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la lanterne de diogène
26 avril 2007

quelques réflexions après le premier tour

D’abord, la participation a été importante. Cela dit, si c’est pour entériner le vieux schéma bi-polaire en espérant que le changement de génération va entraîner un changement de politique ou de pratiques politiques, il me semble que l’espoir est démesuré. Il existe des habitudes, inhérentes aux familles politiques et qui donnent toujours le même type de résultats. Les trois millions de nouveaux électeurs ont suivi leurs anciens. A croire que l’atavisme électoral constitue une donnée génétique (puisque la génétique intéresse le favori des médias) forte en France. Il ne faudra pas s’étonner.

Ensuite, comme d’habitude, selon les médias, « le grand gagnant » est celui qui est arrivé en troisième position, donc qui a perdu. M.Bayrou, y croit –c’est son intérêt –mais les électeurs qui ont voté pour lui pour ne pas voir M.Sarkozy, vont rejoindre, de gré ou de force, le clivage habituel. De toute évidence, l’espoir de troisième voix n’a pas fait long feu. Seule une victoire de Mme Royal pourra amener des électeurs à élire des députés centristes pour, selon eux, modérer l’ardeur toute illusoire du gouvernement de gauche. Dans ce cas, les électeurs de l’UMP n’ont rien  à craindre. Le centre aura un espoir si la gauche passe. Dans le cas contraire, M.Bayrou ne sera pas au Président ce qu’a été Jean Lecanuet au président Pompidou. Les opportunistes rejoindraient la majorité sarkoziste sans discussion.

M.Sarkozy caracole en tête, comme M.Giscard en 1981. Donc, les jeux ne sont pas fait. Cela dit, il faut se demander pourquoi ce candidat a réalisé un tel score. Pour beaucoup, ses manières d’homme fort sont la réponse à un quotidien invivable, fait d’incivilités, d’impolitesse, de violence, de peur permanente, qui s’ajoutent à la précarité, à la baisse du pouvoir d’achat, au chômage généralisé. A tort ou à raison, la droite à la réputation de défendre un minimum d’ordre tandis que la gauche donne l’impression de laisser tout faire et de défendre ce qui rend la vie encore plus difficile. En tous cas, elle n’apporte aucune solution sinon de relativiser la pénibilité du quotidien : « il n’y a pas d’insécurité mais un sentiment d’insécurité ».

Tout a été dit sur M.Sarkozy, y compris des calomnies tout à fait inutiles.

http://www.marianne2007.info/-Le-vrai-Sarkozy-en-acces-libre-!_a1180.html?preaction=nl&id=2940408&idnl=21222&

Reste que le personnage est instable, et qu’il n’a pas la maturité pour occuper les fonctions de chef d’Etat. Ses allégations concernant la génétique en constituent le meilleur exemple. On attend d’un Président de la République, quel qu’il soit, quelque ait été son vote, qu’il rassemble, qu’il représente un tant soit peu la nation.

De toute évidence, comme on l’a vu en tant que Ministre de l’Intérieur, il tient des propos de nature à attiser les tensions, ce qui légitime les pires violences quand elles paraissent dirigées contre lui. Sur le plan international, sa vision de la diplomatie et de l’économie calquée sur ce qui se passe aux Etats-Unis n’est pas non plus ce qu’on attend du chef d’un Etat indépendant qui a derrière lui une histoire prestigieuse à vocation universelle. On attend du Président de la République française qu’il renforce l’indépendance du pays et non qu’il s’aligne sur la pensée dominante étatsunienne. Précisément, à cause de cette vocation universelle, la France se doit de demeurer indépendante et de se faire, quelque peu, l’avocate des pays en développement, en Afrique, notamment. Quel désespoir pour ces peuples en cas de victoire de M.Sarkozy et d’alignement sur les Etats-Unis. M.Chirac ne laissera de toute évidence pas une grande trace dans l’Histoire, cependant il restera celui qui n’a pas engagé de troupes aux côtés des Etats-Unis contre l’Irak. Aujourd’hui, outre atlantique, on reconnaît qu’il avait raison et seule la stratégie à moyen terme de l’opposition aux Républicains ne permet pas d’engager une procédure d’ « empechement »  à son encontre pour avoir menti sur les causes de l’engagement d’une guerre qui coûte des centaines de soldats US.

Les menaces de terrorisme, qui passent inaperçues dans ce contexte, sont à prendre très au sérieux. Si un attentat se commet entre les deux tours, M.Sarkozy sera élu. En l’occurrence, les terroristes le souhaitent afin de réunir les conditions d’un affrontement direct avec la France quelque peu épargnée sous le règne Chirac.

En faut-il plus pour éviter d’amener à la Présidence un homme qui manque de maturité pour occuper de telles fonction ?

Mme Royal n’est pas précisément la candidate idéale. Néanmoins, en tant que femme, que mère de famille, on devine qu’elle n’agira pas à la légère. On peut critiquer ses positions, ses lapsus, il n’en demeure pas moins que c’est une personne équilibrée. Malgré les embûches dans son propre parti, elle a su s’imposer. Ayant vécu dans l’ombre de Mitterrand, elle en imite sa posture en s’étant placée dans une stratégie  de victoire qui prime sur le contenu. Cette détermination peut plaire voire rassurer. On n’attend pas non plus d’un Président qu’il reste sur la ligne d’un parti mais, encore une fois, qu’il rassemble.

Maintenant, il faut revenir sur la participation, en hausse par rapport à ces dernières années. Malgré une mobilisation importante, c’est à dire malgré le nombre, l’électorat a obéi à un réflexe de moutons de Panurge. Les soi-disant petits candidats ont été laminés. Aucun ne dépasse 5% ! Comme le ridicule ne tue pas, certains se consolent en disant qu’ils sont devant un autre. Les différences ne sont pas significatives. Pourtant, comme d’habitude, ce sont ces candidats qui ont le plus argumenté, qui ont abordé les problèmes qui se posent aux citoyens et qui ont apporté des solutions réalisables. Visiblement, on préfère continuer et rouspéter en permanence plutôt que de changer.

L’autre point commun de tous ces candidats, c’est qu’ils avaient tous appelé à rejeter le projet de Traité Constitutionnel Européen, à part Mme Voynet. Aucun n’a engrangé le bénéfice de cette victoire. Ce paradoxe demeure une énigme.

La droite souverainiste qui défend le contrôle de la monnaie, le contrôle aux frontières nationales, les aides aux PME qui créent des emplois,  l’aide aux pays en développement, la défense de l’environnement ne résiste pas face aux slogans simplistes de la droite et de l’extrême droite. La gauche de gauche, fidèle à son habitude, préfère compter son + ou – 1,5 % plutôt que de se rassembler. Oui, mais moi, je rassemble plus de monde dans mes réunions ! Oui, mais moi, je réunis plus de jeunes ! Oui, mais moi, je réunis plus de femmes ! Oui, mais moi, j’ai plus d’expérience ! Oui, mais moi, j’ai toujours été contre le nucléaire ! Oui, mais moi, je suis soutenu par plus de formations ou de partis ou de collectifs ! Oui, mais moi, je suis connu dans le monde entier ! Oui, mais moi, j’incarne un courant historique majeur ! Oui, mais moi, j’ai des moyens, une logistique ! Oui, mais moi, je travaille encore ! Oui, mais moi, je suis plus disponible ! Oui, mais moi, j’ai déjà gouverné ! Oui, mais moi, je n’ai jamais soutenu la politique rétrograde des socialos ! Oui, mais moi, j’ai fait les grandes grèves ! Pas moyen de s’entendre : « s’entendre pour quoi ? si c’est pour poursuivre la même politique, je ne m’allie pas ! ».  Je ne mets pas avec quelqu’un qui est pour le nucléaire ! Je ne me mets pas avec quelqu’un qui ne veut pas nationaliser l’eau ! Je ne me mets pas avec quelqu’un qui a appelé à voter oui ! Je ne me mets pas avec quelqu’un qui est contre l’Europe ! Je ne me mets pas avec quelqu’un qui ne veut pas régulariser tous les sans-papiers !

Des décennies que cela dure. Résultat…

C’est peut-être aussi pour ça qu’ils ont fait des scores aussi minables. Encore une fois, on attend d’un Président qu’il rassemble et non qu’il parle pour une chapelle ou un oratoire. La gauche de gauche avait quelque peu relevé la tête et repris espoir il y a deux ans. Avec des dirigeants comme elle en a, elle n’a pas besoin d’adversaires.

Quelques heures après les résultats du premier, cela recommençait. Eliminés du deuxième tour, ils s’occupent des législatives. Aux propos cités précédemment, il faut ajouter les calculs locaux et l’ajustement en fonction des directives nationales. Oui, mais mon candidat a plus de charisme. Oui, mais mon parti a toujours fait un bon score ici. Oui, mais pas cette fois-ci. Non, mais c’est un accident : nous allons rassembler. Oui, mais notre présidentiable a obtenu un bon score. Oui mais le notre a fait jeu égal. Oui, mais nous avons déjà les affiches. Etc. 

Oh, à droite, ce n’est pas plus glorieux. Selon le nouveau Président, les candidats centristes choisiront de se maintenir ou de se rallier à l’un ou l’autre camp. Pendant ce temps, les problèmes des salariés, des chômeurs passent à la trappe.

Il y a gros à parier que l’espoir d’un centre, capable de modérer une majorité, ne survive pas aux législatives. En fait, la seule solution pour renouveler la vie politique, imposer de nouvelles pratiques, changer la génération des politicards en place depuis trente ans, c’est l’introduction de la proportionnelle pour les législatives et l’interdiction du cumul des mandats. Malgré la répugnance qu’inspire l’extrême droite, il serait bon que les droitistes soient représentés à l’Assemblée, ne serait-ce que pour se civiliser. Il serait encore meilleur que la gauche de gauche puisse faire entendre ses projets dans les émissions parlementaires. Il est tout à fait anormal que les partis écologistes dépendent du bon vouloir du PS pour obtenir des élus alors même que les comportements soucieux de l’environnement gagnent du terrain et que les préoccupations environnementales sont partagées par toujours plus de monde.

La proportionnelle, quelle que soit la combinaison retenue aurait, de plus, l’avantage de renforcer le rôle de la chambre basse et donc le contrôle de l’exécutif, ce qui, après tout, est sa fonction.

On n’en est pas encore là. Pour le moment, l’important est d’amener à la magistrature suprême une personne psychiquement stable et capable de rassembler. De toute évidence, c’est la candidate socialiste qui correspond le mieux à cette exigence. Il ne faudra pas attendre de miracle. C’est peut-être mieux : on ne pourra qu’être agréablement surpris. Et puis, il ne serait pas mauvais qu’un grand pays comme la France, qui a une vocation universelle, qu’on le veuille ou non, porte au plus haut une femme car n’oublions jamais que c’est d’une femme que nous venons tous.

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Commentaires
A
...je me suis (un peu !) reconnu dans ta description des mentalités à gauche...et ça me vexe salement (il n'y a que la vérité qui fâche!)! Je vais donc réfléchir puissamment avant de te répondre...
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