré auquel je ferai référence dans une prochaine chronique, j'ai envie de publier l'intégralité des paroles d'une chanson en rapport :

Léo Ferré
LES MUSICIENS


Ils traînent leurs violons au-delà des portées
La clarinette au bec fumant des pastorales
Et la clef sur la table on les voit s'en aller
Vers des pays là-bas devant leur vitre sale

Ils dérangent la flûte en y soufflant dessus
Pour mieux voir dans la nuit flâner des violoncelles
Au bras d'une harpiste inquiète et survenue
Juste après qu'un violon l'eût prise en chanterelle

Les ailes du génie à portée de leurs bras
Croyant tout inventer ils réinventent tout
Debussy à la plume et Schubert dans la voix
Ils s'envolent dans des oiseaux de quatre sous

Sur leur papier tout pâle ils écoutent chanter
Les hasards de la rue et leur pauvre musique
Dans l'ombre de Bayreuth pendant qu'un groupe anglais
Tire inlassablement ses salves électriques

Ils traînent leurs portées au-delà des violons
Ils dérangent la nuit dans le bruit du silence
La tête achalandée de dix mille chansons
Le sourire des larmes au bord d'une cadence

Ils maquillent l'orgueil au bras des vanités
Ils se tirent dessus quand ils n'ont plus de cible
Ils se montrent du doigt du bout de leur archet
Qui pend ses cheveux blancs à leurs cordes sensibles

Les portes du destin s'entrouvrant par hasard
Par une clef de sol devenue pathétique
Le choléra de Tchaïkovski sur le boulevard
La rage de Berlioz comme un chien fantastique

Alors dans leur miroir ils regardent passer
Les chevaux de Mozart à sa dernière fête
L'oreille de Beethoven en train d'imaginer
Pour la neuvième fois des symphonies muettes

Les musiciens

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