Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la lanterne de diogène
28 avril 2020

Robert Herbin

À ma grande honte, je connais mieux Robert Herbin qu’Henri Weber dont je n’avais jamais entendu parler. Pourtant, j’ai lu de nombreux ouvrages et vu de documentaires sur Mai 68 mais Henri Weber m’est totalement inconnu.

https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2020/04/27/l-ancien-senateur-socialiste-henri-weber-figure-de-mai-68-et-du-trotskisme-francais-des-annees-1960-et-1970-est-mort_6037833_3382.html

https://www.nouvelobs.com/politique/20200427.OBS28031/henri-weber-figure-de-mai-68-et-du-ps-est-mort-du-covid-19.html?utm_medium=Social&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR2cxaVh8NE4lkSK0btY19ttUGYiDoTpoKWPtrtL72_z38LpPKRx09Zdvnw#Echobox=1587975679

En revanche, à la même époque, je connaissais bien Robert Herbin. Il se trouve que ma famille a des affinités avec Saint-Étienne et sa partie stéphanoise me racontait que lorsqu’ils disaient où ils habitaient en ville, ils ne rencontraient qu’indifférence voire mépris. C’est alors que, facétieux, ils ajoutaient qu’ils étaient logés dans le même immeuble que Robert Herbin. Ils acquéraient aussitôt un statut enviable. Ainsi est la nature humaine. Donc, Robert Herbin était le chouchou de ma famille et pas seulement à cause de ses cheveux roux qui le faisaient repérer sur un terrain de football. Forcément, je l’ai vu jouer, chez nous, au Red Star, mais contre les nôtres que je voyais ce jour-là en blanc et parements verts pour la première fois. C’est que, à l’époque, la courtoisie était liée au sport et celui qui recevait se devait d’accueillir les visiteurs de la meilleure manière possible. Donc, si l’on recevait une équipe qui arborait les mêmes couleurs, on enfilait un maillot inverse. Pourtant, à la même époque, on a commencé à égratigner ces règles à cause de la télévision. Il fallait que sur l’écran en noir et blanc, on puisse reconnaître les deux équipes et donc faire attention à ce que les couleurs des maillots, même différentes, contrastent. Ainsi, lors des France – Irlande de rugby, les Irlandais refusant de changer leur vert national, la France devait jouer en blanc car le bleu ne les distinguait pas à l’écran.

herbinHerbin a connu une carrière très honorable de joueur mais sans comparaison avec un Didier Deschamps malgré les commentaires qui font état de son palmarès. Ce n’était pas une vedette ni même un joueur de premier plan. Il a très peu joué en équipe de France. Encore une fois, il devait sa célébrité à ses cheveux roux qui l’ont fait connaître du grand public pour avoir soulevé plusieurs fois la Coupe de France en tant que capitaine et remporté le Championnat. Comme entraîneur, il a pourtant marqué dans la mesure où il a imposé un entraînement qui ne se limitait plus au seul jeu mais qui visait à faire des joueurs des athlètes complets. À l’époque, le gardien de but yougoslave Ivan Curkovic avait importé des méthodes déjà en vigueur dans de nombreux pays. Lui-même était une armoire à glace, ce qui ne s’était encore jamais vu en France où l’on confinait les garçons qui ne couraient pas vite et à qui l’on ne pouvait pas confier d’autre poste. Donc, Herbin a introduit en France la musculation et les entraînements spécifiques pour chacun des postes sur le terrain. On a longtemps désigné la défense stéphanoise comme la meilleure du championnat mais elle devait surtout le faible nombre de buts encaissés à leur gardien qui réclamait insatiablement toujours plus d’entraînement, ainsi qu’à la façon de jouer que nous verrons. Seulement, culturellement, en France, le gardien de but n’est là que pour faire écran, au dernier moment, quand la plus grande partie du travail est effectuée par les joueurs du champ. Il faut se rappeler que, jusque dans les années 1980, il n’y avait qu’un seul gardien de but par équipe et que, en cas de blessure (très rare puisqu’il ne prenait jamais beaucoup de risques), c’était un joueur du champ qui le remplaçait. Curieusement, c’était souvent l’attaquant de pointe. C’est ainsi que le grand Pelé s’entraînait à ce poste. Il faut dire aussi qu’on n’avait droit qu’à un seul changement puis deux, mais que bien sûr, on n’envisageait jamais de remplacer le gardien.

Aujourd'hui, je lis qu’Herbin était surnommé le Sphinx. Sans doute les jeunes journalistes (ou plutôt l’un d’entre eux sur lequel les autres ont copié leur papier) qui n’ont pas connu cette époque, ont lu ce surnom en parcourant rapidement quelques articles et trouvé ce terme dans un contexte particulier. Il était surnommé Roby, tout simplement et, comme entraîneur, il est lié à l’épopée des Verts en Coupe d’Europe. On se rappellera que la mauvaise foi proverbiale de Thierry Rolland avait attribué la défaite à des poteaux de buts carrés et que, depuis, c’est devenu l’histoire officielle. Herbin comme entraîneur n’honorait pas le sport. Pour simplifier, il imposait un jeu à l’allemande, désagréable à regarder mais redoutablement efficace. C’est ainsi que L’Allemagne doit son impressionnant palmarès avec l’anti-jeu qui est sa marque de fabrique au point qu’un joueur anglais a pu dire : le football se joue en deux équipes de 11 joueurs et à la fin c’est l’Allemagne qui gagne. Ça consistait donc à monopoliser le ballon au moyen de petites passes entre joueurs et de passes au gardien en cas de danger afin de priver l’adversaire de ballon. Les buts étaient marqués de façon opportuniste après avoir épuisé et dégoûté les joueurs d’en face, forcés de courir d’un bout à l’autre en essayant vainement de capter une balle. Ce jeu présente l’avantage pour ceux qui le pratiquent de ne pas risquer de blessure, d’interdire toute contre-attaque, et de ne pas fatiguer les joueurs qui se réservent ainsi pour de grandes occasions où l’adversaire parviendrait à faire sauter le verrou. Donc, Herbin n’est sûrement pas lié au beau jeu mais à une tactique qui a trouvé ses limites en compétition européenne. Ce ne sont pas toujours les Allemands qui gagnent ni cette vilaine tactique qui paie. En France, on vantait la défense des Verts dont nous venons d’expliquer les raisons de son efficacité (l’excellent gardien Curkovic et le jeu fermé) mais on oublie qu’ils possédaient des buteurs exceptionnels parmi lesquels Beretta (parti avant l’épopée), Revelli (parti aussi) et surtout Larqué, impérial sur les coups de pieds arrêtés et capable de marquer dans des circonstances difficiles. De plus, à l’époque, un jeune formé au club allait enchanter la pelouse de Geoffroy-Guichard, Rocheteau, surnommé « l’Ange vert ». Il faut une conjonction de plusieurs facteurs pour parvenir au plus haut niveau.

 

Après Pape Diouf, l’emblématique président de l’OM, après Michel Hidalgo (déjà évoqué), le football français perd un grand nom, Robert Herbin auquel s’ajoutent les joueurs frappés par le coronavirus.

 

 

https://sport.francetvinfo.fr/football/lembleme-des-verts-robert-herbin-surnomme-le-sphinx-est-decede-lage-de-81-ans#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20200428-[lestitres-coldroite/titre6]

 

Publicité
Publicité
Commentaires
la lanterne de diogène
Publicité
la lanterne de diogène
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 219 772
Newsletter
Publicité