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la lanterne de diogène
25 octobre 2010

La jeunesse est dans la rue

On se focalise sur le nombre de manifestants. Le gouvernement cherche à le minimiser. Normal, c'est son intérêt et celui de ceux qu'il sert. Les syndicats cherchent à le gonfler pour tenir compte de ceux qui voudraient bien faire grève et manifester mais ne le peuvent pas. Justement, cette impossibilité n'est elle pas la principale restriction du droit de grève ?


Un quotidien parisien annonce avoir fait appel à une société espagnole qui a un truc infaillible pour compter les manifestants. Il apparaît que le nombre est alors inférieur à celui de la police. On peut aussi bien se demander pourquoi on accorde un meilleur crédit à cette société. Qu'est ce qui nous prouve que, eux, ne se trompent pas ?

Peu importe le nombre et le gouvernement a tort de miser sur un essoufflement du mouvement et d'un pourrissement de la mobilisation après avoir écumé les petits salaires. De toute évidence, tout le monde est contre cette réforme des retraites sauf les personnalités de la droite et les habituels lèche-bottes qui pensent toujours qu'on n'y peut rien, que c'est comme ça, qu'il faut faire comme les autres, que le gouvernement est formidable et que l'opposition ne propose rien. Inutile d'argumenter avec de tels individus.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/05/15/17899979.html


Il est clair que la situation est gravissime et que le temps n'est pas à minimiser le mouvement. Le gouvernement ne sait que trop bien qu'il devra abandonner son projet. Le mieux serait qu'il le fasse maintenant dans l'intérêt de tous. Pourquoi faire perdre encore des journées de salaires aux manifestants ? Pourquoi prendre le risque de nouveaux blessés parmi les plus jeunes ? Le gouvernement se grandirait en convoquant des états-généraux sur les retraites et sur la protection sociale en général, en examinant toutes les propositions.


En brûlant l'étape de la violence, on montrerait qu'on appartient à un peuple civilisé. Pourtant, ce n'est pas le chemin que suit ce gouvernement. S'il redoute l'affrontement, il suppose que le résultat lui sera profitable et que la population aura finalement peur et lui donnera les pleins pouvoirs. C'est un risque qui ne lui coutera pas cher. Tout au plus, les dirigeants perdront leurs postes mais dans le cas contraire, rien ne les arrêtera. En revanche, la population n'a rien à perdre non plus. Au point où nous en sommes, beaucoup ont envie d'en découdre ou, du moins, de se faire entendre. Cela fait des années que nous crions que ça ne peut plus durer. Ça fait des années qu'on ne nous entend pas. Cette réforme des retraites -dont ont sent bien qu'elle sera au minimum inefficace -est la goutte qui fait déborder le vase.


On nous a tout pris. On nous a pris nos bureaux de poste, notre police de proximité, notre assurance maladie (qu'on continue de payer pourtant), nos emplois, nos hôpitaux, nos autoroutes, nos renseignements téléphoniques, notre gaz moins cher.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2006/04/03/1635375.html


On parle de nous prendre nos trains, notre électricité moins chère.

À chaque fois, ce sont des augmentations de tarifs et des emplois en moins sans parler des services qui ne sont plus rendus. On a peur de tomber malade, de ne pas avoir d'argent pour se soigner, de ne pas arriver à temps à l'hôpital,

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/02/20/16981005.html


Maintenant, c'est la retraite. Ça fait peur. On se voit tous en haillons, grelottant de froid, mendiant dans les rues, malades, isolés. La retraite, c'est le capital de ceux qui n'en ont pas. La retraite, ça ouvre, au moins quelques droits à la protection sociale. On comprend que ce soit un peu plus sensible que tous les coups reçus ces dernières années. Personne n'a envie de souffrir alors qu'on sera vieux et faibles.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2009/12/29/16317820.html


On parle davantage d'un nouveau « Mai 68 » plutôt que d'un hiver 95. C'est que la société est bloquée et a besoin d'un sérieux coup de torchon. En 1968, on n'en pouvait plus des contraintes d'une société bourgeoise timorée et craignant l'instauration d'un régime communiste. On n'en pouvait plus des contraintes morales qui pesaient sur un monde qui avait changé depuis la Libération. La population avait augmenté et ses revenus aussi. On était en pleine expansion.

Aujourd'hui, c'est presque le contraire. La morale est débridée, les revenus sont en baisse, la précarité induit l'insécurité tant sur le plan social et économique qu'en termes d'agression physiques. On craint maintenant une société libéraliste sans règle, affranchie de toutes les lois protectrices mais profitable aux seuls intérêts des financiers. La population continue d'augmenter : il n'y a que ça qui ne change pas sauf que le nombre est plus important aujourd'hui, partant, les problèmes aussi.


Quant aux jeunes, un Depardieu peut bien rigoler et dire que vu de l'étranger ça fait rire d'entendre un gamin de 15 ans parler de sa retraite et que lui, il n'y pensait pas à son âge. Faut-il s'en étonner ? Depuis des dizaines d'années, les programmes scolaires ont bien pris soin de ne pas susciter chez les élèves le moindre sentiment contestataire. Le résultat, nous le constatons tous les jours. Plutôt que d'intégrer un mouvement politique, les plus défavorisés trainent et cassent leur environnement déjà pas folichon. Plutôt que de se disputer, ils en viennent aux mains et au meurtre.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2010/01/10/16463468.html


Les autres restent encore calmes mais sentent bien que leurs études ne les mèneront pas loin. Pire, les années à étudier repousseront d'autant l'âge de gagner sa vie et donc d'avoir des revenus pour devenir autonome. La retraite sera repoussée; on y revient. À la sortie des études, le boulot n'est pas assuré malgré les diplômes. Ils sentent que les dés sont pipés. Ils sentent leurs parents craindre pour eux et pas seulement l'angoisse légitime de tout parent responsable. Ils voient leurs parents humiliés en permanence car ils ne peuvent pas assurer une vie décente à leur famille tandis qu'ils sont sollicités de tout part pour acheter des produits de marques. Ils voient des proches au chômage et on leur dit qu'ils devront rester deux ans de plus au chômage avant de toucher le minimum vieillesse car il ne faut pas se faire d'illusion. Ces deux années de plus déboucheront rarement sur une retraite. De nos jours, les parcours professionnels sont pleines de périodes de vide. C'est le minimum vieillesse qui se profile à l'horizon mais sans être propriétaire de son logement, sans avoir pu constituer une petite sécurité pour les vieux jours durant les étapes où l'on n'aura perçu que des allocations chômage ou le RSA.


La droite fustige ces jeunes soi-disant manipulés qui ne comprennent rien et qui ne seront concernés par la retraite que dans trente ans. Voire ! Ce serait plutôt quarante ans maintenant. Ensuite, s'ils ne comprennent rien, il faudrait peu-être revoir l'enseignement qu'ils reçoivent et dont elle est responsable depuis une dizaine d'années au moins. Et puis, ces jeunes sont aussi leurs enfants. Enfin, ce n'est pas l'avis des banques et des assurance qui, dans le même temps s'adressent aux jeunes pour leur conseiller une épargne en vue de pallier les lacunes de la retraite, précisément. La force de la droite, c'est qu'elle est bourrée de contradictions mais n'en éprouve aucun complexe.


http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2008/05/08/9103366.html


Bien sûr, les jeunes ne formalisent pas les choses mais ils enregistrent ce qu'ils voient au jour le jour. Il y a deux ans, ils défilaient pour réclamer des profs et des cours quand le gouvernement voulait (et l'a fait) supprimer des postes et des filières. Aujourd'hui, ils descendent dans la rue, encore une fois en hiver, pour défendre les retraites. Non, monsieur Depardieu, il n'y a pas de quoi rire. Tout le monde aimerait que les jeunes soient aussi insouciants que vous à leur âge et eux les premiers. Seulement, le monde que nous leur laissons ne leur en offre pas la possibilité. Des commentateurs étrangers les appellent à construire un monde meilleur. Quelle foutaise !


Depuis l'émergence de l'homo sapiens, on attend que la génération d'après construise ce monde meilleur qu'on n'a pas su leur laisser. Certaines ont partiellement réussi mais, précisément, avec cette expérience, les générations en place savent comment empêcher la jeunesse d'accéder au pouvoir et d'en chasser ceux qui l'accaparent. Le chômage organisé n'en est qu'un de ces avatars. En poussant la jeunesse à faire des études longues, en retardant son arrivée aux postes de responsabilité, que fait-on d'autre que de lui barrer la route surtout si, en plus, la place qu'elle occupe n'est que provisoire ?

Les jeunes ont appris l'histoire à l'école. Même s'ils mélangent les dates, les événements (comme leurs aînés), ils ont intégré le progrès social qui a commencé par les lois sur le travail des enfants, puis la durée de la journée et de la semaine de travail. Ils ont appris qu'on a introduit la semaine de 40 heures, l'interdiction du travail de nuit pour les femmes (abrogée par l'Union Européenne au nom de l'égalité), les congés payés qui sont passé de deux semaines à cinq semaines en soixante ans, la retraite ; enfin. Pour les jeunes, il y a une logique du progrès social. C'est ce qu'ils ont appris à l'école. On est passé d'une situation de quasi servage à la réglementation sans laquelle la loi du plus fort s'impose. Ils comprennent très bien que revenir sur l'age de départ à la retraite est une régression qui en appelle d'autres.


Si l'on se réjouit de la prise de conscience de la jeunesse, on en demeure pas moins préoccupé de les savoir dans la rue en danger face aux provocateurs et aux forces de l'ordre. On sait que les policiers s'en prennent plus facilement à des éléments isolés ou pas encartés et que, devant des adolescents, ils sont toujours tentés de leur ficher une bonne raclées à ces morveux. Même si on l'a oubliée, l'histoire de Malik Oussékine peut se reproduire.

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2006/12/09/3382307.html




On lira avec intérêt

http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/social/20101014.OBS1278/guillaume-sarkozy-futur-beneficiaire-de-la-reforme-des-retraites.html

qui nous renseigne sur les objectifs probable de la casse de la protection sociale en France.


La réponse d'Anny Dupérey à Depardieu :

«A un stade de notoriété et peut-être d’ébriété, (…) on se sent tout permis, on est au-dessus de tout, (…) on adore cracher dans la soupe. Ça a été un formidable acteur, mais il faut qu’il ferme sa gueule.»


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