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la lanterne de diogène
14 juin 2010

Solutions locales pour un désordre global

solutions_localesCe film montre comment après la deuxième guerre mondiale, les industries chimiques qui fabriquaient des éléments pour les bombes et pour les gaz se sont reconverties dans la fabrication d’intrants pour l’agriculture. Cette conversion n’a pu se concrétiser qu’en créant un lien de dépendance inévitable entre les agricultures et les groupes industriels multinationaux.

 

 

 

Concrètement, il a fallu convaincre –assez facilement d’ailleurs –les agriculteurs que ces produits chimiques allaient leur faciliter la vie et alléger la pénibilité de leurs tâches. Les subventions gouvernementales serviraient à financer une partie de ces investissements (qui s’ajoutaient à ceux consacrés à l’achat de matériel), l’autre partie relevant du crédit et donc de l’endettement. Le résultat, nous le voyons tous les jours : la plus grande partie des budgets européens (donc des impôts et de

la TVA

) part dans le soutien à l’agriculture. Une autre conséquence est la dispersion de produits chimiques en tous genres dans la terre, l’eau, dans l’air et sur les plantes. Ceux qui les manipulent –les paysans –sont les premiers exposés ; d’autant qu’ils ne prennent pas les précautions minimales. En fin de chaîne, les consommateurs ingèrent des aliments qui ont subi des traitements.

 

 

 

Ces traitements consistent à prévenir les maladies éventuelles des plantes et à les soigner. En effet, les nouvelles plantes issues de croisement et hybridations sont plus fragiles et c’est voulu, aussi. Arrivées aux silos, les graines malades sont mélangées avec les autres. Or, on ne trouve plus d’autres semences que celles préparées par les groupes chimiques et qu’on ne peut pas replanter d’une année sur l’autre. En contrôlant les semences, les industries chimiques établissent un lien de dépendance que vient renforcer les législations locales interdisant l’utilisation des semences traditionnelles.

 

 

 

Selon M. et Mme Bourguignon, docteurs en microbiologie des sols, les industriels ont repéré puis sélectionné les semences les plus fragiles et les ont hybridées. Une fois la plante sortie de terre et cultivée, on ne peut pas la ressemer. Donc, chaque année, il faut racheter les semences. Entre les semailles et la récolte, il aura fallu amender le sol (appauvri par la culture intensive), le préparer avant de semer. Il aura fallu protéger la plante et la soigner. A chacune de ces étapes, il aura fallu payer à des groupes chimiques des produits rendant le producteur totalement dépendant.

 

 

 

La pomme golden représente bien ce cycle de sujétion. Alors qu’un pays comme

la France

possédait plus de cent variétés de pommes, on n’en trouve plus que cinq autorisées dont la fameuse pomme jaune ; une des plus fragiles. Elle nécessite plus de traitement qu’une variété rustique, obligeant à des traitements tout au long de l’année.

 

 

 

Les mêmes révèlent les recherches pour obtenir des poulets sans plume, des tomates carrées. On a fait manger des produits carnés aux vaches, on a coupé la queue des cochons, les oreilles parce que les animaux deviennent agressifs lorsqu’ils sont confinés. Tiens, comme c’est curieux. On a fini par arracher les dents des porcelets (à vif bien sûr) mais l’agressivité n’a pas cessé. Les chercheurs ne comprennent pas pourquoi. Ce pourrait être risible mais les manipulations pour y parvenir sont autant de processus qui contrarient la vie naturelle. Bien entendu, aucun organisme extérieur n’est préparé à ces modifications y compris l’animal ou la plante elle-même. Cela participe tout à fait de cette idée selon laquelle, l’Homme doit maitriser la nature, imposer sa loi et, surtout, refuser ce qui est naturel au profit de ce qui est façonné.

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/04/21/17644185.html

 

 

 

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/03/01/17087192.html

 

 

 

Bien sûr, le capitalisme encourage ces dérives qui rapportent des bénéfices au contraire des cycles naturels. Un agronome indien prend l’exemple d’une rivière. Tant qu’elle est propre, elle ne rapporte rien. Qu’elle devienne polluée et chaque intervention viendra augmenter le PIB : observations, rapports d’experts, interventions, dépollution, construction d’usines de retraitements. Il aurait pu tout aussi bien rappeler qu’une vache qui broute de l’herbe dans un pré ne rapporte pas beaucoup. Si elle est élevée en hangar, il faudra la nourrir, lui apporter à manger, lui apporter des compléments alimentaires, la soigner. A chaque fois, il faut payer et ça fait marcher l’économie. Ensuite, les maladies dues à la consommation de sa viande rapportent encore.

 

 

 

Car, si le film s’appelle «Solutions locales pour un désordre global », c’est parce que des solutions existent pour briser ce cycle d’endettement des paysans et d’empoisonnement de la terre et des plantes. Tous les paysans qui en sont sortis laissent la nature opérer les transformations nécessaires. Avec les techniques modernes, les engins mécaniques, le travail est considérablement allégé. Les sols et les plantes étant plus sains, cela nécessite moins d’interventions. La santé des agriculteurs et des consommateurs s’en trouve améliorée.

 

 

 

De toute évidence, le jeu en vaut largement la chandelle. Le bon sens plaide en faveur d’une agriculture qui se développe en collaboration avec la nature et à taille humaine. Or, si l’on s’entête, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a une volonté. Bien sûr, les firmes chimiques n’ont aucun intérêt dans une agriculture qui se passe largement de leurs produits. Elles n’ont pas intérêt dans une production qui ne provoque pas de maladies pour les sols, les plantes, les consommateurs. Néanmoins, le film de Coline Serreau souligne un parallèle intéressant et terrifiant. De nombreux intervenants –dont Mme Vandana Shiva – vandana_shiva remarquent que le développement de l’agriculture chimique s’accompagne, outre d’une gestion de la pénurie, d’une discrimination et d’une répression du genre féminin. Les conséquences de cette agriculture insensée constituent, indirectement, le génocide féminin, autrement dit les meurtres de petites filles et de fœtus féminins. Dans ces cycles artificiels, les filles ne rapportent rien ; comme les rivières propres. Non seulement l’agriculture chimique est une fuite en avant, dont nous pressentons tous l’issue fatale, mais en plus, elle subordonne et tue les populations féminines.

 

 

 

A titre personnel, je regrette que le film n’évoque pas des points qui me paraissent tout aussi essentiels.

 

  • Premièrement la perte de terres arables pour l’agriculture. Il s’agit, généralement, de très bonnes terres puisqu’elles ont permis, en des temps anciens de se sédentariser. Aujourd’hui, l’accroissement de la population et des ses besoins contraint d’utiliser ces terres non plus pour nourrir mais pour construire, pour bétonner. Tous les dix ans, en France, l’équivalent d’un département est perdu pour l’agriculture.

 

  • Ensuite, les changements de mode de production passent par un changement complet des mentalités dans le monde rural (pas seulement agricole). La plupart des paysans productivistes comparent leurs productions de blé et craignent très fortement que le recours aux méthodes naturelles ne soit un retour en arrière qui se traduirait en termes de pénibilité. Ils redoutent qu’un moindre recours aux produits chimiques ne s’accompagne d’un retour à la traction animale et à l’arrêt des subventions. Les agriculteurs biologiques utilisent, bien évidemment, des tracteurs modernes et des engins pour récolter. Il ne faudrait pas que les images tournées en Inde laissent croire à ce retour en arrière en voyant les paysans des rizières derrière des paires de bœufs. Les tracteurs acquis pour l’agriculture intensive ne l’ont été qu’au moyen de crédits qui assujettissent encore plus les paysans : dépendance aux semences brevetées, aux intrants chimiques, dettes à rembourser. L’agriculture biologique n’est pas une agriculture primitive.

 

  • Le film ne fait qu’une vague allusion à l’accaparement des terres agricoles sur le continent africain ; le seul à avoir quelque peu échappé à l’agriculture intensive et chimique. Cet accaparement –nouvelle colonisation de fait – compense la perte de terres agricoles en Chine où la construction de mégapoles et des usines qui fabriquent tous nos produits bétonne les bonnes terres.

 

  • Cela conduit au dernier point qui me semble le plus important : la démographie. Jamais

    la Terre

    n’a eu 7 milliards d’habitants comme c’est presque le cas aujourd’hui. Les ressources –nous commençons à peine à en être conscients –sont finies. Pourtant, les végétaux qui nourrissent se renouvellent naturellement. Il est donc primordial de préserver les plantes et leurs sols pour relancer les processus naturels de renouvellement des seules richesses nécessaires, à savoir celles qui assurent la nourriture et les soins. Tous les points soulevés par le film et ceux que nous venons de souligner sont subordonnés à ce facteur démographique et à l’objectif qu’il sous-tend : la reconquête des sols pour une production naturelle.

 

 

 

A notre niveau, nous pouvons interpeler nos élus, participer aux réunions publiques et intervenir pour défendre une agriculture de proximité, débarrassée de ce qui enchaîne les agriculteurs et qui pollue les sols, l’eau, l’atmosphère et les consommateurs. Il ne faut plus que les produits agricoles soient des marchandises mais de la nourriture. Il ne faut surtout pas, comme l’a dit M. Pierre Rabhi, agronome réputé, qu’avant un repas on en vienne à dire « bonne chance » au lieu de « bon appétit ».

 

 

L’agronome brésilienne Ana-Maria Primavesi : sans doute la personnalité la plus attachante du filmana_primavesi_25

 

 

 

http://www.solutionslocales-lefilm.com/accueil

 

 

 

http://fr.ekopedia.org/Solutions_locales_pour_un_d%C3%A9sordre_global

 

 

 

http://www.youtube.com/watch?v=F7xG3QgJXx4

 

 

 

http://www.dailymotion.com/video/xci0nc_solutions-locales-pour-un-desordre_shortfilms

 

 

 

 

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