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la lanterne de diogène
25 juin 2016

BREXIT : les hypothèses (1)

BREXIT 5

Donc, c'est le Brexit, c'est la fin de l'Europe (du moins de l'UE), c'est la fin des haricots ; comme le suggéraient les fameux messages de la France libre sur radio Londres. Eh bien, mes amis, pour une première fois, l'essai est concluant. Mâtin ! On nous a bassiné pendant des décennies en affirmant qu'il n'y avait jamais eu de référendum en GB et que ça n'était pas possible. Finalement, il y en a eu et le peuple a dit non. Belle réussite, n'est-il pas ?

D'abord, notons que nous nous sommes trompés en annonçant la victoire probable du maintien de la Grande-Bretagne dans l'UE. Chronique d'une victoire annoncée

À force de voir ce pays rester en dehors de tout ce qui fait sens et d'obtenir, à chaque fois, une exception, un privilège, une faveur, nous avions pronostiqué qu'il n'y avait aucune raison que ça ne continue pas. Qu'est-ce qui a changé, alors ? Sans doute que trop, c'est trop et qu'à force de jouer sur tous les tableaux pour être bien sûr de gagner, on s'épuise.

Concrètement, que va-t-il advenir ? Bof, pas grand-chose ne changera. Comme l'a parfaitement résumé un parlementaire LR : « Avant, le RU avait un pied dedans et un pied dehors. En cas de Brexit, ce sera le contraire ». La GB avait l'habitude de picorer ce qui l'intéressait et de laisser le reste aux autres tout en imposant ses diktats à l'ensemble. Ça a conduit, notamment, à l'intégration de dix nouveaux membres d'un seul coup afin de faire rentrer la Pologne dans le premier convoi alors qu'elle ne remplissait pas les conditions. L'UE est en crise depuis ce moment. En fait, les crises politiques se multipliaient dans tous les États membres mais l'on faisait semblant. Et puis, tout comme une religion, il y avait une réponse européenne à tout. Arrive un moment où ça ne marche plus. Alors, on fait du zèle et ça s'appelle l'intégrisme : on sait que ça ne marchera pas mais on force tout le monde à le faire et plus vite que ça !

 

BREXIT stock exchange 2

Les journalistes dépêchés à Londres ont pu dire, dès le vendredi matin, que toute la nuit, des étages de bureaux de la City sont restés allumés. Ça n'était pas pour regarder la Coupe d'Europe puisqu'il n'y avait pas de match. En effet, au petit matin (et les nuits sont courtes en ce moment), la bourse avait déjà dégringolé. Pas de panique ! Les boursiers et autres spéculateurs s'amusent. C'est dans leur nature profonde de baisser ou de monter à la moindre rumeur, au moindre frémissement de ceci ou de cela. Laissons-les faire mumuse avec notre argent. Un rien les amuse.

Donc, la livre baisse, la livre est au plus bas. Et alors ? Nous savons tous qu'elle remontera. De toute façon, nous ne payons rien en livre-sterling. Dans l'immédiat, gageons que la zone euro va tout faire pour soutenir le cours de la livre. À qui cela va-t-il profiter ? Certainement pas au contribuable de base qu'on n'aide jamais quand lui ne peut plus payer. La livre s'en sortira et sûrement mieux que l'euro.

Pour le reste, la GB ouvre une crise politique majeure. Les deux partis qui font marcher le bipartisme étaient officiellement pour le maintien dans l'UE. Ensemble, ils n'ont donc plus la majorité...Le UKIP a l'air de prendre davantage que les autres formations qui ont tenté d'en finir avec le bipartisme. Jusque là, les Libéraux ou autres ont surtout pris des voix aux Travaillistes. UKIP en prendrait plutôt aux Conservateurs mais ça ne changera pas grand-chose. Au moment d'écrire ces lignes, nous apprenions, sans surprise, la démission du Premier Ministre tory Cameron. Fort bien mais qui pour le remplacer ? Son vis-à-vis fantôme n'a pas plus de majorité que lui. C'est sans doute pour ça qu'il annonce qu'il expédiera les affaires courantes jusqu'en octobre ; des fois qu'une guerre soit déclarée…Comme ça, ça laisse le temps de se retourner et de trouver une astuce pour partir tout en restant mais sans en avoir l'air, tout en affirmant le contraire haut et fort. Oh, les précédents référendums dans les pays membres de l'UE se sont tous terminés en eau de boudin. On a négocié, les pays qui avaient voté non ont obtenu des concessions, des avantages, des exemptions. On a revoté et le oui l'a emporté. Ailleurs, on s'est assis sur le résultat.

La logique voudrait que le processus de détachement de l'UE s’enclenche. Il n'en sera rien. On aura droit à un sommet extraordinaire auquel sera conviée la GB et, auparavant, une « rencontre » franco-allemande. Déclaration commune de bonnes intentions, renouvellement de confiance, promesse de se revoir au plus vite. On se reverra. On négociera et l'on fera tout pour éviter de rebattre les cartes comme les commentateurs le réclament depuis quelques heures. Ficher en l'air tout l'édifice qui n'est, justement, qu'un château de cartes, n'est pas prévu par les eurocrates et par les élus et autres membres des exécutifs. Donc, ce coup de pied salutaire ne sera même pas esquissé. Pas question de bouger pendant les sacro-saintes vacances qui tombent à pic pour ne rien faire. Il continuera donc comme si de rien n'était. Et d'ailleurs, rien n'est. La politique sur laquelle il s'est fait élire sera appliquée et, notamment, dans ses aspects les plus contestables. Un ancien Premier Ministre français avait appelé ça « le sale boulot » ou, pour le dire autrement, ce qui est le plus impopulaire et qu'on appelle pudiquement « les réformes ». En fait, ce qui ne favorise que la grande finance. Ça tombe bien, comme ça, les travaillistes n'auront pas à le faire et, de toute façon, ils ne sont pas prêts à gouverner. Il est urgent d'attendre !

Plus que jamais, pas de panique ! L'Angleterre n'a pas encore quitté l'UE et M.Cameron est toujours Premier Ministre.« Much ado for nothing », comme aurait dit mon camarade Shakespeare. Lorsque le Premier Ministre aura engagé le fameux article 50, il faudra attendre encore deux ans pour voir la GB sortir définitivement. Autrement dit, il peut se passer bien des choses d'ici deux ans ; entre autres, c'est plus qu'il n'en faut pour trouver la martingale qui permettra de contourner le vote des Britanniques.

Supposons – car ça n'est qu'une hypothèse – que la GB quitte vraiment l'UE. On annonce déjà que l’Écosse va revoter pour pouvoir rester dans l'UE et probablement l'Ulster. Rien que ça, incite à penser que la GB ne va pas sortir de si tôt. Ensuite, si vraiment ça se passe, l’Écosse n'est pas près de rentrer dans l'UE. D'abord, les autres ne voudront toujours pas froisser l'Angleterre. Ensuite, on redouterait une contagion. La Catalogne ne manquerait pas d’emboîter le pas et, sans doute, nombre de régions prospères ou fortement identitaires suivraient. On assisterait à un morcellement de l'Europe ; ce qui serait un comble pour un projet qui se voulait unitaire. Pas de panique ! Pour le moment, il ne se passe rien et le moment va durer un certain temps ; comme le refroidissement du canon. Wait and see !

 

http://www.monde-diplomatique.fr/2016/02/CASSEN/54706

 

http://www.rtl.fr/actu/international/en-direct-brexit-referendum-resultats-royaume-uni-vote-cameron-7783826619

http://www.capital.fr/a-la-une/politique-economique/le-brexit-loin-d-etre-une-catastrophe-une-chance-pour-la-france-1141134

http://www.observatoiredeleurope.com/De-grands-economistes-pour-une-sortie-urgente-du-piege-mortel-de-l-euro_a1655.html

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Commentaires
A
Excellent article Yves. Tu rejoins celui de Jacques SAPIR sur son site, intitulé "Brexit (et champagne)" et que je recommande à tous (il complètera le tien !)<br /> <br /> https://russeurope.hypotheses.org/5052
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